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Pourquoi est-il si difficile de décrire un sentiment qu'un objet physique ?

Publié le 27/02/2008

Extrait du document

physique
— on ne peut que donner une idée en termes abstraits indiquant une fonction ou une propriété essentielle. Les sentiments, au contraire, grâce à la possibilité de l'expérience interne, peuvent être caractérisés en peu de mots qui donnent l'impression du réel et équivalent à une description fidèle. Il n'est donc pas vrai, si nous prenons les termes dans leur acception générale et non dan; leur acception particulière, qu'un sentiment soit plus difficile à décrire qu'un objet physique. Sans doute, l'homme de la rue sera plus embarrassé par la description de ta pitié ou de la tendresse que par celle d'un cheval ou d'une bicyclette. C'est que, habitué à regarder au dehors et à traiter avec ses semblables de choses matérielles, les objets du monde physique et les termes qui les désignent lui sont plus familiers. La difficulté tient au sujet plus qu'à l'objet. Mais c'est seulement pour déblayer le terrain que, interprétant la question posée dans un sens qui n'était pas évident, sinon à contresens, nous avons comparé. du point de vue de la difficulté de les décrire, les types généraux de sentiments et Tes types généraux d'objets physiques. La question, en effet, vise, non pas les types généraux, mais les réalités singulières, car on analyse les notions générales, on ne les décrit pas; la description n'a pour objet que des êtres ou des faits concrets et individuels. Nous devons donc reprendre la question et nous demander pourquoi, par exemple, un sentiment comme l'insatisfaction que me laissent les pages que je viens de rédiger est plus difficile à décrire qu'un objet matériel comme mon stylo ou ma montre.
physique

« pensées et ses projets.

On trouve en lui un écho de tout le passé, qui lui donne sa nuance et sa tonalitépropre.

C'est donc l'individu tout entier avec toute son histoire qui doit se retrouver dans la description du plussimple de ses sentiments.

On voit la difficulté de cette oeuvre.Mais une difficulté plus grande résulte de la mobilité du courant de la conscience.On pourrait nous dire, il est vrai, que le monde physique, lui aussi, est en mouvement et qu'il évolue, Mais cemouvement et cette évolution, c'est la science qui nous les a appris : nous n'en avons pas la perceptionimmédiate.

La plupart des objets physiques que nous avons à décrire sont au repos sous nos yeux etconservent durant des heures et des jours la même apparence.

S'ils se meuvent ou changent d'aspect, tel unchien qui court ou un paysage dont les couleurs s'estompent à la chute du jour, ce changement estordinairement progressif, contrôlable et prévisible.Dans la vie psychique, au contraire, et surtout dans la vie affective, nous ne constatons pas seulement uneévolution constante et une instabilité essentielle; les changements observés nous paraissent capricieux,provoqués par l'intervention de forces mystérieuses qui ont.

amené les psychologues à l'idée d'un psychismeinconscient.

Pour être complète et exacte, la description d'un sentiment devrait tenir compte de cet étathabituel de déséquilibre et de l'action de puissances obscures dont on n'a qu'un vague pressentiment : tâchedélicate, car on s'expose à donner à un simple nuage la consistance d'un rocher.Toutefois la plus grande difficulté de la description des sentiments provient de ce que l'auteur de cettedescription fait partie de l'objet qui décrit et par suite le déforme en le décrivant.Les épistémologistes qui font la philosophie de la connaissance scientifique, mettent eux aussi en reliefl'impossibilité, en physique atomique, de séparer l'observateur de l'objet observé : « introduire un observateur,c'est renoncer à la notion de « en soi » et à l'objectivité totale ».

Mais on peut bien dire qu'elle est totalementobjective, la connaissance que j'ai des nuages qui courent dans le ciel et de la flèche du clocher qui sedétache sur eux.

Si l'on s'en tient à l'échelle ordinaire, au macrocosmique, l'attention que je porte à un objetphysique pour le décrire ne le déforme pas.Il en est tout autrement des phénomènes humains que nous ne pouvons nous représenter qu'en les revivant etdans lesquels le regard que nous fixons sur eux introduit un élément perturbateur.

La vie affective estparticulièrement sensible à ces intrusions inquisitoriales.

Nous le savons par expérience, la prise de conscienced'une aube de sympathie peut, suivant le cas, nous faire sourire et étouffer ce germe ou, au contraire,accélérer son évolution vers une forme d'attachement plus profond.

On rit, quand on s'en aperçoit, du motiffutile d'un accès de mauvaise humeur, ou on s'en exaspère.

Comment, dans ces conditions, aboutir à unedescription fidèle du sentiment le plus simple ?Les psychologues,- il est vrai, nous proposent certaines industries susceptibles de nous assurer desobservations plus objectives.

Au lieu de fixer notre attention sur un sentiment actuel, nous disent-ils, regardezun sentiment éprouvé autrefois et dont la mémoire a conservé le souvenir, ou encore un sentiment du passéimmédiat que vous observerez à l'instant où il se dissipe.Ils nous conseillent, de plus, de sortir de nous-mêmes et d'observer la vie d'affective d'autrui.

Non pas, souspeine de retomber dans les difficultés essentielles à l'introspection, en faisant nôtres les sentiments qu'iléprouve pour étudier leur déroulement dans notre conscience, mais en elle-même.

Sans doute, nous nepouvons connaître la vie intime d'autrui que par l'intermédiaire des signes extérieurs qu'il en donne —comportement, mimique, paroles — mais le mouvement et l'interprétation peuvent être si rapides qu'ils nousdonnent l'impression d'une vue intuitive et d'une véritable communication des consciences.

C'est alors qu'unedescription s'approcherait le plus de- l'objectivité.Mais cette lecture dans l'âme des autres est un art des plus difficiles et qui suppose, avec une rare habitudede l'observation de soi-même, une intelligence rapide et un don de sympathie extraordinaire. CoNCLuSIoN. — En définitive, si un sentiment est si difficile à décrire, c'est parce que la vie affective tient à la structure même de notre être en sorte qu'il nous est impossible de l'observer de l'extérieur.

Au contraire, lesconnaissances que nous avons du monde matériel ne sont que des superstructures dont il nous est facile denous détacher.Mais précisément parce que les sentiments nous sont plus intimes, les descriptions maladroites qu'on en faitsont plus.

évocatrices pour nous que celles du physicien, si précises soient-elles.

Aussi pourrait-on, sansparadoxe, soutenir la primauté de la connaissance psychologique.. »

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