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Pourquoi Revenir Sur Le Passé ?

Publié le 15/01/2013

Extrait du document

Lorsque ma mémoire agit, l'objet de mon souvenir est nécessairement objet de ma conscience. Ainsi, de

même que la perception est une conscience du présent, le souvenir est une conscience du passé. Mais

l'objet du souvenir, à l'inverse de l'objet perçu, n'est réel que pour ma conscience. Or, pour qu'il

m'apparaisse pleinement, l'objet de mon souvenir devra me faire oublier le présent. En effet, il me sera

nécessaire de relâcher mon attention sur mes actions et préoccupations présentes, pour ne plus me

consacrer qu'au passé. Se souvenir, c'est s'éloigner du présent, c'est vivre dans l'illusion et rejeter la

réalité. Il ne faut donc pas accorder autant de place à ces souvenirs, et les empêcher de nous cacher le

présent. Car si lorsque je me souviens de la chaleur de ma couette j'en oublie que je suis en train de

mourir de froid, il devient urgent de replacer la mémoire au second plan, et de reprendre conscience de

mes sensations présentes.

De plus, le passé possède un poids dont il est important de prendre conscience. En effet, la mémoire

collective des peuples est marquée par les guerres successives, et il arrive que les nouvelles générations

mélangent passé et présent, ressentant une haine injustifiée envers un autre peuple, comme un héritage.

De même, la conscience individuelle porte le poids de son passé, car elle est prise dans les entraves des

expériences mal vécues. La persistance

« chacun de mes souvenirs. Mais ces différents emplois de la mémoire n'apparaissent que lorsque le rappel du souvenir est intentionnel, or la mémoire n'obéit que rarement à la volonté.

Le plus souvent, au contraire, il s'agit de réminiscences involontaires.

Pourquoi notre mémoire agit-elle ainsi, sans tenir compte de notre volonté propre? Notre capacité à nous souvenir résulte en fait d'une fixation dans notre subconscient des éléments que nous percevons.

Mais la majorité de ces fixations sont inconscientes et mécaniques, et s'opposent à une fixation intelligente qui résulte de la compréhension.

Ainsi, le but du publicitaire est de fixer dans le subconscient du consommateur des suggestions le poussant à acheter telle ou telle chose, de manière totalement inconsciente.

En effet, si elles ont plus faibles que les fixations intelligentes, car elles ne peuvent être ramenées à la conscience par la logique, comme ce serait le cas pour une leçon de physique par exemple, les fixations inconscientes n'en restent pas moins ancrées dans notre mémoire. Tout est là, en nous, et l'on n'oublie rien de ce que l'on a vécu.

L'hypnose montre effectivement qu'il est possible de suggestionner une personne pour qu'elle retrouver des souvenirs qui restent inconscients dans son état normal.

L'hypothèse de Bergson d'une "mémoire totale" renvoie donc bien à une réalité.

De fait, il est tout à fait normal que nous ayons des réminiscences d'événements que nous croyions avoir oubliés. Or, la majorité de nos souvenirs reviennent à notre conscience par rappels spontanés, sans être sollicités consciemment.

Cette résurgence non maîtrisée de la mémoire peut prendre plusieurs formes.

On parle tout d'abord d'associations d'idées lorsque notre esprit saute d'une chose à une autre selon une logique qui ne nous apparaît pas forcément.

Il apparaît ici que nous possédons en nous des souvenirs qui peuvent être convoqués par association avec un élément présent à notre conscience.

Nous disons alors qu'une pensée «me rappelle» quelque chose, une chose qui n'est en réalité rien d'autre qu'un souvenir, réapparu à notre conscience par hasard.

Nous pouvons également rencontrer des formes lancinantes de rappel.

Ces refrains de musique que l'on ne parvient pas à se sortir de la tête, ces formules qui reviennent constamment à nos lèvres apparaissent comme des pensées parasites, dont on voudrait se séparer.

Ce phénomène est appelé rétentivité, et crée un «bruit de fond» donc notre pensée.

Enfin, il nous arrive plus rarement de rencontrer une forme de rappel plus intense.

Lorsqu'une idée nous revient malgré nous et occupe le champ entier de la conscience, on parle de rappel obsessionnel.

Dans ce cas, tandis que la mémoire a normalement une activité de second plan, elle occupe soudain le premier plan de notre conscience.

Nous sommes alors assailli par un souvenir, et ne pouvons plus nous en détacher. Ainsi, la mémoire revient le plus souvent sans avoir été recherchée.

Les souvenirs ressurgissent brusquement, à l'occasion de l'apparition d'un détail dans notre perception.

Ces réminiscences, très fréquentes et remarquables, sont le fruit de notre mémoire affective.

C'est l'expérience que fait Proust dans La Recherche du temps perdu, goûtant la saveur particulière du souvenir que l'on croyait perdu et que l'on voit ressurgir.

Dans le cas des réminiscences affectives, c'est tout un pan de vie qui revient, avec ses sensations, ses émotions, qu'elles soient agréables ou à l'inverse traumatisantes.

Car la mémoire affective a d'autant plus de force que notre vigilance était sollicitée au moment de l'événement.

Or, si les moments très heureux amènent une vigilance correspondante, cette dernière devient véritablement extrême aux instants les plus graves de notre vie.

Nous disons alors qu'un souvenir nous «poursuit», car il est ancré en nous, et ressurgit fréquemment, par le biais des associations faites par la mémoire affective. Notre retour dans le passé n'est donc généralement ni souhaité, ni maîtrisé.

C'est notre incapacité à oublier qui est en cause, entraînant des rappels spontanés à la mémoire ; mais également notre vigilance, dont se nourrit notre mémoire affective.

Nos réminiscences ne sont donc pas contrôlées, or n'est-ce pas dangereux? Ne devrions-nous pas éviter au maximum. »

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