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Liberté, égalité et fraternité: UNE DEVISE FONDATRICE

Publié le 21/08/2013

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À partir de 1848, « Liberté, égalité, fraternité« devient un triptyque idéologique. L'ordre des mots, pensé par des érudits, n'est pas l'effet du hasard. Chaque élément implique l'autre. La liberté est l'état suprême auquel l'homme aspire, mais cet état, pour être juste, doit être semblable pour tous. Il ne peut donc y avoir de liberté sans égalité. Or l'égalité ne peut elle-même exister que si l'homme consent au partage. Il ne peut donc y avoir d'égalité sans fraternité. Une démocratie, pour être parfaite, doit appliquer la devise sans dissocier les termes.

Nul mot n'a jamais fait couler autant d'encre que le mot « liberté «. Poètes, philosophes, écrivains, économistes et juristes ont tenté en vain de lui donner des contours, de le circonscrire dans une signification unique et universelle. Montesquieu résume parfaitement cette quête éternelle : « Il n'y a point de mots qui n'aient reçu tant de différentes significations et qui n'aient frappé les esprits de tant de manières que celui de liberté.«

« «Le peuple français[ ...

] donne asile aux étrangers bannis de leur pays pour la cause de la liberté.

» La Constitution de 1793 est un texte mythique, selon certains auteurs une sorte d'« évangile de la démocratie ».

Équitable , juste, humaniste, fraternelle , elle est demeurée un modèle pour les démocrates du monde entier.

Adoptée le 24 juin 1793, elle a permis de forger l'esprit républicain de la France -mais elle n'a jamais été appliquée .

1848 : UNE FRATERNITÉ CONSTITUTIONNELLE En 1795, la Constitution de l'an Ill, composée de 3n artides, précédée des Droits et devoirs de l'homme et du dtoyen, répudie les textes précédents.

• Il faudra attendre l'avènement de la Il' République (1848) pour renouer avec les principes de liberté, d'égalité et de fraternité.

Dans l'artide 4 de la Constitution de 1848 , toutes les libertés acquises en 1789 et 1793 sont rétablies : liberté de conscience, de culte, de réunion , d'expression, liberté de la presse , du commerce et de l'industrie , libertés politiques et publiques .

l:esd•v•ge est définitivement aboli .

• Tout comme la Constitution de 1793, celle de la Il' République se fixe des buts :préserver les droits de l'homme, assurer une répartition équitable des charges et des avantages de la société, faire parvenir les citoyens à un stade toujours plus élevé de moralité, de savoir et de bien-être .

Les premières libertês collectives apparaissent : liberté de l'enseignement et liberté d'association (artide 8).

l:artide 13 mentionne quant à lui l'égalité du patron et de l'ouvrier.

En revanche, Thiers obtient que le droit au travail ne figure pas dans les textes .

Au cours de l'élaboration des artides, Lllm•rllne monte à la tribune pour demander que le mot « fraternité » apparaisse dans le préambule de la Constitution et devienne le troisième élément de la devise de la France .

Pour Lamartine , la fraternité , conciliant raison et passion , permettra de sauver la société de tous les germes de discorde, car elle n'admet ni règles ni mesures.

Elle constitue le plus absolu, le plus illimité des principes républicains, puisqu'elle échappe au diktat du pouvoir et des lois.

La Constitution de 1848 dédare donc : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits.

Ils sont doués de raison et de conscience, et doivent agir envers les autres dans un esprit de fraternité .

» LA PROCLAMAnON À partir de 1848, «Liberté, égalité, fraternité » devient un triptyque idéologique .

!:ordre des mots , pensé par des érudits, n 'est pas l'effet du hasard.

Chaque élément implique l'autre.

La liberté est l'état suprême auquel l'homme aspire, mais cet éta~ pour être juste , doit être semblable pour tous.

Il ne peut donc y avoir de liberté sans égalité .

Or l'égalité ne peut elle-même exister que si l'homme consent au partage.

Il ne peut donc y avoir d'égalité sans fraternité.

Une démocratie, pour être parfaite, doit appliquer la devise sans dissocier les termes.

Nul mot n'a jamais fait couler autant d 'encre que le mot « liberté ».

Poètes, philosophes , écrivains, économistes et juristes ont tenté en vain de lui donner des contours, de le circonscrire dans une signification unique et universelle .

Montesquieu résume parfaitement cette quête éternelle : « Il n'y a point de mots qui n'aient reçu tant de différentes significations et qui n'aient frappé les esprits de tant de manières que celui de liberté .

» • D'un point de vue social et politique, la liberté est indissociable de sa dimension philosophique .

Dès 1789 , Robespierre souligne les difficultês que présente l'application de la liberté au sein d'une société : « Si tous les hommes étaient justes et vertueux ; si jamais la cupidité n'était tentée de dévorer la substance du peuple[ ...

