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Peut-on vivre sans oublier ?

Publié le 17/01/2022

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Nécessité de l'oubli pour agir.

Ainsi, selon Bergson, la conscience étant mémoire, notre passé nous accompagne intégralement et « se penche sur le présent «. Dans ces conditions, le problème n'est plus d'expliquer la conservation du passé, mais au contraire d'expliquer l'oubli. Car si la conscience est mémoire, si le passé se conserve automatiquement en nous, pourquoi n'avons-nous pas toujours conscience de ce dernier, pourquoi l'oublions-nous? C'est que l'oubli est en fait une condition de l'action. Car si l'homme avait constamment présent tout son passé, il se perdrait dans une rêverie sans fin et sans prise sur le réel. C'est à l'attention que revient ce rôle de choisir dans les souvenirs. L'oubli ne se réduit pas à une déficience de la mémoire, mais il existe un oubli qui est une sélection des souvenirs au service de l'action.

Plus l'homme oublie, plus il est esclave de lui-même. Détruire le passé des nations est le meilleur moyen de les soumettre à un régime politique totalitaire. Plus les hommes se souviennement, plus ils sont libres. MAIS, une bonne mémoire est une mémoire sélective. Si l'homme n'avait pas la faculté d'oublier, il ne pourrait pas progresser. Sans cesse, le passé, surtout celui qui fut douloureux, prendrait le pas sur le futur.

« NIETZSCHE : la nécessité de l'oubli Si l'animal jouit d'un bonheur que l'homme jalouse, c'est parce qu'il n'a pas demémoire supérieure.

Seul l'homme dit « je me souviens » et pour cela il lui estimpossible de vivre heureux et pleinement.

En effet :1) C'est par la mémoire, conscience du passé, que l'homme acquiert laconscience du temps et donc celle de la fugitivité et de l'inconsistance detoutes choses, y compris de son être propre.

Il sait que ce qui a été n'estplus, et que ce qui est est destiné à avoir été, à n'être plus.

Cette présencedu passé l'empêche de goûter l'instant pur, et par conséquent le vraibonheur.2) Le passé apparaît à l'homme comme l'irréversible et l'irrémédiable.

Il marquela limite de sa volonté de puissance.

L'instant présent, ouvert sur l'avenir, estle lieu du possible où peut s'exercer sa volonté de puissance.

Le passé, aucontraire, change et fige la contingence du présent en la nécessité du « celaa été ».

Dès lors la volonté ne peut que se briser sur cette pétrification dupassé qui se donne comme le contre-vouloir de cette volonté.

C'est pourquoi« l'homme s'arc-boute contre le poids de plus en plus lourd du passé quil'écrase ou le dévie, qui alourdit sa démarche comme un invisible fardeau deténèbres ».3) Sans l'oubli l'homme ne peut pleinement vouloir ni agir : il est un êtremalade, il est l'homme du ressentiment.

La « santé » psychique dépend de la faculté de l'oubli, faculté active et positive dont le rôle est d'empêcher l'envahissement de la conscience par lestraces mnésiques (les souvenirs).

Car alors l'homme réagit à ces traces et cette réaction entrave l'action.

Par ellesl'homme re-sent, et tant qu'elles sont présentes à la conscience, l'homme n'en finit pas de ressentir, « il n'en finitavec rien ».

Englué dans sa mémoire, l'homme s'en prend à l'objet de ces traces dont il subit l'effet avec un retardinfini et veut en tirer vengeance': « On n'arrive à se débarrasser de rien, on n'arrive à rien rejeter.

Tout blesse.

Leshommes et les choses s'approchent indiscrètement de trop près, tous les événements laissent des traces; lesouvenir est une plaie purulente.

» CITATIONS: « Se souvenir de tout serait, en bien des circonstances, aussi fâcheux que ne se souvenir de rien; il faudrait,pour nous rappeler une portion déterminée de notre passé, exactement le temps qu'il fallut pour la vivre, et nous neviendrions jamais à bout de penser.

» William James, Principes de psychologie, 1890. « Imaginez l'exemple extrême : un homme qui serait incapable de rien oublier et qui serait condamné à ne voirpartout qu'un devenir; celui-là ne croirait pas à son propre être, il ne croirait plus en soi, il verrait tout se dissoudreen une infinité de points mouvants et finirait par se perdre dans ce torrent du devenir.

» Nietzsche, Considérations inactuelles, 1873-1876. « Nul bonheur, nulle sérénité, nulle espérance, nulle fierté, nulle jouissance de l'instant présent ne pourraientexister sans faculté d'oubli.

» Nietzsche, La Généalogie de la morale, 1887. « Nous n'avons pas encore totalement oublié ce que nous nous souvenons d'avoir oublié.

Nous ne pourrions pasrechercher un souvenir perdu si l'oubli en était absolu.

» Saint Augustin, Les Confessions, vers 400. C'est là le paradoxe de la mémoire : dans l'oubli même, tout n'est pas oublié.

Le fait que nous fassions parfois appelà notre mémoire pour retrouver un événement passé que nous avons « oublié » prouve qu'il demeure bien une tracede cet événement.

Autrement, nous n'aurions même pas conscience de l'avoir oublié. La mémoire-habitude, « fixée dans l'organisme, n'est point autre chose que l'ensemble des mécanismesintelligemment montés qui assurent une réplique convenable aux diverses interpellations possibles.

» Bergson, Matière et Mémoire, 1896.Quand on me demande mon numéro de téléphone, je le donne mécaniquement, sans faire aucun effort pour m'enressouvenir.

En effet, je l'ai communiqué tant de fois que je le connais « par coeur ».

Ainsi ce souvenir a bien toutesles caractéristiques de l'habitude. La mémoire-souvenir « retient et aligne à la suite les uns des autres tous nos états au fur et à mesure qu'ils seproduisent, laissant à chaque fait sa place, et par conséquent lui marquant sa date, se mouvant bien réellementdans le passé définitif, et non pas, comme la première lia mémoire-habitude, dans un présent qui recommence sanscesse.

» Bergson, Matière et Mémoire, 1896. Si l'on me demande comment j'ai réussi à apprendre mon numéro de téléphone, là je dois réfléchir.

Je dois précisément faire appel à ma mémoire pour retrouver mes premièreshésitations, les procédés mnémotechniques dont je me suis servi, les endroits où j'ai commencé par noter monnuméro...

Tous ces souvenirs sont datés et appréhendés comme des événements du passé.

Seule la mémoire que jemobilise de cette façon est la mémoire vraie.. »

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