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Suis-je conscient de ce que je suis ?

Publié le 27/02/2005

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II. L'altérité constitutive du « moi » Descartes ne se contente pas d'exprimer la vérité de l'existence de chacun de nous. La capacité de douter, proprement et spécifiquement humaine, montre ce que l'humain est essentiellement. Nous sommes des « res cogitans », des « choses pensantes », nous dit Descartes. Mais cette nature essentielle de tout sujet humain porte en elle, conceptuellement, une difficulté. Il sera en effet reproché à Descartes et Husserl (qui reprend la thèse cartésienne du cogito) de concevoir en même temps que l'identité du sujet, sa nature essentiellement seule. En effet, si nous sommes tous des sujets pensants et connaissants, la relation à l'autre s'effondre. Le monde extérieur comme les autres seront, en quelque sorte, les simples objets de mon expérience personnelle de l'existence. La thèse cartésienne confine au « solipsisme », c'est-à-dire à la pensée que le sujet pensant existerait seul, réduisant autrui au simple rôle de moyen ou d'objet du connaître. Reconnaissons que cette idée est abusive car même Robinson Crusoé à besoin de Vendredi pour ne pas sombrer dans la folie.

L'ego, le moi, le sujet, l'individu... autant de termes et bien d'autres encore qui viennent caractériser la découverte de son identité singulière. Toutefois cette liste pléthorique n'est-elle pas la manifestation d'une difficulté fondamentalement humaine ? La détermination précise et de manière univoque de la nature même de cet être que je suis. L'acte de naissance de la philosophie, la pensée socratique, s'accompagne de cette prescription faite à chacun de nous : « Connais-toi toi-même « («  Gnôthi séauton «). Cet impératif, formulé canoniquement par le père de la philosophie, donne à saisir la teneur de cette difficulté primordiale à laquelle tout individu est confronté : si je suis sûr, d'une évidence immédiate, que je suis réellement, cette conscience instinctive n'est pas pour autant synonyme d'une connaissance claire de qui je suis. C'est alors à une véritable découverte de soi que Socrate engage chacun d'entre nous. Cette découverte de son identité propre passera alors par une prise de conscience.

La question sera alors de savoir si, et dans quelle mesure, une connaissance de son existence, de ses états, de ses actions et de son rapport au monde extérieur, est possible.

  • Cette évidence du sentiment de soi-même est-elle fondatrice d'une connaissance véritable de soi ?

  • Ce fondement n'est-il pas lui-même dépendant d'une autre expérience, plus fondamentale encore ?

  • Jusqu'à quel degré cette conscience de soi peut-elle aller ?

« historique), le statut de constitution même de chaque conscience dans son surgissement même.

Autrui est définipar l' Allemand comme « désir de désir », c'est-à-dire désir de reconnaissance par l'autre.

Cette relation est« dialectique » et conflictuelle pense Hegel (processus de séparation et de reconnaissance mutuelle des identitésconfrontées).

C'est une « lutte à mort » à laquelle se livrent les consciences qui cherchent à s'affirmer comme« Maître » et ou certaines finissent par devenir « esclave » de son autre.

La dialectique du « Maître et del'esclave » est le symbole hégélien de la manière dont les consciences individuelles cherchent à s'affirmer ens'affrontant (Cf.

La Phénoménologie de l'Esprit ).

Si la relation à autrui est comprise, ici, dans sa négativité essentielle, elle est dialectique et s'achemine donc vers une positivité advenue : la reconnaissance mutuelle desconsciences dévoile une essence purement spirituelle du monde.

Les hommes sont en fait les sujets permettant àl'Esprit de prendre progressivement conscience de lui-même.

Le problème est alors la perte de liberté inhérente àcette prise de conscience : je ne suis finalement, comme autrui, que le jouet servant les intérêts de l'Esprit memanipulant. Si la conscience de soi est reconnue philosophiquement comme propre de l'humain et conditionnée par la présenced'un « autre que moi » (miroir réfléchissant l'identité de mon moi), encore faut-il déterminer jusqu'à quel point laconnaissance de soi peut aller. III.

Inconscience et finitude Hegel parle de « conscience malheureuse », c'est-à-dire de la douleur de laconscience, dans sa découverte d'elle-même comme particule figurative del'Esprit, lorsqu'elle vit le déchirement entre l'intériorité et l'extériorité. Mais le rôle majeur attribué à la conscience (notamment par Brentano etHusserl, l'élève du premier) va être sérieusement ébranlé dans ses prétentionsd'une saisie intégrale de soi et de la réalité totale.

les thèses freudiennesvont en effet affirmer l'existence d'une instance effective, « dynamique »,échappant par nature à la conscience : l'inconscient.

l'idée majeure est que lepsychisme va « refouler » (évacuer vers un oubli) certaines représentationsgênantes ou traumatisantes dans une sphère située en deçà de laconscience.

Cette thèse vient corroborer les phénomènes du rêve, du lapsus,de l'acte manqué.

ces phénomènes étayent l'idée que le sujet n'est paspleinement conscient de lui-même, de ses intentions et de ses actes. Mais en même temps, les études freudiennes continuées ensuite par Lacan, sielles affirment la vérité d'une instance psychique inconsciente et pourtantactive (manifestation de symptômes), ont permis paradoxalement à la penséehumaine de prendre acte de cette partie obscure d'elle-même.

Si lapsychanalyse, des mots même de Popper, ne peut accéder au statut descience, elle est néanmoins une étape supplémentaire dans la saisieprogressive de l'humanité de sa nature véritable.

Une meilleure connaissance de soi est alors rendue possible. Les thèses existentialistes en sont une autre étape, et ont cherché à transmettre les spécificités même del'existence humaine.

La conscience sera reconnue comme le moteur même de l'existence humaine mais Kierkegaardaffirmera, au-delà, la nature essentiellement « finie » (fautive, imparfaite et mortelle) de l'homme.

Heideggerviendra, à sa suite, caractériser cette « finitude » dans son orientation radicale.

Il nous rappelle que nous sommesdes « projets-jetés » (nous sommes au monde sans repères et nous devons exister, sortir de nous mêmes) et des« êtres pour la mort » (« Sein zum Tode »).

Seule une prise de conscience de cette radicalité de notre condition d'hommes peut nous permettre de vivre lucidement et « authentiquement », pense Heidegger (Cf.

Être et Temps ). Conclusion Si je peux prétendre à une connaissance de ce que je suis c'est en vertu de l'évidence fondatrice formulée parDescartes ; « Je pense donc je suis ». Mais le contenu même de cette « conscience » ( cum scire en latin signifie « connaître avec »), ce que je suis vraiment, n'est mesurable qu'à partir de la « comprésence » irréductible et irrécusable d'autrui.

La différenceserait le moteur même de la prise de conscience de l'identité. Mais cette conscience de ce que je suis trouve ses limites dans la manifestation d'un inconscient et dans lalucide compréhension de l'essence finie et mortelle de l'humanité à laquelle je participe.

N'y voyons pas,toutefois, un fatalisme, mais plutôt la désignation des possibilités réelles qui sont les miennes pour vivre envérité, authentiquement.. »

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