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Savoir est-ce ne croire à rien ?

Publié le 04/11/2009

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Incipit : Depuis au moins le Théétète de  Platon, et avant lui le Poème de Parménide, la relation du savoir au croire est une constante dans l’histoire de la réflexion philosophique. Et ceci s’explique pour deux raisons au moins : d’une part, il s’agit d’obtenir une définition de ce qu’est le savoir, ou de ce que c’est que savoir, et cette définition doit en permettre l’identification distinctive (éviter toute confusion avec ce qui n’est pas savoir), et d’autre part, mais c’est un corollaire de la première raison, il s’agit précisément de déterminer les limites du savoir, autrement dit de la connaissance (un adage classique d’origine delphique incite à ne rien vouloir de trop, c’est-à-dire à ne pas pécher par démesure et présomption, serait-ce dans le domaine de la connaissance).

 

Thèmes : Le thème de la limitation de la connaissance connaît sa formulation la plus fameuse dans l’injonction kantienne à limiter le savoir pour faire place à la croyance  (Critique de la raison pure (1783)). Et d’une certaine manière, l’énoncé que nous avons à traiter reprend, non pas certes la question de la nécessaire limitation des prétentions du savoir, mais plutôt celle de la relation intime de ce dernier avec la croyance. Deux notions structurent en conséquence notre analyse thématique : (i) savoir : le verbe signifie ici une activité de connaissance, comme cela va de soi. Mais ce qu’il importe de souligner est qu’une telle activité peut se concevoir selon deux modalités distinctes : le savoir au sens de la connaissance intellectuelle, voire de la possession d’une science (savoir universel et nécessaire fondant une certitude) ; le savoir au sens pratique du savoir-faire ; (ii) croire : de même, la notion de croyance peut se définir selon deux acceptions distinctes : la croyance sur la base d’une autorité (telle est certainement le fondement de la foi comme reposant sur un corpus défini de textes dits sacrés, mais également de ce qui proprement s’appelle le credo), et d’autre part la croyance fondée sur le témoignage, et l’acte de confiance en ce dernier. Il est à noter que la distinction entre ces deux acceptions distinctes de la notion de croyance reposent sur la détermination de leur origine (dont le légitimité et la fiabilité est gage de la légitimité de l’acte de croire), tandis que la distinction des deux sens de la notion de savoir tient quant à lui à une différence domaines de la réalité (la pratique et l’intellect).

« II.

Savoir pratique et croyance pragmatique Nous n'avons jusqu'ici considéré qu'une définition forte de la notion de connaissance comme modèle hypothético-déductif.

En élargissant son champ d'intervention dans le réel (il était, dans le point (I), restreint au formalismeabstrait des fondations logiques de la connaissance), sa confrontation au croire sera plus incisive, et peut-être irajusqu'à établir un rapport de perméabilité, ou de continuité.

Dans le domaine de la pratique, le savoir égalementintervient.

Il se manifeste alors sur le mode de compétences techniques par l'application de règles apprises, ouencore, et c'est plus intéressant pour le cas qui nous occupe, sur le mode de compétences pragmatiques reposantsur des règles constitutives qui ne sont pas l'objet d'apprentissage théorique (dont il serait la bonne applicationpratique).

Nombreux sont les savoirs qui ainsi structurent notre mobilité dans l'ordre quotidien : savoir nager, savoirmanger, savoir que l'avion que je prends a peu de chance de s'écraser.

Bien que ces différents savoirs ne soient pasdu même ordre, et que tous supposent un apprentissage, ce dernier n'est pas strictement théorique : il n'y a pas demanuel pour apprendre à nager (à moins de se lancer dans la compétition et d'en faire alors un art, c'est-à-dire unetechnique théorisée), ni pour savoir se toaster du pain ou se réconforter des chances de succès d'un voyage enavion (ce dernier car est intéressant, ainsi que l'a montré le physicien Feynman, car la possibilité même de volerrepose sur des compétences aéronautiques sophistiquées, et dont pourtant il importe peu de se soucier lorsque l'onutilise tel moyen de locomotion).

Cependant, on n'hésitera certainement pas à qualifier de savoirs ce type deconnaissance – le fait est que la langue elle-même en porte la marque (à ce propos, la variation des expressionslinguistiques de ce types de compétences est intéressant (allemand : kennen / wissen ; anglais : can / know ; etc.)).

Mais arrêtons là nos exemples pour nous focaliser sur la conclusion : ce que cela doit nous apprendre, estque nombre de compétences pragmatiques de l'ordre de la pratique quotidienne et que nous qualifions sans autre de“ savoirs ” repose sur un type particulier de croyance structuré à la fois par le témoignage et l'autorité : je sais quel'avion ne va pas s'écraser car je crois en l'autorité des physiciens et des ingénieurs qui ont conçu la possibilité pourl'avion de voler, etc.

Mais il y a là plus radical encore.

Non seulement le témoignage et l'autorité interviennent dansbon nombre de nos connaissances pratiques, mais elles ont également place dans nos connaissances théoriques(pensez aux connaissances historiques, ou géographique : je sais que les pôles fondent sans y être allé, etc.).

Detelles conséquences d'une conception élargie de la notion de croyance ont toutes été développées dans le cadre depragmatisme américain contemporain (James, Dewey, Rorty), pour lequel, d'une certaine manière, croire a toutautant vocation à l'utilité pratique que savoir.

Et il y a ici une relation de perméabilité réciproque du savoir au croiredans l'ordre pratique, ce qui déjà faisait dire à Augustin ( de Utilitate credendi ) que la croyance se trouve justifiée dans son utilité pratique sur le simple fait qu'il y a des choses dont douter pour espérer les fonder en raison nesaurait conduire qu'au scepticisme le plus radical.

Ici, pour savoir, non seulement il faut faire place à la croyance,mais plus encore croire en est la condition.

* Conclusions - La relation du savoir au croire dépend avant tout de la définition du savoir.

Deux types de relations sont alors envisageables selon que le savoir est entendu comme théorique pur ou alors comme compétencepragmatique.

A noter que les deux types de savoirs ne sont pas eux-mêmes exclusifs entre eux. - Une croyance plus radicale est au fondement de la possibilité du savoir, et peut-être dans les deux acceptions de ce dernier (intellectuel et pratique).

Il s'agit simplement de la croyance en la réalité du mondeextérieur.

Pour connaître les choses, il faut d'abord croire à leur existence, serait-elle abstraite et uniquementrationnelle.

En douter conduit d'abord au scepticisme pyrrhonien (qui doute de tout, et même du fait de douter),puis au solipsisme absolu, fruit de l'hypothèse cartésienne du rêve généralisé.

La réalité de l'existence deschoses à connaître est peut-être impossible à prouver, mais uniquement susceptible d'adhésion par un acte decroyance.

Moore, pourtant, proposa une preuve logique de l'existence du monde extérieur monde au sujet qui lepense, mais celle-ci apparaît d'une trivialité sans grande conséquence philosophique, pour ne pas direaffligeante.. »

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