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De l'avarice (KANT)

Publié le 22/02/2012

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kant
La condamnation de ce vice peut servir d'exemple pour montrer clairement combien il est inexact de définir les vertus ainsi que les vices par le simple degré, et combien est oiseux le principe d'Aristote, que la vertu consiste à tenir le milieu entre deux vices. Si en effet je considérais la bonne économie domestique comme un juste milieu entre la prodigalité et l'avarice, et que ce milieu fût déterminé par le degré, on ne pourrait aller d'un vice au vice contraire, (contrarie opposito) qu'en passant par la vertu; celle-ci ne serait plus alors qu'un vice diminué ou plutôt un vice défaillant, et la conséquence serait que, dans le cas présent, le véritable devoir de vertu consisterait à ne faire aucun usage des moyens de jouir de la vie. Ce n'est pas la mesure de la pratique des maximes morales, mais leur principe objectif qu'il faut prendre pour criterium quand on veut distinguer un vice de la vertu. — La maxime de la cupidité prodigue est de ne se procurer tous les moyens de bien vivre qu'en vue de la jouissance. — Celle de l'avarice est au contraire d'acquérir et de conserver tous ces moyens, en se proposant uniquement pour but la possession et en s'interdisant la jouissance. Le caractère propre de cette dernière espèce de vice est ce principe arrêté de posséder les moyens d'arriver à toutes sortes de fins, mais à la condition de renoncer à faire usage d'aucun, et de se priver de tout ce qui peut rendre la vie agréable et douce : ce qui est directement contraire au devoir envers soi-même, au point de vue de la fin. La prodigalité et l'avarice ne diffèrent donc pas simplement par le degré, mais spécifiquement, c'est-à-dire par les maximes opposées sur lesquelles elles se fondent. KANT.

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