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Toutes les inégalités sont-elles des injustices?

Publié le 06/07/2005

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Répondant aux questions de ses interlocuteurs, Socrate développe une image de la cité idéale. Socrate n'est-il que le porte-parole de Platon, un simple personnage dont le philosophe se sert pour exprimer ses propres idées tout en restant masqué ? A l'inverse, Platon n'est-il rien d'autre que le fidèle secrétaire du maître dont il se contente de noter scrupuleusement la pensée ? Et dans ce jeu mobile et contradictoire où s'enchaînent et s'entraînent questions et réponses sans que l'ironie soit jamais totalement absente, est-il seulement légitime de dégager une doctrine ? Derrière la fausse simplicité d'une conversation entre philosophes, l'art du dialogue soulève d'insurmontables difficultés qu'il nous faudra ici ignorer pour tenter de cerner l'image du politique qui se dégage de la « République «. Dans cet ouvrage, Socrate présente donc l'idée qu'il se fait de la cité idéale. Il décrit une société fortement hiérarchisée au sein de laquelle les « gardiens « forment une classe dans laquelle règne une communauté parfaite. Au livre V, Glaucon, qui est l'un de ses principaux interlocuteurs, demande à Socrate si une cité aussi parfaite que celle qu'il a décrite peut exister dans la réalité. Avec beaucoup de prudence, car il sait ce que sa réponse peut avoir de ridicule et de scandaleux, Socrate répond qu'une seule réforme est nécessaire à qui veut changer radicalement la société: il suffit que se conjuguent le pouvoir politique et la philosophie. Socrate déclare : « Tant que les philosophes ne seront pas rois dans les cités, ou que ceux qu'on appelle aujourd'hui rois et souverains ne seront pas vraiment et sérieusement philosophes ; tant que la puissance politique et la philosophie ne se rencontreront pas dans le même sujet ; tant que les nombreuses natures qui poursuivent actuellement l'un ou l'autre de ces buts de façon exclusive ne seront pas mises dans l'impossibilité d'agir ainsi, il n'y aura de cesse, mon cher Glaucon, aux maux des cités, ni, ce me semble, à ceux du genre humain, et jamais la cité que nous avons décrite tantôt ne sera réalisée, autant qu'elle peut l'être, et ne verra la lumière du jour.
Les inégalités économiques et sociales ne sont pas forcément synonymes d'injustice. L'injustice commence à partir du moment où les libertés de départ ne sont pas semblables pour tous et où les richesses créées n'améliorent pas le sort de tous.
MAIS...
Les inégalités engendrent les inégalités. Tous les membres qui composent une société sont utiles les uns au autres. Pour que justice il y ait, tous doivent bénéficier des mêmes avantages, d'une même reconnaissance.



« Rousseau, qui pourtant défend l'égalité parmi les hommes comme principepolitique absolu, ne nie pas qu'il existe des inégalités naturelles: la différenced'âge, la santé, la force du corps, les capacités intellectuelles...

Cesinégalités ne sont injustes que dans la mesure où elles concernent l'homme.L'ordre naturel, quant à lui, n'est ni juste ni injuste.

Dire qu'il est injuste quemon voisin soit plus grand que moi est une ineptie. " [...] il est aisé de voir qu'entre les différences qui distinguent les hommes,plusieurs passent pour naturelles qui sont uniquement l'ouvrage de l'habitudeet des divers genres de vie que les hommes adoptent dans la société.Ainsi un tempérament robuste ou délicat, la force ou la faiblesse qui endépend, viennent souvent plus de la manière dure ou efféminée dont on a étéélevé, que de la constitution primitive des corps.

Il en est de même desforces de l'esprit, et non seulement l'éducation met de la différence entre lesesprits cultivés et ceux qui ne le sont pas, mais elle augmente celle qui setrouve entre les premiers à proportion de la culture ; car qu'un géant et unnain marchent sur la même route, chaque pas qu'ils feront l'un et l'autredonnera un nouvel avantage au géant.

