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L'Etat doit-il satisfaire l'opinion publique?

Publié le 22/07/2010

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Si l’on considère l’Etat comme une organisation politique et juridique et non dans le sens géographique, on peut s’apercevoir qu’il est en étroite relation avec la société, car celle-ci est, en outre la cause de son existence. Une société est un ensemble d’individus qui cohabitent dans un même espace .Ils ont par conséquent besoin d’une certaine structure et de règles pour vivre en paix, et c’est cette structure que doit leur apporter l’Etat.  L’Etat résultant du choix d’une majorité impliquée dans la réalité, doit il lui donner satisfaction, au risque de compromettre son impartialité, et de décevoir certains.  Nous allons d’abord étudier l’Etat, choix d’une majorité, et ce que cela implique, puis nous verrons comment l’Etat prend du recul face aux attentes de l’opinion publique, et enfin nous nous pencherons sur l’opinion publique et sur ce pourquoi l’Etat ne peut la satisfaire.    L’Etat résulte du choix d’une majorité. Dans nos démocraties européennes, on ne conçoit pas de vivre dans un pays qui ne disposerait pas d’un véritable Etat. Cet Etat, ce sont les citoyens qui le construisent et le développent. Le vote permet à ces hommes et à ces femmes de s’exprimer et de choisir celui qu’ils pensent pouvoir les représenter, selon leurs idées Hobbes exprime cela de façon plus simple, pour lui, on s'assemble pour choisir un chef et c'est le début de l'Etat. L’Etat est donc constitué suite à un désir, un besoin de ceux que l’on pourrait appeler: « l’opinion publique «. Le peuple fait l’Etat, il le façonne de façon à ce qu’il réponde à ses attentes, ses besoins, ses désirs, tout en gardant un maximum d’équité, et en respectant les principes de la Déclaration des Droits de l’Homme de 1948.  Cependant, l’Etat ne représente pas toujours réellement l’opinion publique, et on peut en déduire que de cette manière, il ne répond pas aux attentes du peuple. On peut se souvenir de la célèbre phrase du Roi Louis XIV : « L’Etat c’est moi! «. Or durant cette époque, en France, régnaient famines, maladies et profondes inégalités sociales qui touchaient surtout la majorité pauvre de la population : le Tiers Etat. En effet, malgré le fait que cette classe rassemblait plus des 9\10èmes de la population, elle n’avait pas son mot à dire dans les affaires de l’Etat et n‘était pas non plus au courant de ce que le Roi et ses ministres décidaient pour elle. Outre cela, on peut penser qu’un seul homme, n’ayant même pas été choisi par son peuple, n’a pas la légitimité, ni les compétences nécessaires pour comprendre et satisfaire son peuple. Un seul monarque, disposant d’un pouvoir absolu, peut très bien arriver à se faire respecter de son peuple (par la force), sans réellement améliorer les conditions de vie de celui-ci.  On en arrive alors à l’idée que l’Etat a des devoirs envers la société qu’il dirige. Si l’on en revient à une époque plus récente, on peut dire que de nos jours, nous jugeons qu’il est légitime pour un citoyen de connaître les lois que votent ses représentants, les mesures prises par l’Etat, ses projets, etc.… l’Etat doit rendre des comptes à tous les citoyens, et il en va de son devoir d’informer le peuple des mesures qu’il prend. Mais outre ce devoir d’information, il a également un devoir de satisfaction envers ses citoyens. Comme l’a dit le philosophe Maritain, dans L’Homme et l’Etat : « l’Etat est une partie spécialisée dans les intérêts de tout «. Il doit donc tenir compte des intérêts du peuple, et faire au mieux pour améliorer les conditions de vie de celui-ci, car c’est pour cela notamment qu’il a été créé.    En effet, il est parfaitement impossible pour tous les citoyens d’un même pays de partager les mêmes idées et de faire les mêmes choix. Nous différons tous les uns des autres et il n’existe pas en ce monde deux personnes strictement identiques, il est donc logique que nos choix en soient de même. Prenons l’exemple de la réforme sur les lois du divorce très discutées dans les années 1970. Le Doyen Carbonnier a dit à ce propos : « Il y a des sensibilités diverses au divorce (...) L'opinion publique, de son côté, est divisée face aux idées de réforme. On discerne un bloc jeune (effet d'âge ou de génération) disposé à aller très loin ; un bloc défiant à l'égard de toute innovation ; et, entre les deux, un centrisme «. Cette remarque prouve donc qu’en ce qui concerne les décisions impliquant une grande partie de la population, il n’existe non pas une, mais bel et bien plusieurs opinions publiques. Une femme qui ne s’entend plus avec son mari peut éprouver la nécessité d’une telle réforme, tandis qu’une autre, peut être plus traditionnaliste sera contre ce projet.  