Peut-on vouloir le bien sans le faire ?
Publié le 27/02/2008
Extrait du document
«
produit de l'histoire, et en tant que tel entièrement déterminé ; il en est aussi le producteur, et par là il se produitlui-même.
Connaître, donc intérioriser les lois qui déterminent l'homme, permet aux individus de définir les conditionsd'une société sans classes, au lieu d'en subir les déterminations socio-historiques comme un mécanisme aveugle.— Dans la problématique freudienne, également, le dévoilement des déterminations psychologiques de l'individu aucours de l'analyse doit lui permettre de surmonter ses névroses, produits de conflits infantiles qui ont déterminé sonexistence.• Ainsi, il convient de dépasser le dualisme de la liberté et de la loi : l'homme est dans la loi parce qu'il est dans lemonde, mais sa liberté peut naître au cœur de la loi.
En est-il de même sur le plan moral et politique ?
2) liberté, lois morales et politiques
a) Liberté naturelle et liberté civile• La philosophie politique classique oppose l'état de nature à l'état civil.
Elle conçoit la Cité comme l'unité quedoivent constituer des volontés individuelles d'abord séparées, voire conflictuelles, par l'intermédiaire d'un contrat.• En conséquence, on comprend que la liberté naturelle des individus soit en totale contradiction avec la soumissionà des lois politiques.
L'homme qui a «un droit illimité à tout ce qui le tente et qu'il peut atteindre » (Rousseau,Contrat Social, I, 8) ne peut se soumettre à une loi commune sans perdre ce droit.
Le désir naturel de puissance quicaractérise l'homme naturel selon Hobbes, ne pourrait se réaliser dans le cadre d'une Cité.• Mais libre de toute soumission aux lois politiques, l'individu naturel est soumis aux lois de l'état de nature.— Rousseau : l'homme naturel est comme un animal qui obéit à l'« impulsion du seul appétit », et cette obéissanceest «esclavage» (ibid.); seule la vie sociale développe l'intelligence et la maîtrise de soi.— Hobbes : le désir naturel de puissance engendre un état de guerre de tous contre tous, qui menace jusqu'àl'existence de chacun.• C'est pourquoi la soumission volontaire aux lois politiques, loin de contredire une authentique liberté humaine, enest la condition nécessaire :— Hobbes : en renonçant à sa liberté naturelle, l'individu acquiert le droit de faire ce que n'interdisent pas les loisproclamées par un Souverain absolu, garant de la paix civile.— Rousseau : limitée par la Volonté générale, la volonté individuelle est cependant libre, qui a l'intelligence de vouloirle bien commun que veulent tous les citoyens.Remarque : rapprocher cette thèse de Rousseau de la morale de Kant : le devoir est l'obéissance à la loi que posema raison, de sorte que faire son devoir, c'est être autonome, libre.• Ces théoriciens, cependant, parlent des lois telles qu'elles devraient être, non de celles qui existent.
Sur cedernier plan, comment s'articulent loi et liberté ?
b) L'Esprit des lois selon Montesquieu• On a dit que Montesquieu était le fondateur de la science politique.
Il s'oppose en effet à l'idéalisme desthéoriciens qui, comme Rousseau, veulent « savoir ce qui doit être pour bien juger de ce qui est» (Émile, V).
Sonprojet, Montesquieu le formule ainsi : « Je ne traite point des lois, mais de l'esprit des lois, (...) et cet espritconsiste dans les divers rapports que les lois peuvent avoir avec diverses choses » (L'Esprit des lois, I, 3).• Montesquieu s'efforce donc de décrire les conditions qui expliquent l'existence de tel État concret, dans tel pays,sa constitution politique, ses lois juridiques, la morale qui en caractérise le fonctionnement.
Le climat, la dimensiondu terrain, sa nature, etc., forment un «esprit général » (les mœurs, les manières de penser et d'agir) qui, à leurtour, s'expriment dans les lois.
« Ce sont les différents besoins dans les différents climats qui ont formé lesdifférentes manières de vivre; et ces différentes manières de vivre ont formé les diverses sortes de lois.
» (XIV, 10.)• En prolongeant cette approche, ne pourrait-on pas dire que les lois politico-juridiques, comme les lois morales, nesont pas les conditions extérieures de la liberté d'individus abstraits, mais qu'elles en expriment la réalité concrète ?
c) La liberté, substance des lois de l'État (Hegel)• Lecteur de Montesquieu, Hegel tire ces conséquences : « Le système du droit est l'empire de la liberté réalisée »(Principes, introd.
4).
Autrement dit, le sujet de la locution «être libre» n'est qu'en apparence l'individu particulier;plus profondément, c'est l'Etat et ses lois.• L'histoire universelle est la réalisation de cette liberté, à traversées États qui se sont succédés, en particulier àtravers l'État oriental, où «la liberté n'est que caprice» du « despote », puis à travers les lois des Cités antiques, quidécouvrent que «quelques-uns sont libres, non l'homme en tant que tel», enfin à travers l'État moderne, qui affirmeet réalise progressivement la liberté de tous les hommes (Cf.
La Raison dans l'Histoire).• La soumission aux lois de l'État n'apparaîtrait donc comme contradictoire avec la liberté, qu'à des penseurssuperficiels, incapables d'accéder à la rationalité plus riche que les lois juridiques et morales d'un peuple expriment etincarnent.
« Le droit, l'ordre éthique, l'État, constituent la seule réalité positive et la seule satisfaction de la liberté.La seule liberté qui se trouve réellement brimée, est l'arbitraire qui ne concerne d'ailleurs que la particularité desbesoins» (ibid., 10-18, p.
135-136).• La philosophie de Hegel, selon son expression, n'a pas « la prétention d'enseigner comment doit être le monde »(Principes, préface).
Elle énonce simplement la rationalité de ce qui fut.
De l'avenir, elle ne pouvait rien nous direque de très général : il devait être encore progrès dans la liberté, mais imprévisible.
Peut-on dire qu'il l'a été ? Leslois de la Cité sont-elles réellement ce par quoi l'être humain accomplit sa liberté ?
d) Au-delà des lois de l'État• L'anarchisme, à travers sa critique virulente de l'État, revendique une liberté individuelle qu'aucune loi ne protégerajamais : « La liberté ne peut et ne doit se défendre que par la liberté; et c'est un contresens dangereux que devouloir y porter atteinte sous le prétexte spécieux de la protéger» (Bakounine, in : Guérin, L'Anarchisme, Idées, p..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- La liberté n'est pas celle de vouloir, mais de faire de P. RICœUR
- « Avoir des gloires communes dans le passé, une volonté commune dans le présent; avoir fait de grandes choses ensemble, vouloir en faire encore; voilà les conditions essentielles pour être un peuple. » (Renan.)
- Est-il fou de vouloir faire la guerre ?
- Il serait insensé de donner l'assaut, tête baissée, au monde technique : et ce serait faire preuve de vue courte que de vouloir condamner ce monde comme étant l'?
- Est-il sage de vouloir faire la révolution ?