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GEOMETRIE ET PHYSIQUE

Publié le 22/02/2012

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physique

Source: http://www.peiresc.org/DINER/Lexique.pdf

 

Les rapports entre la géométrie et la physique sont aussi anciens que les débuts de toute culture, dans la mesure où leur objectif commun est la représentation globale des formes dans l'espace. C'est cette problématique de la globalité qui scelle l'alliance entre physique et géométrie, en introduisant aux fondements de chacune, des objets abstraits communs comme la droite, le plan ou la sphère, et en mettant au premier plan l'importance des transformations dans l'espace (symétries) dans l'expression des lois fondamentales. La mécanique classique concrétise en son coeur un certain nombre de concepts géométriques. Elle exprime à l'aide de vecteurs la loi fondamentale de la dynamique qui relie l'accélération aux forces agissantes. Ce mode de représentation géométrique de l'action physique est bien adapté, car il permet de rendre compte de sa direction, de son intensité et de son point d'application. L'existence de quantités conservées (lois de conservation), comme l'énergie, l'impulsion ou le moment cinétique sont liés à l'existence de propriétés de symétrie spécifiques. La mécanique classique a joué un rôle déterminant dans la formulation du calcul des variations qui vise à déterminer la forme optimale d'un objet mathématique. La courbe de la trajectoire y est déterminée par sa forme globale et non pas par la position de ses points. Mais la mécanique classique en se généralisant dans la théorie des systèmes dynamiques a popularisé l'emploi d'un espace de représentation abstrait, l'espace de phase, qui présente une structure géométrique particulière due à la présence de variables qui se présentent sous forme de paires canoniques conjuguées : la structure symplectique. On a ainsi pu dire que la mécanique hamiltonienne est une géométrie dans l'espace de phase, une géométrie symplectique. La mécanique classique des milieux continus et l'hydrodynamique sont à l'origine d'une notion nouvelle, celle de champ qui va s'avérer, en particulier lors du développement de l'électromagnétisme un objet géométrique particulièrement riche. L'électromagnétisme est fondé sur le couplage de deux champs de vecteurs, le champ électrique et le champ magnétique, qui s'exprime naturellement à l'aide d'opérations différentielles vectorielles, qui donnent aux équations de Maxwell leur identité particulière, comme équations du champ électromagnétique. L'invariance des équations de Maxwell par le groupe de transformation de Lorentz ouvre la voie à la Relativité restreinte. L'électromagnétisme et la relativité restreinte inaugurent un mouvement plus vaste que l'on peut appeler « géométrisation de la physique ». L'espace-temps inaugure une géométrie nouvelle quadridimensionnelle non euclidienne. La théorie de la relativité générale d'Einstein et les travaux de mécanique céleste de Poincaré sont aussi à l'origine de ce mouvement. En simplifiant à l'extrême on peut dire qu'il y a là un rapport nouveau entre la physique et les mathématiques. D'une conception locale qui s'exprime par l'analyse mathématique la physique évolue vers des conceptions globales qui se décrivent mieux en terme de géométrie et de topologie. Le rôle croissant de la théorie des groupes dans la physique contemporaine n'est qu'une première étape dans cette évolution. La relativité générale, avant de jouer réellement un rôle dans le développement de la cosmologie, a servi de laboratoire pour l'élaboration de conceptions de la physique comme une géométrie, ou bien encore de la géométrie comme une branche de la physique. On peut dire d'une manière imagée que l'espace y indique à la matière comment se déplacer, ou encore que la matière indique à l'espace comment se courber. Ou comme le disait encore René Thom, la matière est une maladie de l'espace. C'est naturellement à propos des problèmes d'espace temps et de gravitation que la géométrie a pris une importance considérable dans la physique. L'idée que toute quantité physique doit être descriptible par un objet géométrique et que les lois de la physique doivent toutes se ramener à des relations géométriques trouve ses fondements intellectuels dans le programme d'Erlangen de Félix Klein (1872), établissant la relation entre géométrie et groupes de transformation. Dans la doctrine géométrodynamique de Wheeler, il n'y a rien dans le monde excepté un espace vide courbe, et la matière, les charges, les champs ne sont que des manifestations de la courbure de l'espace. Résurgence de la doctrine de Descartes sur l'étendue comme une substance ? Revanche du géomètre sur l'analyste comme les opposaient Poincaré ?. En introduisant la notion de nombre quantique qui se conserve au cours des interactions, la mécanique quantique introduit en plus des symétries d'espace temps la notion de symétrie interne et d'espace interne. C'est là le début d'un intense intérêt des physiciens pour la théorie des groupes, une particule élémentaire étant associée à une représentation du groupe de symétrie interne qui dépend de l'interaction étudiée. Cela a suggéré d'ajouter aux variables de position dans l'espace temps un paramètre d'espace interne, la jauge, et d'introduire la notion d'invariance de jauge des lois physiques assurée par un champ de compensation locale, le champ de jauge. Il est apparu que les théories de champ de jauge mettaient en jeu les notions de la géométrie différentielle moderne, ce qui a contribué à mettre celle ci au coeur de la physique théorique contemporaine. Un nouveau type d'application de la géométrie à la physique est né, avec l'utilisation de la géométrie différentielle moderne dans la description des champs de jauge, et son extension à des problèmes variés dans la théorie des cristaux liquides, la théorie des transitions de phase, la théorie de la superfluidité ou l'étude de certaines équations d'onde non linéaires importantes en physique. Le rôle croissant de la géométrie en physique contribue à renforcer le sentiment d'objectivité qu'assure notre confiance dans l'intuition spatiale si abstraite soit elle. Il y a là un rapport nouveau entre la physique et les mathématiques. D'une conception locale qui s'exprime à travers l'analyse mathématique la physique évolue vers des conceptions globales qui se décrivent mieux en terme de géométrie et de topologie. Le rôle croissant de la théorie des groupes n'est qu'une première étape dans cette évolution.. La physique change d'esprit, persuadée que la réponse aux problèmes fondamentaux viendra de la géométrie. On peut en douter, mais c'est dans ce sens en tout cas que se comprennent tous les programmes de théories unitaires en physique.

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