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Y a -t-il quelque chose que les méchants ont compris et que les bons ignorent ?

Publié le 27/02/2008

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Supposer que les méchants détiennent un savoir dont seraient privés les bons constitue une pensée paradoxale. Un para-doxe désigne une proposition provocante qui vient contredire ce qui est communément reçu. Cette proposition nous choque en un double sens . Tout d'abord les individus qualifiés de méchants commettent des actions qui violent les règles de justice en recherchent leur bien au détriment du bien d'autrui ; par opposition  les individus qui respectent les règles de justice et ne réalisent pas leur bien au détriment d'autrui sont qualifiés de bons. Dans ces définitions, ce qui distingue le méchant du bon n'est pas une plus grande perfection théorique, mais une action pratique. Deuxièmement, notre raison faculté de penser la cohérence semble exiger la compatibilité et même la coïncidence entre les valeurs du bien et du savoir. Ainsi si le savoir et le bien ne doivent pas se séparer, il nous serait interdit de penser que les méchants possèdent un savoir dont les bons seraient privés. Notre raison exigerait bien plutôt que les bons ont compris quelque chose que les méchants ignorent. Cependant l'exigence de notre raison ne correspond pas nécessairement à la réalité. Il faudrait alors entreprendre un examen critique de cette thèse en se référant par exemple à la littérature. Or les méchants littéraires paraissent souvent doter d'une pénétration qui fait défaut aux héros naïfs. Par conséquent on pourrait en déduire que les méchants ont compris ce que les bons ignorent. Cependant  il est incertain que le bon puisse vraiment être bon s‘il est ignorant du mal qu‘il pourrait commettre. Nous sommes alors confrontés à ce problème : doit-on penser la coïncidence de la perfection morale avec la perfection théorique, au risque d'entretenir une illusion bien pensante ou au contraire doit-on les dissocier quitte à perdre une cohérence exigée par la raison comme fondement de la morale ?

« conséquent les méchants savent que les hommes n'obéissent aux lois que par peur_ Si la loi provient de la peur que les hommes ont les uns des autres et de la nécessité de réfréner leurs désirs, onpeut alors imaginer que la loi a été instituée par la majorité des hommes faibles pour contrôler la minorité deshommes forts.

Selon Calliclès dans le Gorgias , c'est la peur devant les forts qui aurait engendrer les lois.

Or ce que les méchants savent, c'est que l'institution conventionnelle des lois est devenue une sorte de seconde natureillusoire prise pour une morale spontanée par les faibles.

Les faibles ignorent que l'origine de la moralité dont-ils seprévalent en tant que bons se réduit à une stratégie pour contrôler les forts par l'éducation.

Les bons ne sont quedes faibles qui s'ignorent quand les méchants sont des forts qui n'ont pas oublié leur véritable nature.

On pourraitalors comprendre les hommes que ceux qui se croient bons appellent méchants comme des forts se rappelant leurnature de forts malgré leur éducation imposée par les faibles.

A la limite on pourrait appeler faibles tous les hommesqui refusent d'admettre qu'ils ne réfrènent leurs désirs de servir leurs intérêt que par peur d'être châtiés et fortsceux qui l'ayant compris en prennent leur parti en accomplissant leurs désirs malgré les lois.

Mais comme lesméchants ne peuvent violer les lois sans être châtiés, ils masquent leurs méfaits et cachent leur intention.

Ainsi undes savoirs les plus solides que possèdent les méchants, c'est que le monde des hommes est tout entier régi parl'apparence.

Dans les Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos, le vicomte de Valmont et la marquise de Merteuil ont compris qu'ils pouvaient faire tout le mal qu'ils voulaient du moment que cela restait dans l'ombre._ De plus les bons ont pour préjugé constant que les hommes sont bons par essence alors que les méchants, sansdoute plus lucides, pensent que les hommes sont méchants.

Qu'est-ce à dire ? Les méchants savant lire clairementen eux-mêmes et dans les autres hommes ne sont pas sans savoir que tout un chacun ne vise qu'à réaliser sonpropre intérêt quitte à détruire autrui; Aussi les bons, aveuglés par le préjugé de bonté anthropologique pensent queles hommes qui les entourent servent leurs intérêts parfois au détriment du leur.

La conséquence est énoncée parMachiavel dans le chapitre XV du Prince : « un homme qui en toute occasion voudrait aire profession d'homme de bien ne peut éviter d'être détruit par des gens qu ne sont pas bons ».

Par exemple, la famille royale croit que lepersonnage éponyme de Shakespeare le comte de Gloucester sert leurs intérêts alors qu'il cherche à les destituerpour devenir Richard III .

