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Idées directrices pour une phénoménologie - Edmund Husserl: La " réduction phénoménologique "

Publié le 22/02/2012

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husserl

Il est maintenant clair qu'en fait, à l'opposé de l'attitude théorique naturelle dont le monde est le corrélat, une nouvelle attitude doit être possible, qui alors même que la nature physique tout entière a été mise hors circuit, laisse subsister quelque chose, à savoir tout le champ de la conscience absolue. Au lieu donc de vivre naïvement dans l'expérience et de soumettre l'ordre empirique, la nature transcendante, à une recherche théorique, opérons la “ réduction phénoménologique ”. En d'autres termes au lieu d'opérer de façon naïve, avec leurs thèses transcendantes, les actes qui relèvent de la conscience constituante de la nature et nous laissent déterminer, par des motivations qui y sont incluses, à des positions de transcendance toujours nouvelles, mettons toutes ces thèses “ hors de jeu ” ; nous n'y prenons plus part : nous dirigeons notre regard de façon à pouvoir saisir et étudier théoriquement la conscience pure dans son être propre absolu. C'est donc elle qui demeure comme le résidu phénoménologique cherché ; elle demeure, bien que nous ayons mis “ hors circuit ” le monde tout entier, avec toutes les choses, les êtres vivants, les hommes, y compris nous-mêmes. Nous n'avons proprement rien perdu, mais gagné la totalité de l'être absolu lequel, si on l'entend correctement, recèle en soi toutes les transcendances du monde, les “ constitue ” en son sein.

 

Élucidons ce point dans le détail. Gardons l'attitude naturelle et opérons purement et simplement tous les actes grâce auxquels le monde est là pour nous. Nous vivons naïvement dans le percevoir et l'expérimenter, dans ces actes thétiques au sein desquels des unités de chose nous apparaissent, non seulement nous apparaissent mais nous sont données avec la marque du “ présent ”, du “ réel ”. Passant aux sciences de la nature, opérons des actes de pensée réglés selon la logique expérimentale, au sein desquels ces réalités prises comme elles se donnent, sont déterminées en termes de pensée, au sein desquels également on conclut à de nouvelles transcendances en prenant pour fondement ces transcendances déterminées par l'expérience directe.

 

Plaçons-nous maintenant dans l'attitude phénoménologique ; interceptons dans son principe général l'opération de toutes ces thèses cogitatives ; c'est-à-dire “ mettons entre parenthèses ” celles qui ont été opérées et “ ne nous associons plus à ces thèses ” pour les nouvelles investigations : au lieu de vivre en elles, de les opérer, opérons des actes de réflexion dirigés sur elles ; nous les saisissons alors elles-mêmes comme l'être absolu qu'elles sont. Nous vivons désormais exclusivement dans ces actes de second degré dont le donné est le champ infini des vécus absolus — le champ fondamental de la phénoménologie.

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