Y a-t-il un bon usage de la philosophie ?
Publié le 07/01/2006
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PHILOSOPHIE (gr. philo, désirer; sophia, savoir) Étymologiquement, « amour de la sagesse ». Cependant, la sagesse n'étant qu'un art de vivre, la définition commune de la philosophie comme sagesse" est critiquable. En effet, sophia désigne en fait moins un savoir empirique adapté à la conduite de la vie qu'un savoir abstrait. En ce sens, la philosophie est essentiellement élévation de la pensée, théoria, contemplation. Cependant, comme l'indique l'allégorie de la caverne de Platon, le philosophe ne quitte le monde sensible que pour y redescendre, puisqu'il lui revient de gouverner la cité idéale. S'il s'agit de s'exercer à l'abstraction, il faut ne pas s'y perdre. Or, si la philosophie ancienne reste encore marquée par l'opposition de la contemplation (théoria) et de l'action (praxis"), la philosophie moderne est plutôt soucieuse d'abolir cette distinction, comme le signale le projet cartésien de « nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature ». Elle cesse alors d'être un savoir désintéressé pour se mettre au service de la construction d'un monde régi par la science". Du coup, elle risque ou bien de devenir une spécialité comme les autres, ou bien, refusant cette spécialisation, de passer pour une activité dilettante réservée à quelques dandys de la pensée. Telle est l'aporie du philosophe contemporain : rester un généraliste sans sombrer dans l'insignifiance. Dès lors, pour éviter ce piège, la philosophie doit affirmer son sérieux par la prudence d'un jugement née de l'accumulation du savoir. Elle devient ainsi histoire de la philosophie, non pas connaissance érudite des doctrines, mais plutôt éveil de la pensée à elle-même à partir de ce qu'ont pensé les autres. Le développement de la philosophie peut alors se comprendre comme celui de la vérité à travers les différents moments nécessaires à son déploiement. Cette définition dialectique, proposée par Hegel, permet de saisir la nécessité rationnelle qui gouverne l'histoire de la philosophie : le philosophe est fils de son temps, et comme ceux d'hier, il lui revient de répondre aux besoins de son époque. La philosophie ne se réduit donc pas à ses oeuvres qui sont comme les tombeaux de la philosophie passée : elle est essentiellement vivante dans l'activité présente de penser, qu'exprime magnifiquement tout enseignement où le maître, à la manière de Socrate, requiert la participation du disciple.
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- Commentez cette définition des «lumières» par Kant (article «Qu'est-ce que les Lumières ?») : «Qu'est-ce que les Lumières ? La sortie de l'homme de sa minorité, dont il est lui-même responsable. Minorité, c'est-à-dire incapacité de se servir de son entendement sans la direction d'autrui, minorité dont il est lui-même responsable puisque la cause en réside non dans un défaut de l'entendement, mais dans un manque de décision et de courage de s'en servir sans la direction d'autrui. Sapere
- La philosophie que je cultive n'est pas si barbare ni si farouche qu'elle rejette l'usage des passions; au contraire, c'est en lui seul que je mets toute la douceur et la félicité de cette vie. Correspondance, à l'abbé Picot, 28 février 1648 Descartes, René. Commentez cette citation.
- La philosophie que je cultive n'est pas si barbare ni si farouche qu'elle rejette l'usage des passions; au contraire, c'est en lui seul que je mets toute la douceur et la félicité de cette vie. [ Correspondance, à l'abbé Picot, 28 février 1648 ] Descartes, René. Commentez cette citation.
- Ainsi on confère le plus grand honneur à l'invention humaine en tant qu'elle subjugue les choses naturelles et se les approprie pour l'usage. Hegel, Leçons sur la Philosophie de l'histoire. Commentez cette citation.