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Qu'est-ce qui rend une interprétation meilleure qu'une autre ?

Publié le 22/02/2012

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« différents éléments d'un rébus doivent être transposés en sons, et qu'on s'en tient à examiner ce qu'ilsreprésentent, on ne peut pas lui trouver de sens: il est absurde de trouver un canot sur le toit d'une maison, unelettre isolée, ou un homme sans tête en train de courir.Elle peut aussi être incomplète.

Imaginons que j'apprenne l'usage symbolique des fleurs au XVIIe siècle, et que jem'en contente: l'interprétation que je pourrai faire sera incomplète puisque je néglige la présence des insectes.

Jen'aurai mis en lumière qu'une partie de la signification latente de ce que le tableau donne à voir et à comprendre.

Ilen irait d'ailleurs de même à propos d'oeuvres plus récentes.

Si certaines compositions abstraites doivent êtreinterprétées pour livrer leur signification, encore convient-il que je tienne compte de tout ce qui les constitue:toutes les couleurs présentes (et pas seulement le rouge sous prétexte que j'y suis sensible), mais aussi toutes lesformes (et pas seulement le triangle sous prétexte que j'y vois un signe d'agressivité), et les rapports entre les uneset les autres, l'importance relative du blanc, la représentation des formes colorées sur la surface, le travail de latouche, l'épaisseur du matériau pictural, etc.

Ce n'est qu'en prenant en compte tous ces éléments et en re-constituant intellectuellement leurs articulations que j'ai quelque chance d'élaborer une interprétation valide.Peut-on interpréter le présent ? En effet, l'herméneutique ne concerne pas seulement textes et oeuvres du passé,elle peut aussi s'appliquer à du contemporain, on le sait au moins depuis Freud: pour être nécessaire, il suffit qu'unobjet nous apparaisse comme "étranger".

Gadamer affirme bien que toute tradition est devenue étrangère à sonsens originel, et c'est ce qui justifie nos efforts d'interprétation, mais l'étrangeté n'est pas seulement due àl'histoire: elle peut également provenir d'une actualité qui ne propose pas d'elle-même les clés de sa compréhension,qu'il s'agisse d'un comportement différent (l'ethnologue ne peut comprendre directement la société qu'il observe, lepsychiatre doit trouver un sens au délire de son malade), d'un texte trop vite qualifié d'"illisible" ou d'une peinture quiinaugure un style déroutant.

Enfin, même "meilleure", une interprétation n'est pas définitive.

Tout d'abord, l'interprétation rompt avec ledonné immédiat.

Le sens que produit l'existence quotidienne n'accède pas nécessairement à la conscience claire: leshommes se contentent d'un certain empirisme, ou le sens de leur conduite de se manifeste pas.

Lorsque ClaudeLévi-Strauss, pour rendre compte des relations de parenté empiriquement vécues par des sociétés "primitives", arecours à des formulations mathématiques assez complexes, il va de soi que ces formulations mathématiques assezcomplexes, il va de soi que ces formulations sont inconnues des sociétés étudiées.

C'est d'ailleurs pourquoi Lévi-Strauss affirme sur l'ethnologie telle qu'il la pratique fait émerger ce qui demeure étranger à la conscience que lessociétés peuvent avoir d'elles-mêmes et de leur propre vie.

Mais l'interprétation, si complexe soit-elle, est légitime,dès lors qu'elle permet la compréhension de tout le vécu tel qu'il a été observé, et qu'elle n'a pas besoin d'ajouter àce vécu d'éléments supplémentaires.

Le donné immédiat est remplacé par ce qui le structure, et devient ainsi plusintelligible.Mais l'intelligibilité est historiquement variable.

Dans la mesure ou l'herméneutique est devenue omniprésente dansles sciences humaines, elle s'effectue en fonction des questions qui sont possibles ou nécessaires à un momentdonné de l'évolution collective de la mentalité, y compris scientifique.

L'intelligibilité que l'on cherche aujourd'huidans la Bible n'est plus celle qu'y cherchait Spinoza.

Si toute interprétation suppose, par exemple, desconnaissances historiques permettant d'analyser correctement des données relatives à un texte ou à un documentancien, elle varie en fonction, non seulement des "progrès" de la connaissance historique, mais aussi desinterrogations que porte une époque sur son propre passé.

Cela signifie, par exemple, qu'il y a eu des interprétationsdifférentes du Moyen-Age aux XVIIIe, XIXe, XXe siècles, et l'interprétation qu'en donnera le XXIIe siècle seraencore autre.Aussi l'interprétation est-elle sans fin.

Quelle qu'en puisse être la qualité, et même si elle semble la meilleure decelles dont on dispose à un moment donné, il semble donc difficile d'admettre qu'une interprétation pourrait êtreaffirmée comme définitivement juste ou absolument vraie.

Ce qui importe est qu'elle apporte à son objet un éclairagecompatible avec sa constitution.

On peut ainsi lire dans le théâtre de Racine des significations qu'il ne pouvait yintroduire, qu'il s'agisse de certains aspect de la lutte des classes tels que les décèle Lucien Goldmann ou dedonnées psychanalytiques selon Rolant Barthes.

Même si de telles interprétations ont suscité des réactions hostiles,on peut admettre qu'elles sont "bonnes", dans la mesure ou elles respectent les textes.

Mieux: c'est cette pluralitéd'interprétations qui prouve l'actualité de Racine, c'est-à-dire le fait que son théâtre nous concerne encore.

Al'inverse, s'il n'était plus possible d'y découvrir des significations nouvelles (latentes jusqu'à l'interprétation qui lesfait surgir), ce théâtre serait mort , dans la mesure ou il ne serait plus productif, sinon de la répétition de sens déjàbien connus.. »

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