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La magie du verbe : description. VICTOR HUGO.

Publié le 17/07/2010

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hugo

  Car le mot, qu'on le sache, est un être vivant.

 La main du songeur vibre et tremble en l'écrivant ;  La plume, qui d'une aile allongeait l'envergure,  Frémit sur le papier quand sort cette figure,  Le mot, le terme, type on ne sait d'où venu,  Face de l'invisible, aspect de l'inconnu ;  Créé, par qui ? forgé, par qui ? jailli de l'ombre.  Montant et descendant dans notre tête sombre.  Trouvant toujours le sens comme l'eau le niveau,  Formule des lueurs flottantes du cerveau....  0 main de l'impalpable ! ô pouvoir surprenant !  Mets un mot sur un homme, et l'homme frissonnant  Sèche et meurt, pénétré par la force profonde ;  Attache un mot vengeur au flanc de tout un monde,  Et le monde, entraînant pavois, glaive, échafaud,  Ses lois, ses mœurs, ses dieux, s'écroule sous le mot.  Cette toute-puissance immense sort des bouches.  La terre est sous les mots comme un champ sous les  [mouches.  Le mot dévore, et rien ne résiste à sa dent.  A son haleine, l'âme et la lumière aidant,  L'obscure énormité lentement s'exfolie.  Il met sa force sombre en ceux que rien ne plie ;  Caton a dans les reins cette syllabe : NON....  Oui, tout-puissant ! tel est le mot. Fou qui s'en joue !  Quand l'erreur fait un noeud dans l'homme, il le dénoue.  Il est foudre dans l'ombre et ver dans le fruit mûr.  Il sort d'une trompette, il tremble sur un mur,  Et Balthazar chancelle, et Jéricho s'écroule.  Il s'incorpore au peuple, étant lui-même foule.  Il est vie, esprit, germe, ouragan, vertu, feu ;  Car le mot, c'est le Verbe, et le Verbe, c'est Dieu.

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