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Sören KIERKEGAARD (1813-1855): Socrate

Publié le 27/03/2005

Extrait du document

kierkegaard
Le défaut de la définition socratique est de laisser dans le vague le sens plus précis de cette ignorance, son origine, etc. En d'autres termes, même si le péché est ignorance, ce qui en un certain sens est indéniable, y peut-on voir une ignorance originelle: c'est-à-dire l'état de quelqu'un qui n'a rien su et jusqu'ici rien pu savoir de la vérité? ou est-ce une ignorance acquise ultérieurement? Si oui, il faut bien que le péché plonge alors ses racines ailleurs qu'en l'ignorance et ce doit être dans cette activité au fond de nous par laquelle nous travaillons à obscurcir notre connaissance. Mais, même en l'admettant, ce défaut de la définition socratique, tenace et résistant, reparaît, car on peut se demander alors si l'homme, sur le point d'obscurcir sa connaissance, en avait pleine conscience. Sinon, c'est que sa connaissance est déjà quelque peu obscurcie, avant même qu'il ait commencé; et la question se pose derechef: Si, par contre, sur le point d'obscurcir sa connaissance, il en était conscient, alors le péché (quoique toujours ignorance en tant que résultat) n'est pas dans la connaissance, mais dans la volonté et la question inévitable alors se pose de leurs rapports entre elles. Ces rapports-là (et l'on pourrait ici continuer à questionner pendant des jours), la définition de Socrate au fond n'y entre pas. Sören KIERKEGAARD (1813-1855)

DIRECTIONS DE RECHERCHE

 • En quel sens le péché est ignorance selon Kierkegaard ?  • Qu'est-ce que Kierkegaard veut faire apparaître ?  • Comment s'y prend-il ?  — Par quel type de raisonnement ?  • Est-ce que Kierkegaard apporte une solution au problème qu'il s'efforce de mettre à jour et de poser dans ce texte ?  • Quel est l'enjeu de ce texte ?  • En quoi présente-t-il un intérêt proprement philosophique ?

kierkegaard

« nécessairement à considérer les actes et pensées humaines comme actes de volonté libre, c'est-à-dire à imaginerl'homme comme un être volontairement voué à l'échec.

La difficulté d'une telle position engendre pour l'auteur lanécessité d'un dernier problème : les rapports de la connaissance et de la volonté, c'est-à-dire; la nécessité deposer les questions : « Est-ce que je sais pourquoi je veux? » ou bien : « Est-ce que je veux parce que je sais ? »,et ceci sans réponse sûre.

La dernière phrase du texte est extrêmement significative : la définition de Socrate,c'est-à-dire la position qui consiste à considérer l'homme comme une volonté autonome, ne peut pas répondre à cesquestions.Ce texte a un intérêt dans la mesure où il soulève réellement un problème fondamental : celui de la responsabilité etde la volonté autonome.

En effet, la définition de l'immoralisme comme découlant de l'ignorance de la Vérité reposesur un énorme présupposé philosophique : l'existence d'un individu, d'un sujet libre et autonome, possédant unepersonnalité intègre, c'est-à-dire en fait sur le présupposé : la psychologie, c'est la conscience.Ce présupposé implique l'existence pour l'homme d'une responsabilité totale : je prendrai pour le montrer l'exemple deDescartes.

Pour lui, la Nature nous a donné la raison, d'une façon égalitaire (« Le bon sens est la chose du monde lamieux partagée ») et si nous faisons des erreurs, c'est parce que nous ne savons pas conduire bien notre raison; etsi nous ne savons pas la conduire, c'est parce que nous n'avons pas de méthode.

Descartes existe donc en tantque volonté libre et consciente.

Et dans ce texte, l'auteur se heurte au problème de l'immoralisme, problème auquella tradition classique ne peut pas répondre parce qu'elle ne considère pas l'individu comme une structure, c'est-à-dire qu'elle ne le considère pas comme un être pouvant être en proie à des exigences contraires.Or, en introduisant la notion de structure, c'est-à-dire en introduisant l'idée d'un individu obéissant à des exigencescontradictoires qu'il a intériorisées au cours de sa vie, il est possible de concevoir ce problème de l'immoralisme.Freud, en se livrant à une étude scientifique de la psychologie, a découvert l'existence d'une personnalité structurée: l'enfant vient au monde en proie aux pulsions fondamentales et c'est le monde extérieur qui, par la répression deses désirs, forme sa conscience.

