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« A Monsieur le Cardinal Mazarin, sur la Comédie des Machines » Vincent Voiture

Publié le 05/11/2012

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mazarin

Quelle docte Circé, quelle nouvelle Armide Fait paraître à nos yeux ces miracles divers,  Et depuis quand les corps par le vague des airs Savent-ils s’élever d’un mouvement rapide?  Où l’on voyait l’azur de la campagne humide; Naissent des fleurs sans nombre, et des ombrages verts; Des globes étoilés les palais sont ouverts,  Et les gouffres profonds de l’empire liquide.  Dedans un même temps nous voyons mille lieux,  Des ports, des ponts, des tours, des jardins spacieux,  Et dans un même lieu, cent scènes différentes.  Quels honneurs te sont dus, grand et divin prélat,  Qui fais que désormais tant de faces changeantes Sont dessus le théâtre, et non dans l’Etat? Lecture Analytique Introduction : Vincent Voiture (1597-1648), membre de l’Académie Française, faisait partie du cercle des poètes de l’Hôtel Rambouillet tenue par Catherine de Vivonne. Dans ses poèmes, il cultive plus le fond que la forme, ce qui est spécifique au caractère précieux. Ici, il est question des pièces à machines, concept nouveau pour l’époque avec des pièces de théâtres aux effets spéciaux : ils sont nécessaires car les thèmes du théâtre sont tournés vers la Bible et la mythologie. Voiture s’adresse au Cardinal Mazarin, qui est justement à l’origine de l’importation
française de ces pièces d’Italie, notamment Ulysse dans l’Isle de Circé (Abbé Claude Boyer) et Orféo de Rossi, dont il est peut-être question dans le sonnet. Comment le sonnet de Vincent Voiture, éloge au Cardinal Mazarin, se place-t-il entre baroque et préciosité ? On se penche sur l’émerveillement du spectacle pour aboutir à un éventuel éloge du pouvoir.   I. De l’émerveillement du spectacle…   a) Un poème de circonstance   * Titre / article définie « la « désignant peut-être Orféo (contemporain au poème 1647)   * Actualité avec « Mazarin « + démonstratif « ces «   * Côté sensationnel développé : « nouvelle « « miracle « « depuis quand «   * Interrogation rhétorique à valeur exclamative (rhétorique de l’admiration) « quelle « *2, c’est une sorte de critique de la pièce   b) Un spectacle baroque   * Insistance sur les effets de métamorphoses   * Référence à Circé et Armide (magiciennes qui ont métamorphosé des hommes en animaux)   * Champs lexical du changement « changeantes « « différent «   * Opposition du passé/présent « voyait «, « paraissait « / « qui fais que désormais «   * Enumération signalant la métamorphose du paysage « des ports, des ponts, des tours, des jardons spacieux « v10   * Instantanéité « même lieu « « même temps «   * Foisonnement et caractère grandiose (énumération / pluriels hyperboliques
« cent « « mille « « fleurs sans nombre « / chiasme 1er tercet / extrêmes dimensions : - verticale : « globes étoilés « « gouffres profonds « et la notion de vide / -horizontale : « spacieux « « la campagne « « empire «   c) Des procédés baroques ?   * Perte des repères : syntaxe compliquée (2ème quatrain)   * Inversions sujets/verbes (« des globes étoilés les palais")   * Redoublement des sujets (hyperbates v7/8)   * Séparation sujet/verbe par la versification   * Effets de miroir/asymétrie : « fait «/ « fais « « quelles «/ « quels « +chiasme 1er tercet   * Synérèse rime avec diérèse au v11   * Ellipse du v11   * Nombreuses sonorités (allitération et assonance) à l’intérieur des vers   * Mise en question de la frontière illusion/vérité = chute Transition : Voiture est incontestablement marqué par son temps, car l’influence du souffle baroque sur son style est notable avec ce poème. Cependant, on peut demander quels étaient ces intentions à travers ce poème, ci ce n’est un éloge du pouvoir ?   II. Un éloge du pouvoir ?   a) Un sonnet dédié à Mazarin   * 2ème tercet stratégique : usage de la 2ème personne (« fais « apostrophe au cardinal)   * Tournure emphatique : détachement en fin de vers « grand et divin prélat «   * Eloge du personnage politique :   * Périphrase hyperbolique   * Champs lexical
de la distinction « honneurs « / « prélat « / « divin «   * Dernier vers signale l’intention de dépasser l’éloge du théâtre à celui du pouvoir politique   b) La main créatrice et civilisatrice à travers l’éloge du spectacle   * Analogie implicite entre « fait « et « fais «   * Notion de savoir « docte « « savant « = intelligence supérieure à l’origine de la création   * A l’intérieur des périphrases, on trouve l’évocation du pouvoir politique à l’extérieur de celle de la nature : « empire « « palais « « globe « (symbole de la monarchie de droit divin : nature de plus en plus civilisée)   c) Un poème précieux, marqué par l’ambigüité religieuse   * Une recherche de l’effet par l’exagération : hyperboles 1er tercet, métaphore (« vague des airs «), chiasme    * La référence à la création et au caractère divin (« divin prélat «) peut faire penser aux notions bibliques  Conclusion : Dans son sonnet, Voiture cultive la préciosité par l’usage de nombreuses figures de style, rapportant à un baroque de légèreté. Par le biais de ce-dernier, il fait l’éloge des Comédies des Machines, et de leur défenseur, le Cardinal Mazarin. Il admire son pouvoir d’illusion, qui mène à un éloge du pouvoir politique. Or le dernier vers peut être perçu en chute par son ton satirique : Mazarin se soucie-t-il plus du théâtre que de la politique 

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