PODCAST: Joachim DU BELLAY: Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage
Publié le 30/06/2010
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Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage, Ou comme cestuy-là qui conquit la toison, Et puis est retourné, plein d'usage et raison, Vivre entre ses parents le reste de son âge ! Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village Fumer la cheminée, et en quelle saison Reverrai-je le clos de ma pauvre maison, Qui m'est une province, et beaucoup davantage ? Plus me plaît le séjour qu'ont bâti mes aïeux, Que des palais Romains le front audacieux, Plus que le marbre dur me plaît l'ardoise fine : Plus mon Loir gaulois, que le Tibre latin, Plus mon petit Liré, que le mont Palatin, Et plus que l'air marin la doulceur angevine.
«
Jason, parti à la conquête de la légendaire Toison d'or;
Ulysse, surtout.
Celui-ci est tout au long des Regrets là
référence de du Bellay.
Il l'évoque ainsi, en des termes
extrêmement proches, au sonnet 130':
« Et je pensais aussi ce que pensait Ulysse,
Qu'il n'était rien plus doux que voir encore un jour
Fumer sa cheminée, et après long séjour
Se retrouver au sein de sa terre nourrice.
~
On connaît les péripéties essentielles que relate le
poète grec Homère dans L'Iliade et surtout dans
L'Qdyssée.
Prince grec, Ulysse a pris part à la guerre.
contre Troie.
C'est lui qui a été à l'origine de la ruse du
cheval de bois qui permet la prise de la ville après dix
ans de combat.
Poursuivi par la colère de Poséidon, il
lui faut cependant errer dix nouvelles années sur la mer
avant de pouvoir rentrer à Ithaque où- l'attend, sous la
menace des prétendants qu'il lui reste à défaire, son
épouse, la fidèle Pénélope.
Ce que du Bellay retient du mythe d'Ulysse, c'est
l'image du navigateur éloigné vingt ans de sa terre
natale et retrouvant enfin celle-ci au terme de son
voyage.
Pourquoi cette image? C'est que l'expérience
de l'exil - littéraire et perso_nnel .,...._ est au cœur _des
Regrets: du Bellay a vécu quatre ans à Rome entre
1553 et 1557, assurant la fonction de secrétaire- -
intendant auprès de son parent le cardinal du Bellay.
Ce séjour, il l'a vécu ou du moins il le présente comme.
un_ épisode douloureux où, coupé de tout ce qu'il a été
et de tous ceux qu'il a connus, il lui faut dans la
solitude et la détresse inventer un nouveau langage
poétique.
Comme il le dit dans ce célèbre sonnet,
Rome, avec toute sa grandeur, lui est de peu de prix
en regard de sa terre natale, l'Anjou.
Tel Ulysse, du
Bellay n'aspire qu'à un retour qui- le délivrerait de la
solitude et de l'exil.
-.
»
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