] , on pourrait ne reconnaître d'autre loi que la liberté illimitée.

» Ainsi, un gouvernement n'a d'autre choix que de légiférer pour que la liberté puisse devenir une réalité tangible .

Le mot « liberté » est donc assimilé au concept de justice sociale, au respect des droits du citoyen.

On ne parle plus alors de liberté, mais des libertês publiques , ces dernières étant définies par la loi.

DIOIT POSITIF.

DIOIT SOCIOLOGIQUE Pour les hommes de 1789, la liberté relevait du « droit naturel >>, reflet de l'ordre du cosmos, cette doctrine s'étant transformée , dans la pensée moderne, en reflet de la conscience individuelle.

• Dans l'inconscient collectif français, la liberté demeure un droit naturel imprescriptible d1nspiration rousseauiste .

C'est donc sa valeur philosophique qui prédomine .

Dan s les faits , elle est régie par les lois (droit positif ou positivisme juridique) définies par le Parlemen~ les autorités administratives et les juges.

• Depuis 1948, ce« positivisme juridique>> cohabite avec un « positivisme sociologique >> qui fait prévaloir les libertés que la conscience collective juge les plus importantes.

Ces libertés sont des droits garantis par l'État : droits collectifs (de grève, de pétition, de réunion, d'association, de vote , etc.) et droits individuels (liberté de« disposer de soi >>, de circuler, de donner son corps à la science, mais aussi liberté intellectuelle, etc.).

Le 12 mai 1976, devant la Commission des libertés, André seul moyen de déterminer les libertés.

» !:assujettissement aux coercitions sociales voire économiques est un des paradoxes des libertês publiques.

LIBEIITt n UBEIITtS PUBUQUES Si la devise républicaine de 1789 prodame « vivre libre ou mourir >>, en littérature comme en politique , la liberté est associée à la paix et non à la guerre .

• Bernanos en tire une certaine amertume : « Le monde moderne est essentiellement un monde sans liberté [ ...

].À chaque guerre pour la liberté , on nous prend 25 % des libertês qui subsistent.

Qui dit mieux ou pis? Pour nous , il est temps décidément de parler un peu de paix.

>> • Pour Marx , les libertés occidentales sont des libertés formelles, illusoires.

• Philosophes et politiques s'entendent sur un point : la liberté doit être concrètement déterminée et ne pas se réduire à une notion abstraite.

Toutefois , Hegel souligne que le mot véhicule une multitude de significations discordantes (refus d 'autorité , adhêsion aux règles sociales , libre arbitre inspiré de saint Augustin ou de Descartes, etc.) qui ne facilitent pas une définition rationnelle et définitive.

• Sur le terrain politique, liberté et libertés publiques coexisten~ l'une sur le plan philosophique , les autres sur le plan juridique.

Des contradictions qui les opposent sont nés l'ensemble des progrès sociaux.

DE l'ÉGALITÉ AUX INÉGALITÉS Depuis 1789, en France, l'égalité est considérée comme la nécessaire condition de la liberté civile.

Elle permet de rééquilibrer les différences socio­ économiques et de structurer un monde plus juste.

Michelet donne la mesure de cette conception particulièrement novatrice de la société : « La France veut la liberté dans l'égalité, ce qui est précisément le génie social.

» En 1793, cette volonté se traduit par l'inversion de l'ordre des mots dans la devise.

On ne dit plus « liberté, égalité >> mais « égalité , liberté ».

lES INiGALITtS • En 1794, Condorcet dresse un premier inventaire des inégalités sociales .

Il répertorie 11négalité de richesse , 11négalité d1nstruction , l'inégalité de ressource.

En 1840, Proudhon complétera la liste en y ajoutant l 'inégalité de condition et l'inégal ité de rang.

• Condorcet démontre qu'il existe une corrélation entre l'inégalité d'instruction et 11négalité de fortune: «Si l'instruction est plus égale , il en naît une plus grande égalité dans 11ndustrie e~ dês lors, dans les fortunes; et l'égalité des fortunes contribue nécessairement à celle de 11nstruction .

>> Lamarck complète cette analyse en affirmant que 11nstruction permet également de gommer les inégalités de jugement La volonté d'armer intellectuellement le citoyen afin qu'il participe activement au fonctionnement de l'État est constante dans la société française depuis 1789.

DE L'iGAUrt DE DROIT À L'iGALJTt DE FAIT • Hegel, le premier, affirme que l'égalité devant la loi peut se révéler différente d'une catégorie de population à l'autre.

Il en cond~ allant à l'encontre du vieil adage républicain selon lequel « la loi libère >>, que l'État de droit peut s'avérer inégalitaire et autoritaire.

Il n 'en rejette pas pour autant 11dée de légiférer pour égaliser .

