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TEXTES DE REFERENCE: La conscience comme spécificité humaine ?

Publié le 25/07/2010

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conscience

"Quelle est donc la différence essentielle entre l'homme et l'animal ? La plus simple et la plus générale des réponses à cette question est aussi la plus populaire : c'est la conscience. Mais la conscience au sens strict, car la conscience entendue comme sentiment de soi, capacité de distinguer les objets sensibles, de percevoir et même de juger des choses extérieures d'après des caractères sensibles déterminés, une telle conscience ne peut être refusée à l’animal. Mais la conscience au sens le plus strict n'existe que pour un être qui a pour objet sa propre espèce, sa propre essence. L'animal est sans doute objet pour lui-même en tant qu'individu (et c'est pourquoi il a le sentiment de soi), mais non en tant qu'espèce (et c'est pourquoi il lui manque la conscience, dont le nom vient de science). Là où il y a conscience, il y a capacité de science. La science est la conscience des espèces. Dans la vie, nous avons affaire à des individus, dans la science à des espèces. Or seul un être qui a pour objet sa propre espèce, sa propre essence, est susceptible de constituer en objets, selon leurs significations essentielles, des choses et des êtres autres que lui."    Feuerbach, L’essence du christianisme, 1841, Introduction, chap. 1.    "Radicale aussi, par conséquent, est la différence entre la conscience de l'animal, même le plus intelligent, et la conscience humaine. Car la conscience correspond exactement à la puissance de choix dont l'être vivant dispose ; elle est coextensive à la frange d'action possible qui entoure l'action réelle : conscience est synonyme d'invention et de liberté. Or, chez l'animal, l'invention n'est jamais qu'une variation sur le thème de la routine. Enfermé dans les habitudes de l'espèce, il arrive sans doute à les élargir par son initiative individuelle ; mais il n'échappe à l'automatisme que pour un instant, juste le temps de créer un automatisme nouveau : les portes de sa prison se referment aussitôt ouvertes ; en tirant sur sa chaîne il ne réussit qu'à l'allonger. Avec l'homme, la conscience brise la chaîne."    Bergson, L'évolution créatrice, 1907, P.U.F., 1998, p. 264.    "Certains animaux ont sans aucun doute une personnalité ; ils possèdent quelque chose d'analogue à la fierté et à l'ambition, et ils apprennent à réagir à un nom. La conscience de soi humaine, en revanche, est ancrée dans le langage et (explicitement comme implicitement) dans des théories formulées. Un enfant apprend à utiliser son nom pour lui-même et, finalement, à employer un mot comme « ego « ou « je, «, et il en apprend l'usage avec la conscience de la continuité de son corps et de son moi […]. La grande complexité et la non-indépendance de l'âme humaine, ou de l'ego humain, sont particulièrement manifestes quand on considère qu'il existe des cas où des personnes ont oublié qui elles sont ; elles ont oublié tout ou partie de leur histoire passée, tout en ayant conservé, ou peut-être recouvré, une partie de leur ego. Dans un certain sens, leur mémoire n'a pas disparu, car elles se souviennent de la façon de marcher, de manger, et même de parler. Mais elles ne se souviennent pas qu'elles viennent de Bristol, ou alors de leur nom et de leur adresse. Comme elles ne savent plus rentrer chez elles (ce que les animaux savent faire en principe), leur conscience de soi est même tombée en deçà du niveau normal de la mémoire animale. Mais si elles n'ont pas perdu la faculté de parler, une conscience humaine supérieure à celle de l'animal est demeurée intacte."    Karl Popper, Toute vie est résolution de problèmes (1994), trad. CI. Duverney, Actes Sud, 1997, pp. 90-91.

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