Pour compenser l'insatisfaction de ces désirs passés au stade inconscient, l'hommeva donc chercher à travers l'idéologie, la puissance de sa raison, une satisfaction (différée) d'accomplir un acteméritoire.

Et seul ce déchirement perpétuel de l'individu peut rendre compte de l'imperfection de sa conduite.Lorsque Socrate dit : « Pécher, c'est ignorer », c'est une façon d'incomber au conscient ce qui relève del'inconscient (ce qui peut résulter d'un processus de sécurisation contre l'immoralisme éventuel).

LorsqueKierkegaard pose le problème de l'origine de l'ignorance du Vrai, c'est un effet du refus des autres, un effet du refusde ce « il » qui se pense en moi.

Et lorsqu'il pose ces questions : Est-ce que je sais pourquoi je veux? et Est-ce queje veux parce que je sais ?, c'est une prémonition de l'impossibilité de se considérer comme une volonté libre.

Et s'ila enfin conduit une étude aussi précise qui ne débouche sur aucune réponse certaine, c'est qu'il a bien ressentitoute l'ambiguïté des termes « savoir » et « ignorer ». Ce texte se présente en fait comme une charnière entre la position classique et le discours scientifique.

En effet, ilrelève de la position classique dans la mesure où il s'efforce à tout moment de considérer l'homme comme un sujetintègre, mais il présente aussi plusieurs analogies avec le discours scientifique contemporain.

Tout d'abord, d'unpoint de vue méthodologique, il n'affirme rien, il ne fait que poser des questions, et se termine sur une négation il neboucle pas de système, au contraire.

Mais de plus et surtout, il a conscience que cette position classique l'amène àtransporter l'ordre de la Nature dans l'ordre de la Culture, c'est-à-dire de faire d'un discours idéologique un discoursmystifié et universel.

Et c'est pourquoi il se contente toujours de poser des hypothèses, de soulever des questionsqui témoignent bien de l'inquiétude fondamentale qu'il porte sur le jugement humain. KIERKEGAARD (Soeren-Aabye).

Né et mort à Copenhague (1813-1855).Sa vie fut très calme.

De faible santé, il fit des études de théologie à l'Université de sa ville natale, et passa sathèse de doctorat en 1841.

Mais il renonça à devenir pasteur.

Après quelque temps d'une vie de dissipation, survintun événement familial, sans doute le 19 mai 1838, que Kierkegaard appela « un tremblement de terre », sur lequelaucun éclaircissement n'a été donné, et qui « obligea à une nouvelle et infaillible interprétation de tous lesphénomènes ».

Kierkegaard revient à la foi, se fiance à Régine Olsen, puis rompt ses fiançailles un an après.

« Celuiqui combat pour l'existence suprême doit se priver des joies suprêmes de l'existence.

» D'octobre 1841 à mai 1842, ilfait un séjour à Berlin, où il retournera, pour peu de temps chaque fois, en 1843, 1845 et 1846.

En 1848, il entra enlutte contre l'Église danoise, et particulièrement contre l'évêque Mynster.

Il mourut à l'hôpital.

Kierkegaard, dontSocrate et le Christ furent les deux maîtres à penser, pose, d'une part, que la vérité est dans la révélation duChrist, et, d'autre part, que « la subjectivité est la vérité».

Il se dresse contre Hegel, fait le procès del'intellectualisme, nie que l'homme soit la mesure de toutes choses et entre en lutte irréductible contre l'Église.

Lavérité chrétienne est devenue prisonnière de la chrétienté.

Être chrétien, c'est être martyr.

« Qu'est-ce que lechrétien? C'est, du commencement à la fin, un scandale, le scandale du divin.

» La seule histoire véritable, c'estl'histoire sainte ; il faut redevenir le contemporain du Christ, effacer l'oeuvre des siècles qui se sont interposés.Kierkegaard nie la toute-puissance de la conscience réflexive.

Ce qu'il faut éclairer, élucider, c'est la situation del'homme dans le inonde.

Comme l'a dit un spécialiste de la philosophie kierkegaardienne, « la conscience n'est pas le. »

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