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Article de presse: Les grandes phases militaires

Publié le 22/02/2012

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18 mars 1962 - Lorsque, le 1er novembre 1954, l'insurrection algérienne éclate, les autorités militaires disposent comme moyens utilisables immédiatement de deux bataillons de parachutistes, de trois bataillons de la 11e DI en pleine réorganisation, d'un bataillon de légion et de deux escadrons blindés. Cependant, la 25e division d'infanterie aéroportée, alertée le 30 octobre, doit arriver de métropole par air et par mer. Les suites immédiates de l'insurrection, écrira plus tard le général Cherrière, commandant interarmées pour le maintien de l'ordre, " font d'abord croire qu'on se trouve en face d'un soulèvement tribal analogue à ceux qui jalonnent notre histoire nord-africaine. On admet donc qu'il suffit pour l'armée de réduire les tribus dissidentes bien localisées, mettant en oeuvre des effectifs très faibles et sans grand appui matériel de l'étranger, et, pour les polices, de maintenir l'ordre ailleurs ". Le général lui-même cédera au bout de quelques mois la place au général Lorillot, qui se trouvera en face non plus seulement de petits groupes locaux, mais d'une organisation de plus en plus solide. Aux quelques unités françaises de novembre 1954 s'ajouteront en 1955 les divisions modernes jusqu'alors affectées à l'OTAN, à commencer par la 7e DMR, suivie des 2e et 4e DIM. Ces grandes unités " reconverties ", c'est-à-dire allégées d'une partie de leur matériel, entreprennent, notamment dans l'Ouest et l'Est algériens, de grandes opérations de bouclage et de ratissage dont les effets sont peu concluants. Dans les Némentchas, quatorze bataillons ramènent une douzaine de prisonniers. Il se confirme que, si les grandes unités motorisées sont mal adaptées aux tâches qui leur sont imparties, les effectifs, eux, sont insuffisants. Le gouvernement de Guy Mollet, devant une situation qui s'est constamment aggravée, décide à Pâques 1956 non seulement d'envoyer en Algérie le contingent-dont de nombreux éléments se trouvent déjà sur place,-mais de rappeler plusieurs classes de disponibles et des réservistes. Les effectifs dépasseront bientôt quatre cent mille hommes. A l'automne 1956, le général Salan succède au général Lorillot, nommé chef d'état-major de l'armée. L'organisation politico-administrative (OPA) du FLN s'est étendue et ramifiée, tandis que l'ALN, en progression constante, forme maintenant des compagnies (katibas) et s'efforce de constituer des bataillons. A la frontière tunisienne, à partir des derniers mois de 1957, des unités de l'ALN nombreuses et bien armées maintiennent par leur présence et leurs harcèlements une pression constante contenue par un barrage électrifié que l'on prolonge progressivement vers le sud et que l'on doublera plus tard d'une seconde ligne située un peu en arrière. L'armée, dans un pays sous-administré, prendra le pas sur les autorités civiles jusqu'en 1959 et devra en outre se charger de tâches extra-militaires de plus en plus nombreuses. A la mi-mars 1961, on aboutira aux chiffres suivants : 2 120 instituteurs et moniteurs militaires instruisent 139 000 élèves, 787 médecins et 298 auxiliaires féminines de l'armée assureront 1 624 000 consultations par mois, 530 chantiers seront protégés, ainsi que 4 000 kilomètres de voies ferrées et 7 500 " points sensibles ", dont 580 exploitations agricoles. La création de sections administratives spécialisées ou urbaines (737 en 1961) exigera 2 076 officiers et sous-officiers. Au cours des années 1956 et 1957, de nombreux secteurs seront provisoirement abandonnés et soumis seulement à des actions aériennes : la carte de l'Algérie se couvre des taches roses des " zones interdites ". Pour arracher au FLN le contrôle des populations, l'armée les regroupe dans des centres où, souvent, pendant de longs mois, les conditions de vie seront très mauvaises. La mesure touchera près de deux millions d'habitants, surtout des femmes, des enfants et des vieillards. Lorsque, en 1961, il fut mis fin à cette politique, 1 625 000 musulmans étaient répartis en 1 881 villages. Alors que Raoul Salan disperse ses forces selon les besoins, en couvrant l'Algérie d'un " quadrillage " qui consomme ses effectifs, le FLN lance en 1956-1957 une offensive terroriste dans les villes. Le général Massu et la 10e division parachutiste, retour de Port-Saïd, livrent la " bataille d'Alger ", où l'on n'observe plus de part et d'autre aucun ménagement dans l'emploi des moyens. Au début de 1958, au prix de très durs combats, les unités aéroportées et la légion brisent dans le Constantinois les tentatives de l'ALN pour former de grandes unités. C'est l'époque des seules " batailles " de type presque classique qui aient été livrées au cours du conflit. Le " plan Challe " L'incident de Sakhiet-Sidi-Youssef, au cours duquel l'aviation française bombarde un village tunisien, montre à quel point la situation est devenue explosive sur le barrage. Au 13 mai 1958, le développement de la puissance militaire de l'ALN a été arrêté. Salan, cependant, ne paraît pas décidé à mener une stratégie offensive. Les tenants de l'action psychologique pensent que les techniques qu'ils ont empruntées au marxisme-léninisme ou mises au point eux-mêmes constituent l'arme de la victoire. Le général Challe rendra leur prééminence aux " guerriers " et à l'offensive. Au début de 1959, il mettra en application le plan qui porte son nom : les frontières tunisienne et marocaine seront solidement tenues, tandis que, d'ouest en est, de l'Ouarsenis au Constantinois, seront menées une série d'opérations de nettoyage. Challe a reformé ses réserves générales (10e et 25e DP, 11e DI) et incorporé à ses effectifs de nombreux éléments musulmans. L'aviation joue un rôle très important dans le dispositif. Le " plan Challe " était l'un des volets d'un diptyque dont l'autre était le " plan de Constantine " et d'heureux résultats sont attendus de cette double initiative. Indéniables dans le domaine militaire, ils ne répondent pas aux espérances sur le plan politique. Le général Crépin, qui succède au général Challe après l'affaire des barricades, n'apporte aucune modification essentielle aux plans de son prédécesseur et continue de s'appuyer sur les réserves générales. Son successeur, le général Gambiez, ordonnera la poursuite des combats jusqu'à ce qu'intervienne l'interruption des opérations offensives. Cependant, lorsque les pourparlers de Lugrin sont interrompus, les combats reprennent, à une échelle d'ailleurs limitée. Si le prestige du FLN demeure à peu près intact, l'ALN n'est guère parvenue à constituer d'unités supérieures à la katiba. Après le putsch, le général Ailleret aura pour mission de regrouper progressivement des forces éparpillées dans plus de cinq mille postes tout en continuant de tenir solidement les barrages. JEAN PLANCHAIS Le Monde du 20 mars 1962

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