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Une fin de la politique est-elle envisageable ?

Publié le 07/07/2010

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La politique est, au fond, la pratique du droit qui a pour tâche de rendre possible la coexistence d'êtres libres. N'est donc moralement légitime qu'un droit qui donne à chacun une liberté compatible avec celle de tous les autres. Autrement dit, est juste, comme le souligne Kant, « toute action [...] dont la maxime permet à l'arbitre de tout un chacun de coexister avec la liberté de tout autre suivant une loi universelle « (Métaphysique des moeurs, Doctrine du droit, trad. Philonenko). Ce principe énonce le critère absolu du juste et de l'injuste et représente, dans le domaine de la doctrine du droit, la véritable contrepartie de l'impératif catégorique de la doctrine de la vertu.

« La politique désigne sous son acception la plus générale l'organisation du vivre ensemble.

Elle a pour but d'établir lameilleure organisation possible entre les hommes.

Or tant que l'activité politique change les lois ou modifie un régime,il semble que cette fin au sens de but ne soit pas atteint.

Atteindre son but pour la politique consisterait donc àétablir une fois pour toutes la meilleure organisation.

Cette organisation une fois établie, il n'y aurait alors plusbesoin de politique, ce serait sa fin entendu comme son terme.

Ainsi on peut dire que la politique n'a finalement pourbut que sa propre destruction, elle cherche elle-même à se dépasser vers un état où elle ne serait plus nécessaire.L'idéal de politique désigne alors sa fin comprise comme la coïncidence entre le projet et l'achèvement.L'achèvement de son projet est sa perfection.

Si la politique ne cherche qu'à se parfaire, c'est à dire à réaliser sonprojet en se dépassant, alors une fin de la politique constitue une possibilité inscrite dans le concept même de lapolitique.

Par conséquent, la fin de la politique serait envisageable. Cependant , si en droit, la fin de la politique est conforme à son concept, dans les faits, elle peut difficilement êtrepensée comme une véritable possibilité.

En effet, la politique appartient au champ du temps et de l'histoire ; ce quiempêche que le but de la politique soit jamais complètement atteint.

Ainsi si le but que se donne la politique ne peutjamais être complètement réalisé, la politique ne peut s'achever en une fin qui ferait coïncider son terme etl'aboutissement de son projet.

Il n'est d'ailleurs même pas certain que cette fin de la politique doive être envisagée.Notre problème sera donc : peut-on penser un achèvement de la politique coïncidant avec la réalisation de son butou bien cette idée se réduit-elle à une chimère ? I La fin de la politique est envisageable _ Au sein de la vie quotidienne, l'idée de la fin de la politique semble infiniment paradoxale : la politique comme souciqu'ont les hommes d'organiser leur vivre ensemble est en effet toujours plus ou moins présente dans nosdiscussions ; et comme activité d'organisation effective, elle est l'objet de l'activité de nos représentants.

Aussi dupoint de vue du quotidien, la politique semble ne jamais devoir finir.

Comment peut-on penser que la politique puissefinir ? Avant d'être une activité au sein du concret, elle désigne une activité de la raison par laquelle on cherche àdéterminer par la pensée les meilleurs formes de l'organisation.

Ainsi dans le livre V de la République ( 472a-473 e), Platon défend une conception de la politique comme constitution idéale d'un Etat parfait sans s'occuper desconditions de réalisation.

Le problème de la fin de la politique doit donc être pensée du point de vue de l'idéal et dela raison.

Si l'on peut imaginer que la politique finisse, c'est que cette fin est comprise dans son concept même.

Lapolitique est l'activité de la raison par laquelle les hommes organisent et réglementent leur vivre-ensemble.

Or, le butde la politique est la réalisation de la meilleure organisation possible.

Une fois que cette organisation est réalisée, lapolitique est finie dans la mesure où son projet est absolument achevé.

L'achèvement du projet politique désigne saperfection : ce qui est « per-fectus », c'est ce qui ne peut plus être retravaillé sans sombrer dans l'imperfection.Ainsi lorsque la politique accède à son but, elle cesse d'elle-même son activité.

Dès que la politique aura réalisé sonpropre concept, elle se sera elle-même dépassée dans une organisation qui ne nécessitera plus sa pratique.

Parconséquent, on peut dire que c'est la fin même de la politique comme but que de travailler à sa propre fin commeterme. _ La fin de la politique est donc le but qu'elle se donne à elle-même dans l'établissement de la meilleure organisationpossible.

Le mode d'organisation de la collectivité s'appelle le gouvernement.

L'activité politique consiste donc en cesens à déterminer le meilleur gouvernement.

C'est ce que soutient Thomas More dans la seconde partie de sonouvrage Utopie , dont le sous titre est « la meilleure forme de gouvernement ».

La politique comprise comme activité d'organisation se réduit à l'activité de son législateur mythique Utopus, qui donne son son nom à son île : u-topia, lelieu qui n'est nulle part.

Utopus donne une fois pour toutes les règles et les principes de l'organisation qui doiventprésider les rapports entre les hommes au sein de cette société idéale.

Ainsi l'activité politique se réduit ici à lalégislation après l'établissement de laquelle la politique est terminée.

En effet, une fois posés les principes del'organisation, il n'est plus besoin de s'interroger, de discuter et de remettre en cause les modes d'organisation entreles hommes.

Il suffit désormais de se soumettre à la législation du meilleur gouvernement pour que les rapports entreles hommes cessent d'être difficiles et problématiques.

Ainsi la perfection de la vie sociale dépend de la perfectionde la politique : la garantie d'un bon mode d'organisation est son intangibilité, c'est à dire le fait de ne plus pouvoirêtre touché et corollairement sa permanence.

De ce point de vue, l'exemple de Sparte est symptomatique : lagrandeur de la cité serait en effet due au fait que la constitution rédigée par Lycurgue n'est jamais été critiquéedurant toute son existence.

Si ce légicentrisme intégral règle l'organisation de la société depuis sa fondation, il n'estplus besoin de représentants, mais seulement de gestionnaires et d'administrateurs.

La gestion désigne le traitementet l'application des modes d'organisation à la situation présente sans qu'il n'y ait plus d'acte de reprise sur cetteorganisation.

De ce point de vue, on peut dire que dans cet état où la politique est finie pourrait s'appelernomocratie, c'est à dire le règne absolu de la loi.

Le législateur originel est en effet remplacé par la loi elle-même quifonctionne par elle-même si bien que ce procès de rationalisation intégrale du politique a pour idéal la.

machine.

Unemachine est un agencement de parties qui fonctionnent entre elles, par leur propre mouvement.

Ainsi legouvernement des lois comprise comme une machine autonome réaliserait la fin de la politique au sens de terme etde but : la conception du meilleur mode d'organisation est le réalisation du concept de politique, aussi le vivreensemble qui est soumis à ce gouvernement ne nécessite plus qu'une gestion, mais nullement une activité politique.En ce sens la fin de la politique serait envisageable.. »

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