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Spinoza, Traité théologico-politique, VII

Publié le 02/11/2012

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Spinoza, Traité théologico-politique, VII : "Si chacun avait la liberté d'interpréter à sa guise les lois de l'Etat, la société ne pourrait subsister, elle tomberait aussitôt en dissolution, le droit public devenant droit privé. Il en va tout autrement dans la religion. Puisqu'elle consiste non dans des actions extérieures, mais dans la simplicité et la candeur de l'âme, elle n'est soumise à aucun canon, à aucune autorité publique et nul absolument ne peut être contraint par la force ou par les lois à posséder la béatitude : ce qui est requis pour cela est un enseignement pieux et fraternel, une bonne éducation et par-dessus tout un jugement propre et libre. Puisque donc un droit souverain de penser librement, même en matière de religion, appartient à chacun, et qu'on ne peut concevoir que qui que ce soit en soit déchu, chacun aura aussi un droit souverain et une souveraine autorité pour juger de la religion et pour se l'expliquer à lui-même et pour l'interpréter. La seule raison pour laquelle en effet les magistrats ont une souveraine autorité pour interpréter les lois et un souverain pouvoir de juger des choses d'ordre public, c'est qu'il s'agit d'ordre public; pour la même raison donc une souveraine autorité pour expliquer la religion et pour en juger appartient à chacun, je veux dire, parce qu'elle est de droit privé." Introduction: Dans ce texte l'auteur étudie le problème suivant : l'individu doit-il être laissé libre d'interpréter la religion? Ou bien revient-il à l'Etat d'en définir le contenu par la loi? Une religion est un ensemble de croyances et de rites qui unit un groupe d'homme dans une foi commune. Le noyau de la foi religieuse est qu'il existe un être suprême auteur de ce qui est. En ce qui concerne les monothéismes, la foi religieuse se fonde sur un texte -la Bible, le Coran- considéré comme sacré puisqu'il est censé exprimer la parole même de Dieu. Dès lors, ne serait-il pas sacrilège de laisser les hommes libres de décider du sens et de l'importance des choses religieuses? Cela ne mérite-t-il pas d'être fermement condamné par la loi et par l'Etat? Si tel n'est pas le cas, de quelles raisons peut-on s'autoriser pour accorder et justifier une liberté totale, "même en matière de religion"? Première partie: La position de l'auteur est annonc&eac...
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« L'État, par le pouvoir de contrainte dont il dispose (le pouvoir de coercition), est le garant du maintient de cet ordre.

Dès lors si chacun donnait le sens qu'il souhaite aux dispositions légales, qu'il jugeait comme il l'entend de leur caractère obligatoire, toute loi disparaîtrait.

On sait les conséquences de cet état d'anomie : la société "tomberait aussitôt en dissolution", "le droit public devenant droit privé".

Dans une telle situation en effet, l'individu devient la seule source du droit et de la loi, la seule source de l'autorité : il n'y a donc plus de "droit public", c'est-à-dire d'autorité commune pour réglementer les relations entre les individus dans l'espace public; il n'existe plus qu'un "droit privé", c'est-à-dire l'arbitraire de la compréhension et de la volonté des différents individus.

On comprend que la société, se désagrège, s'anéantisse. Mais pourquoi le cas de la religion est-il tout autre? N'est-elle pas elle aussi un des ferment de l'ordre social? L'État n'a-t-il pas pour devoir de veiller au respect de la religion et à l'orthodoxie des opinions religieuses? En aucun cas pour l'auteur! Rien n'est plus contraire à la religion que l'idée de la régenter par des lois.

Car aussi bien par essence ("consiste") qu'au vue de sa finalité ("posséder la béatitude") la religion ne peut pas être placée sous l'autorité d'une loi qui imposerait aux individus une conception de la croyance et du rite : qui leur imposerait ce qu'ils doivent croire et aussi de croire.

Car la religion, rappelle l'auteur, "consiste non dans des actions extérieures", à savoir dans des attitudes ou des comportements sur lesquelles la surveillance de l'État pourraient s'exercer; mais dans des dispositions interne de l'âme : sa "simplicité" et sa "candeur", c'est-à-dire la pureté et la sincérité de sa foi, sur lesquelles la loi n'a aucune pouvoir.

C'est pourquoi la religion ne peut être "soumise à aucun canon" c'est-à-dire à aucun modèle doctrinal ou norme absolue : la piété du fidèle ne dépend pas de l'obéissance à une doctrine faisant autorité pour tous; ni à "aucune autorité publique" à savoir la loi, l'État ou un de ses représentants.

Quelle loi en effet pourrait imposer au fidèle d'être sincère? Ou d'accomplir avec sérieux et engagement un rite, en particulier s'il est imposé? L'autorité publique n'a pas le pouvoir de sonder les cœurs et les reins, ni de les commander.

Elle ne peut s'exercer que sur "les actions extérieures" c'est-à-dire sur les comportements (on peut penser à la façon d'accomplir ou de négliger les devoirs imposés aux fidèles) en quoi justement la religion ne consiste pas! D'autre part si la religion a pour finalité de conduire les hommes à "la béatitude", il est absurde de vouloir l'imposer "par la force ou par les lois".

La béatitude est l'état de contentement et de sérénité que connaît celui qui adopte une conduite vertueuse.

Comment pourrait-on forcer quelqu'un à être dans cet état? C'est absolument impossible, absurde même; ce serait comme exiger que quelqu'un soit heureux.

La piété, si on entend par là un attachement sincère aux valeurs de la religion, ne peut avoir sa source que dans une disposition interne de l'âme du croyant; il est donc exclut qu'elle soit le fruit de la contrainte physique ou intellectuelle.

Elle ne peut résulter que d'un "enseignement pieux et fraternel, une bonne éducation et par-dessus tout un jugement propre et libre" : ainsi donc la condition essentielle de l'acquisition. »

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