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Souvenir d'enfance Samuel BECKETT

Publié le 25/03/2020

Extrait du document

beckett

Samuel BECKETT 1906 - 1989

Malone meurt (1951)

Le narrateur, aux derniers instants de sa vie, se souvient. Quand je m’arrête, comme tantôt, les bruits reprennent avec une force étrange, ceux dont c'est l’heure. De sorte qu'il me semble retrouver l’ouïe de ma jeunesse. Alors dans mon lit, dans l’obscurité, les nuits de tempête, je savais faire la part, dans le hurlement du dehors, des feuilles, des branches, des troncs gémissants, de l'herbe même et de la maison qui m’abritait. Chaque arbre avait sa façon de crier, comme par temps calme son murmure. J'entendais au loin le portail en fer tirer sur ses piliers et s’entrechoquer ses battants à claire-voie, par où s' engouffrait le vent. Et il n’était jusqu’au sable de l'allée qui n’eût sa voix. La nuit sans souffle pour moi était une autre tempête, faite d’innombrables halètements, que je m'amusais à dépister. Oui, je me suis beaucoup amusé avec leur soi-disant calme, jeune. Le bruit que je préférais n’avait rien de noble. C'était l’aboiement des chiens, la nuit, dans lès petits hameaux accrochés aux flancs de la montagne, où vivaient les casseurs de pierres, depuis des générations. Il me parvenait, à moi dans la maison dans la plaine, sauvage et flûté, à peine perceptible, vite las. Les chiens de la vallée répondaient, de leur grosse voix pleine de crocs, de mâchoires et de bave.

Malone meurt, Éd. de Minuit.

Quel type de souvenirs revient à la mémoire du narrateur? • Quel rôle joue la sensation dans cet univers? • Comment s'exprime l'opposition entre le présent et le passé ?

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