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Réussir est-ce être dans le vrai ?

Publié le 22/02/2012

Extrait du document

Le vrai désigne essentiellement ce qui réussit dans une communauté ouverte. À partir de quel critère choisir l'un ou l'autre plan ? Le plan dialectique paraît plus compréhensif plus global et unitaire, par sa volonté de réunifier dynamiquement les points de vue. • Quelle réponse apporter au problème soulevé par le sujet ? Dialogue et consensus intersubjectif permettent de définir le vrai.

« Si le vrai ne se définit qu'à travers le succès, ne sommes-nous pas conduits en des voies presque cyniques, àtravers une légitimation de tout « ce qui marche » ? Telle doctrine totalitaire sera-t-elle qualifiée de vraie si elle s'impose et se développe pendant des dizaines d'années ? Tel dirigeant économique sans grande vertu éthiqueexercera-t-il un pouvoir « vrai » ? En cette universelle permutation logique et axiologique, le vrai et le faux semblent disparaître : nous voici dans le chemin du « nihilisme », comme si le réalisme intégral conduisait à l'abandon de tout repère véritable. Dès lors, la vérité une et homogène, la rationalité globale ne sont-elles pas évacuées ? Si le vrai est ce qui réussit, nous nous trouvons rejetés vers de multiples vérités, naissant, connaissant la réussite, devenant de plus en plusévanescentes, etc.

Bref, le vrai est un, universel, objectif ou il n'est pas.

Si le vrai est ce qui réussit, la rationalitéhomogène et une nous devient étrangère. Enfin, beaucoup de critiques considèrent qu'il y a dans le pragmatisme une sorte de « commercialisme », qu'il réduit tous les problèmes à des normes de management et d'efficacité.

Dire que le vrai est l'efficace, c'est tout ramener aux intérêts des managers ! C'est bien ce qu'affirmait le grand philosophe anglais, B.

Russell, très hostile à cette conception : « Les deux qualités que je considère suprêmement importantes sont l'amour de la vérité et l'amour du prochain.

Je trouve que l'amour de la vérité est en Amérique flétri par l'esprit de commerce, dont le pragmatisme est l'expression philosophique ; et que la moralité puritaine a mis dans les fers l'amour du prochain. » (in La Pensée américaine contemporaine, p.

55, PUF) Dès lors, le vrai n'est pas ce qui réussit, mais ce qui parvient jusqu'à l'universel et l'objectif.

Il faut privilégier l'objectivité et l'universalité.

Ces caractères, nous les voyons mis en évidence à propos du vrai depuis les Grecs et, en particulier, depuis Platon.

Qu'est-ce que le vrai, dans la dialectique platonicienne ? L'intelligible, l'universel, ce qui dépasse l'opinion, le jugement particulier, la croyance.

Le monde des Idées, seul vraiment réel, correspond à autantde vérités immuables, éternelles.

Dans toute la tradition occidentale, on trouve à l'oeuvre une conception identique.Qu'est-ce que le vrai chez Kant ? L'Universel de la raison...

Nous sommes ici bien loin de la réussite, de l'utilité, del'expérience.

Le vrai, c'est ce qui est nécessaire et universel, soumis au sceau d'une raison législatrice.

La nécessité et l'universalité rigoureuse sont les marques certaines d'une connaissance a priori, universelle et vraie.

Le vrai, dans cette perspective, représente le réel structuré par la raison et ses catégories, l'universel émanant de notre facultéa priori.

Loin d'être le fruit de l'expé rience changeante, il désigne celui de la raison objective.

Sans universalité, nulle vérité, nulle rationalité.

Toute catégorie est, par définition, universelle.

Nous voici bien loin du « succès » et de la « réussite » de la conception pragmatiste. Si l'opposition entre la thèse et l'antithèse semble irréductible, n'est-il pas nécessaire de tenter d'opérer une réunification ? Et ce d'autant plus que la définition du vrai par l'utile se donne comme riche et dynamique, comme ouverte et non dogmatique. Cl) Synthèse : l'accord intersubjectif peut unifier l'utile et l'élément d'universalité. À bien creuser la définition contemporaine du vrai par la nécessité et le succès, nous arrivons effectivement,semble-t-il, à échapper aux apories précédentes, à unifier thèse et antithèse.

Le pragmatisme y renaît, dans son dynamisme et son élan progressif, dans sa recherche concrète. Le vrai, c'est ce qui naît dans une tension et un effort, et apporte ainsi une solution.

Ce qui est bon à croire, utile,efficace, désigne bel et bien ce qui est réel (et réciproquement).

Quand un physicien trouve une bonne et justeidée, il met fin à un champ de tensions et il « réussit ».

Néanmoins, nous ne pouvons conserver ni le cynisme » d'un pragmatisme mal compris, ni l'oubli de dimensions objectives, voire même universelles.

Il faut que le vrai dépasse une simple sphère particulière, qu'il s'ouvre dans un champ social global. Ne peut-on, dès lors, dire que le vrai est ce qui réussit et s'affirme à l'intérieur du dialogue de la communauté, aboutissant ainsi à un consensus intersubjectif ? Levrai désigne alors l'utile d'un groupe ou d'une humanité qui conviennent d'une solidarité, qui s'entendent, qui semettent d'accord sur des buts et des résultats utiles.

Dans cette perspective, ce qui réussit perd sa formeparticulière.

Par exemple, si le nazisme avait « réussi », il n'aurait jamais été vrai parce qu'il ne relevait pas d'un consensus.

La solidarité avec la communauté forme Ici une synthèse de l'utile et de l'universel.

Ainsi, si la science est vraie, c'est parce qu'elle réussit comme modèle de la solidarité humaine : elle est l'oeuvre de tous, coopérant théoriquement et pratiquement dans un projet les rassemblant. « Les pragmatistes voient dans le but de la recherche (dans quelque sphère de la culture que ce soit) la possibilitéde parvenir à une combinaison opportune, faite d'accord sans contrainte et de désaccord tolérant, où ce qui est tenu pour opportun est déterminé à coups d'essais etd'erreurs.

(Richard Rorty, Science et solidarité, p.

58, Éd.

de l'Éclat) Ainsi, le vrai est bien ce qui réussit dans une communauté d'hommes de bonne volonté animés par le désird'un consensus intersubjectif pouvant mener (parfois) à l'universalité.

En prenant au sérieux la communauté des hommes, mais aussi sa communauté, le pragmatiste contemporain élabore une très bonne conception du vrai, conçu comme réussite à travers la médiation du dialogue intersubjectif.

Lepragmatisme est une philosophie de la solidarité, qui réconcilie l'efficace avec ce qui est valable pour lacommunauté humaine.

Nous pouvons donc légitimement affirmer que le vrai est ce qui est utile et réussit.. »

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