• Face aux courants de pensée humanistes se développe également l'anti-égalitarisme libéral (Hayek, Popper, Notzick, etc.) .

Max Weber et Carl Menger (école économique autrichienne) développent en ce sens l'individualisme méthodologique.

Pour eux, l'individu est doué d 'une certaine rationalité et d'aptitudes différentes d'où découlent des inégalités positives .

Réduire ces inégalités nuit à la liberté individuelle et au développement économique.

!:État doit se limiter à faire régner l'ordre, à protéger la propriété et à obliger chacun à honorer les engagements contractés.

• C•mus lance alors une mise en garde : «!:excès d'inégalité , surtout s'il se déguise, est facteur non d'efficacité, mais de révolte, donc d'inefficacité .>> • Marx refuse l'opposition individu /société défendue par Weber .

Pour lui, il est impossible de dissocier l'élément (l'homme) de son tout (la société) .

Ils sont tous deux le résu ltat d 'une évolut ion soda-historique .

Marx définit ainsi l'égalité :«À chacun selon ses besoins .

» Ainsi, si chacun reçoit le nécessaire pour vivre et s'épanouir , l 'égalité sociale est réalisée .

• Pour les tenants de l'égalité , la perspective est de passer d'une égalité de droit à une égalité de tai~ afin de créer un équilibre social durable .

La fraternité prend sa source dans la religion.

Bossuet l'exprime avec justesse : « Dieu a établi la fraternité des hommes en les faisant naître d'un seul qui, pour cela, est leur père à tous.

>> La société est apparentée à une vaste famille où chacun peut tout à la fois s'épanouir et trouver aide et protection.

La notion de cohésion de groupe et d 'entraide remonte aux sociétés de chevalerie , époque où les guerriers se juraient allégeance .

LE DEVOIR DE FIIAnRNm La fraternité telle que nous pouvons l'envisager aujourd'hui est née avec la révolution de 1789 .

Le mot de passe des sans -culottes était en effet« Salut et fraternité >>.

• Mirabeau lui assigne un rôle majeur dans la quête de la justice sociale : « La liberté générale bannira du monde entier les absurdes oppressions qui accablent les hommes et fera renaître une fraternité universelle sans laquelle tous les avantages publics et individuels sont si douteux et si précaires .

» • Dans son contexte politique , la fraternité n'est pas un droi~ mais un devoir : individuel (initiative de chaque citoyen) , collectif (État ou association).

Elle prend toutes les formes d'entraide et oppose la loi du chacun pour soi à celle du chacun pour tous .

• En 1793, la première manifestation de la fraternité est l 'aide au travail.

Au XIX' siècle, Lion BourgHis , théoricien du radicalisme , s'inspirant des idées de Pierre Leroux , crée le solidarisme, une doctrine qui vise à remplacer la charité chrétienne par la solidarité humaine et s1nscrit entre libéralisme individualiste et socialisme collectiviste.

• Les applications pratiques du solidarisme sont nombreuses : coopératives de production ou de consommation , sociétês mutualistes, loi relative aux accidents du travail, assistance aux infirmes et aux vieillards, régime des retraites et conception de la Société des Nations.

Pour Léon Bourgeois,« l'État est une création des hommes ; il ne doit intervenir que pour rétablir l'égalité entre tous les participants au contrat >>.

LA FIIAnRNm : DOCTRINE PHILOSOPHIQUE • La solidarité et la fraternité n'ont qu'un but : donner conscience à l'homme que son adhésion individuelle à la préservation du bien d'autrui et du bien général (travail, propriété, scolarité, environnemen~ etc.) ainsi qu'à la protection des plus faibles est la garantie d'une société juste et humaine .

« La solidarité n'est autre chose qu'un rapport qui rattache et confond les intérêts, une sorte d'assurance mutuelle où tous sont protégês en général et chacun garanti en particulier contre les mauvaises chances .

ttre solidaire, c'est être responsable les uns pour les autres .

>> (Mens uel La Solidarité- 1849) Roger Martin du Gard a développé, au XX' siède, l'idée d 'une « fraternité restreinte» , intelligence d'entente entre deux êtres proches envisagée comme la pierre fondatrice d'une cohabitation sereine plus vaste .

OBJECTIF BIEN VIVANT Liberté , égalité et fraternité sont les principes fondateurs de la république et de la démocratie.

Leur disparition signerait l'arrêt de mort des droits de l'homme.

Nombreux sont les chercheurs modernes (Rawls, Polanyi, Ricœur , Jacquard , etc.) qui tentent de gommer les contradictions faisant résonner entre eux les trois termes ; mais, pour l'heure , l'objectif est de faire bénéficier l'ensemble de l'humanité des principes universels de dignité et de liberté de conscience.

!:enjeu reste le même : faire cohabiter efficacité économique et justice sociale.. »

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