De même Othello le général maure a toute confiance en Iago le traître qui complote contre lui et provoquera sa chute.

Ainsi les bons pèchent par trop de naïveté sur la nature des intentions humaines quandles méchants savent eux-mêmes à quoi s'en tenir.

Leur lucidité désillusionnée leur permet alors de tendre des piègesà leur proie pour s'assurer la suprématie.

Les méchants auraient donc compris la nature et l'origine de la loi ainsi que la nature humaine par opposition auxbons aveuglés par leurs préjugés et leur ignorance.

Cependant si un méchant n'est méchant que s'il sait le mal qu'ilest en train de faire, de même il serait étonnant qu'un homme puisse être qualifié de bon s'il ignore qu'il pourraitcommettre le mal.

III Au-delà de la perfection théorique la perfection morale _ Pour être bon, un homme ne peut être ignorant du mal dont les hommes en général sont capables, ni du mal qu'ilpourrait commettre en particulier.

Les innocents comme Cécile de Volanges dan les Liaisons dangereuses ne peuvent être qualifiés de bons dans la mesure où ils ne savent pas que les hommes sont capables d'être mauvais.

Enrevanche, la marquise de Tourvel qui meurt après avoir été abandonné par Valmont savait la capacité des hommes àêtre mauvais, c'est la raison pour laquelle elle peut être qualifiée de bonne lorsqu'elle se donne à son bourreau endépit de son savoir.

Ainsi si l'on appelle bons les hommes qui n'ignorant pas le mal dont les hommes sont capablesparviennent tout de même à ne pas nuire au bien d'autrui, voire à se sacrifier pour lui, on peut alors en déduire queles méchants ne savent rien de plus que les bons.

La distinction entre méchants et bons ne peut se fonder sur uncritère théorique.

En effet le savoir concerne ce qui est, mais pas ce qui devrait être.

On ne voit pas alors pourquoile devoir être devrait s'indexer sur l'être qui s'offre au savoir.

Ainsi la thèse discutable « les hommes sontméchants » ne permet pas de fonder un devoir être.

Autrement dit ce n'est pas parce que l'on sait que les hommessont méchants qu'il faut le devenir.

Au contraire le devoir être de la morale prescrit le devoir d'être bon absolumentsans s'occuper de savoir si les hommes sont méchants._ Si le devoir être constitue une position de valeur hors du théorique, il faudrait séparer le problème de la morale decelui du savoir.

En effet comme le soutient Kant dans son introduction aux Fondations de la métaphysique des moeurs , tout un chacun le bon comme le méchant s'il écoute sa raison connaît les principes de la moralité.

Dans l'esprit du bon comme dans celui du méchant, les principes de la moralité se révèlent avec la même intelligibilité :aucun homme ne peut faire taire la voix d'airain de sa conscience.

En revanche il peut décider de la suivre ou de luidésobéir; c'est dans cette décision libre de la volonté à appliquer la loi morale que le méchant se distingue du bon.Ainsi un méchant ne comprend pas quelque chose que le bon ignore, il comprend avec la même acuité l'impératifcatégorique de la loi morale et décide de s'en excepter.

L'impératif catégorique s'énonce ainsi : agis toujours de tellesorte que la maxime de ta volonté puisse devenir une législation universelle »Ainsi le méchant sait que le mensongeou le vol ne peuvent être une législation universelle auquel cas cela créerait un état d'anarchie totale.

Néanmoins,malgré ce savoir qu'il partage avec le bon, il décide de s'en excepter.

La décision de s'excepter d'une loi universelleest qualifié par Kant de Mal radical.

Ainsi le méchant se distingue du bon par sa volonté d'abord, puis par son actionqui pérennise sa décision et l'incarne dans le réel._ Si le savoir ou l'ignorance n'ont pas pour conséquence la bonté ou la méchanceté, on pourrait dire à l'inverse quec'est la volonté ou bonne ou mauvaise qui crée un certain type de savoir ou d'ignorance.

C'est la position de valeurémanant de la décision qui agit comme un prisme de sélection sur le réel.

Ainsi les méchants, du fait de leursmauvaises actions, auront toujours plus tendance à soupçonner le mal dans les intentions morales et à affirmer queles hommes sont méchants alors qu'ils sont seulement indéterminés.

C'est ce ue signifie l'expression « tu vois le malpartout ».

Si on ne voit que le mal partout, c'est peut-être que la volonté est viciée et projette sur les intentionsdes hommes qui nous sont proches ma propre méchanceté latente.

Ainsi les méchants ne seraient pas plus lucides. »

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