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Le Théâtre De L'Absurde Dans Fin De Partie De Beckett

Publié le 20/07/2010

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Dans Fin de Partie, pas d'actes, pas de scènes, donc pas d'ellipse. Le spectateur n'a aucun repère temporel fiable, aussi bien par cette construction de la pièce, que par les dialogues et les événement de la pièce elle-même. On pourrait croire au début, que l'on va retrouver une intrigue s'écoulant sur 24h par la symbolique de début de journée qui démarre la pièce : Clov tire les rideaux, enleve les draps, Hamm en robe de chambre se réveille et baille, Nagg est coiffé d'un bonnet de nuit - d'ailleurs, la notion d'une journée (encore une, comme les autres) apparaît à diverses reprises dans les dialogues (p.28 « hier «, p.47 « tous les jours «, p.58 « aujourd'hui «, p.62 « c'est une journée comme les autres «) - , or, plus cette notion de journée semble claire par certaines expressions, plus on s'en éloigne par d'autres. L'heure, par exemple, est à « Zéro «, tout le temps, « la même que d'habitude « (p.16), et il y a beau avoir un semblant de début de journée, Hamm annonce à peine deux pages plus tard qu'il devrait se coucher (p.15), et ordonne à Clov de le préparer à la page 16, et 17. Dix pages après, Hamm affirme déjà qu'ils sont en « fin de journée « (p.26). Ajouté à cela, la notion de journée « comme les autres « (p.26, 62) est reprise. Les jours se succèdent, mais se répètent à l'identique ; « hier « n'a plus de sens (p.60), le temps semble figé dans la fin, la notion de journée, de temps, de 24h n'importe plus. Paradoxalement, la didascalie « un temps « se retrouve dans le texte au moins 400 fois, et une chose principale semble rythmer les journées, outre les nombreux rituels répétitifs de tous les jours (exemple : les regards à l'extérieurs, la promenade p.39, « l'heure de (l')histoire « p.65), c'est l'heure du calmant (qui semble indiquer le soir (p.38), mais arrive pourtant à la page 92, alors que le soir est annoncé page 26, puis page 46).    Ensuite, il n'y a pas vraiment de lieu. Le décor de la scène ne représente rien, il est vide, simple, minimaliste. Le cadre retournée sur le mur de droite semble être une mise en abîme, symbolique de cette volonté de non-représentation. La « maison « (p.51, 54), pourvue de la pièce vide et grisâtre que nous voyons, et d'une cuisine hors scène (de 3 mètres cubes…p.14), se trouve au milieu de nulle part, entre terre et mer, avec le vide, la mort et la désolation de tout côtés. « Il n'y a plus de nature « (p.23) dit Clov. L'extérieur est « mortibus « (p.44), « zéro « (p.43-44), il n'y a « rien « (p.100). La pièce ne nous informe en rien sur un quelconque nom de région, de pays, de continent ; Pas d'indicateur de température, de nature du paysage (à part « zéro «), rien. Les seuls raccords à un paysage plus réaliste, et qui aurait plus probablement une existence, n'en a pas, et proviennent seulement de l'imagination de Hamm (p.31, 50, 54, 69), ou de l'évocation du passé (ex : Lac de Côme (Italie), p.34, et Ardennes, p.29).    Après quoi, il n'y a pas non plus d'unité d'action, car il n'y a pas vraiment d'action… La pièce subit une absence de réelle intrigue. Pas de péripéties apparentes, pas de fil directeur. L'histoire n'est que celle d'une répétition continuelle d'une soi-disant journée. Il ne semble y avoir aucun but dans l'histoire, sinon la fin, et le départ de Clov. C'est à dire, ce n'est ni l'histoire d'une romance, ou d'une enquête, … Rien avec une intrigue concrète, où il y aurait un sujet principal d'action au début, résolu au dénouement. Les événements ne semblent pas suivre un schéma logique, paraissent sans rapport, sans utilité réelle. Ils arrivent comme ça, subitement, puis on en parle plus. Par exemple, les brèves découvertes de formes de vie restantes, soit le rat, la puce, et l'enfant (p.48, 73, 101), et l'ajout de personnages inconnus, évoqués un instant, disparus l'instant d'après, comme le médecin (p.38), la mère Pegg (p.58, 96) (et l'enfant, qui semble mort, p.101).    Avec ça, la règle de Vraisemblance, est également négligée. La situation de fin du monde dans laquelle sont les personnages n'est pas forcément incroyable, mais elle est mise en scène de façon abstraite, et informe. L'absence de lieu et de temps, l'heure zéro, le monde zéro, est également invraisemblable. En plus de cela de nombreux contresens, comme l'évocation d'un souvenir par Nell, qui se rappelle du fond de l'eau, si profond, « le fond si blanc, si net « (p.34) (les profondeurs de l'eau sont noires, et troubles), ainsi que la puce, et le rat, qui sortent de nulle part, alors qu'aucune forme de vie n'était sensé avoir subsisté, et le fait que ce soit Clov qui aille chercher la nourriture, alors qu'il ne connaît pas la combinaison du buffet (p.53, 20).    Enfin, la règle de bienséance est aussi ignorée, avec le sang sur le mouchoir de Hamm dès le début, et la mort de Nell sur scène.    En second lieu, la pièce présente de nombreuses situations incohérentes, et comiques, aussi bien sur le plan du langage, que des actions, des événements.    D'une part, donc, Hamm et Clov ne cesse de se plaindre de leur situation, de l'état mort du monde et de la vie, et pourtant, s'activent à détruire toute subsistance de vie qu'il rencontrerait (anéantir la puce, tuer le rat, exterminer l'enfant). Hamm se montre aussi soulagé, lorsqu'il remarque que rien n'a changé à l'extérieur (p.45, le fanal). Egalement, le problème du temps évoqué plus haut, du levé et du couché de Hamm, la fin de journée en page 26, et pourtant le ciel qui reste gris, continuellement. L'incohérence de l'histoire du buffet s'ajoute aussi, avec l'apparition soudaine et inexpliquée du rat, de la puce, et de l'enfant.    Avec ces incohérences de situations, viennent des incohérences de langage. Une en particulier se répète souvent, c'est le fait qu'un personnage pose une question, que l'autre réponde avant d'avoir la fin, et la demande après (p.17, p.54, p.29). Il y a aussi Clov, qui ne pourrai « bientôt plus penser « (p.64) parce qu'il a « mal aux jambes «, et une contradiction, lorsqu'il dit à Hamm que le chien en peluche n'a pas pu bougé, car c'est un faux, pour ensuite ajouté qu'« il s'est couché « (p.76).    D'autre part, les situations à caractère comique sont abondantes.

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