Or, si l'on compare la diversitéprodigieuse d'éducations et de genres de vie qui règnent dans les différentsordres de l'état civil avec la simplicité et l'uniformité de la vie animale etsauvage, où tous se nourrissent des mêmes aliments, vivent de la mêmemanière et font exactement les mêmes choses, on comprendra combien la différence d'homme à homme doit être moindre dans l'état de nature que dans celui de société, et combienl'inégalité naturelle doit augmenter dans l'espèce humaine par l'inégalité d'institution.

"Jean-Jacques Rousseau, Discours sur l'origine de l'inégalité parmi les hommes (1754) Ce a quoi le texte s'oppose Rousseau conteste, dans cet extrait du Discours sur l'origine de l'inégalité, le préjugé selon lequel la nature estinégalitaire et instaure des différences de constitution entre les hommes, aussi bien sur le plan physiquequ'intellectuel.L'opinion commune affirme, en effet, que la nature a fait les uns plus robustes, les autres plus fragiles, les uns moinsintelligents, les autres plus rusés, etc.

Les sophistes grecs de l'Antiquité s'appuyaient d'ailleurs sur ces différencesnaturelles pour poser que seuls les plus forts doivent commander aux plus faibles.

Ainsi, pour eux, l'inégalité desdroits civils devait trouver sa justification dans l'inégalité que la nature avait instituée entre les hommes.

Dans ledialogue qu'il a intitulé Gorgias, Platon nous présente même le sophiste Calliclès soutenant, face à Socrate, la thèsesuivante : la véritable justiceest celle qui respecte les inégalités naturelles ; il est donc juste que les plus forts dominent les plus faibles etdeviennent les chefs dans une cité puisqu'ils sont, par nature, les plus forts.Rousseau s'oppose totalement à cette idée et inverse la perspective précédente : l'inégalité civile ne peut être,selon lui, légitimée par une prétendue inégalité naturelle puisque, dans l'état de nature, « l'uniformité de la vieanimale et sauvage, où tous se nourrissent des mêmes aliments, vivent de la même façon et font exactement lesmêmes choses », rend minimes les différences d'homme à homme.L'auteur déduit de cette constatation la loi selon laquelle l'inégalité naturelle augmente, dans l'espèce humaine, enproportion de l'inégalité d'institution, c'est-à-dire à mesure que les différences culturelles augmentent entre leshommes.

Ce que défend ce texte: Ce n'est donc pas la nature qui produit de l'inégalité, mais bien la culture.

En civilisant les hommes, la société créede l'inégalité et, souvent, des différences qui passent pour naturelles « sont uniquement l'ouvrage de l'habitude etdes divers genres de vie que les hommes adoptent dans la société ».Par cette affirmation, Rousseau accorde à l'éducation toute son importance, en montrant qu'elle n'influence pasuniquement l'épanouissement des esprits, mais aussi des corps.

Un corps robuste ou délicat l'est moins en raison desa constitution naturelle, donnée une fois pour toutes, qu'en fonction de la manière, dure ou délicate, selon laquelleil a été élevé.L'argumentation de Rousseau s'appuie ici sur le caractère le plus manifeste de la culture, à savoir l'extrême variétéde ses manifestations, des comportements et des manières de vivre que les différentes sociétés humaines nousdonnent à voir.Les inégalités qui en découlent se renforcent toujours davantage, au cours de l'existence, comme l'illustre l'image dugéant qui, à chaque pas, augmente l'écart qui le sépare du nain.

Cette image sert à nous faire comprendre quel'inégalité culturelle, qui prend sa source dans les différences d'éducation, non seulement ne peut jamais êtrecomblée, mais s'accroît même au fur et à mesure que les existences individuelles se déroulent.En inversant ainsi la perspective traditionnelle, à propos de l'origine de l'inégalité, ce texte engage par là même uneréflexion d'ordre politique.

Si les inégalités naturelles, certes inévitables, sont minimes, celles qu'institue une sociétépeuvent être supprimées, et avec elles les injustices qu'elles entraînent.Nul pouvoir et nul privilège social ne peuvent donc s'appuyer sur une soi-disant supériorité naturelle pour justifierleur exercice, et ils peuvent être contestés pour le motif qu'ils reposent en réalité sur l'arbitraire de la culture.. »

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