On peut donc en déduire une chose, c’est que l’Etat ne peut pas satisfaire tout le monde. Quand on emploie l’expression « opinion publique «, on fait référence à une majorité de gens et on passe sous silence la minorité. Les lois édictées par l’Etat sont créées pour cette majorité. Si l’on prend le système électoral français : les citoyens élisent au suffrage universel un Président, qui se constitue ensuite un gouvernement, mais aussi des sénateurs et des députés. Tous ces hommes et toutes ces femmes sont les représentants d’une majorité qui a voté pour eux, qui les a choisis parmi plusieurs autres. Le problème de la minorité subsiste alors, car celle-ci peut se trouver en désaccord avec les décisions prises par un Etat qu’elle n’a pas choisi et encore moins voulu. L’Etat, ne peut donc pas faire l’unanimité et il est normal qu’il suscite chez certains du mécontentement.  Pour être plus précis, on peut dire qu’en satisfaisant les attentes d’une certaine partie de la population, l’Etat lèse l’autre partie. Par exemple, lorsque l’Etat décide de faire construire un nouvel aéroport et que cela entraine le départ de personnes vivant sur la zone prévue pour la construction, ce projet va entrainer de nombreux mécontentements. Il est vrai que cette installation peut être très bénéfique pour l’économie de la région, et qu’elle propose un nouveau moyen de transport qui n’y était peut être pas présent auparavant. Cependant on se doute alors que ceux qui ont été obligés de partir ne pensent certainement la même chose. Tout en privilégiant une majorité de la population (que l’on pourrait appeler l’opinion publique), l’Etat défavorise une minorité qui n’a pas son mot à dire.    L’Opinion publique, lorsqu’elle fait confiance à l’Etat, place en lui certaines attentes, certaines espérances. Nombreux sont ceux qui espèrent que l’Etat va les, aider, faire en sorte qu’ils aient une vie meilleure, un travail, des aides lorsqu’ils n’ont pas d’argent etc.… Ainsi ils attendent beaucoup de cet Etat qui, selon eux doit légitimement leur donner satisfaction. Dans le cas contraire, ils n’hésitent pas à protester, manifester pour obtenir ce qu’il veulent, souvent car leur intérêt personnel est en jeu, mais aussi parfois de manière plus altruiste. Ainsi, Durkheim a dit dans Montaigne et Rousseau précurseurs de la sociologie : « Si la communauté veut être obéie, ce n’est pas parce qu’elle commande, mais parce qu’elle commande le bien commun «. Le peuple, attend donc de ses représentants qu’ils fassent tout ce qui est en leur pouvoir pour le « bien commun « de la société.  Cependant ce n’est pas parce que le peuple désire telle ou telle réforme que l’Etat obéit sans réfléchir. L’Etat étant composé d’un grand nombre de fonctionnaires, ceux-ci se concertent avant de prendre des décision. Ils prennent du recul, envisagent le futur de pays, si jamais ils créaient telle ou telle loi, etc.… L’Etat ayant cette pression de satisfaire son peuple, il va choisir ce qu’il pense être le mieux pour l‘ensemble des citoyens , tout en prenant assez de distance pour ne pas réagir de façon impulsive, et léser certains en trop favorisant d’autres. Le peuple a besoin de cette impartialité (même si elle n’est que relative), pour juger de la façon la plus objective de ses dilemmes, et ensuite prendre ce qu’il jugerait être la meilleure solution, pour tous les citoyens. Ainsi, malgré une forte opposition, la loi autorisant l’IVG a été adoptée en 1975, car l’Etat l’a jugé bénéfique, voire indispensable au bien être et a la sécurité des femmes, car auparavant certaines se faisaient avorter dans des conditions déplorables, mettant parfois en jeu leur propre vie.    On peut en conclure que l’Etat et l’opinion publique se complètent. Le premier en restant objectif face aux attentes du second et en faisant ce qu’il juge être le meilleur pour tous, et le second, en imposant sa volonté lorsque cela est nécessaire, en protestant lorsqu’il n’accepte pas les décisions de l’Etat. Pourtant, il est évident que l’Etat ne peut satisfaire tous ces citoyens, et cela est a prendre comme une fatalité immuable. L’Etat a donc des devoirs envers l’opinion publique, dont celui de lui donner satisfaction, car c‘est elle qui l‘a élu, cependant le résultat ne sera jamais irréprochable, car rien ne peut être parfait.

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