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L'abbé Montfaucon de Villars: CONTRE LES PENSÉES

Publié le 12/07/2011

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En 1671, l'abbé Montfaucon de Villars propose dans son Traité de la Délicatesse une sévère critique de la méthode apologétique de « Paschase « (c'est-à-dire Pascal).

Comprenez-vous bien la conséquence de ce mépris que vous faites des raisons métaphysiques, et les suites de cet aveu si surprenant que vous ne vous sentiriez pas assez fort pour trouver dans la Nature de quoi convaincre les athées ? que nous sommes dans un désespoir éternel de connaître le principe de toutes choses, et que les preuves naturelles égarent l'esprit ? Paschase, voulez-vous fonder une secte contre le raisonnement en faveur de l'instinct naturel ? Voulez-vous renverser les bancs de Sorbonne, et démolir les Universités ? Ou plutôt avez-vous résolu de faire des athées, sous prétexte de les combattre ? Quoi, vous leur avouez qu'il n'y a rien dans la Nature qui leur prouve invinciblement la Divinité ; et pat une expression terrible qui les confirmera d'une étrange sorte dans leur insensée opiniâtreté, vous dites que l'esprit humain est dans un désespoir éternel de connaître le principe de toutes choses ? Certainement quand la chose serait ainsi et que la Nature serait aussi muette que vous la faites, l'art et le bon sens voudraient que vous dissimulassiez ce silence aux athées ; et que vous ne donnassiez pas lieu de dire à ceux qui entendent cette voix puissante de la Nature qui prêche partout son principe, que vous êtes du nombre de ces sourds volontaires ou que vous voulez les favoriser. De quels yeux les saints Thomas d'Aquin et Bonaventure, et le nombre innombrable de leurs saints disciples liront-ils cet étrange aveu dans votre livre ? eux à qui la Nature a fait ses démonstrations, et qui ont appuyé et défendu la Religion par les preuves métaphysiques. Ils en ont été convaincus et ont prétendu en convaincre les païens par des livres exprès. Est-ce que vous n'êtes pas convaincu de leurs preuves ? Permettez-moi de le dire, si vous ne l'êtes pas, vous êtes bien opiniâtre ! Et que vous soyez convaincu ou ne le soyez pas, vous êtes bien imprudent d'avouer aux libertins à qui vous parlez que ces preuves frappent peu, qu'elles égarent l'esprit, et que vous ne vous en sentiriez pas assez fort pour convaincre des athées. Cette discussion mêle habilement des arguments traditionnels et des reproches fondés sur des textes de Pascal quelque peu déformés. Il est vrai que l'abbé de Villars ne disposait que des Pensées de 1670, dont le texte n'était pas toujours conforme à l'original. Le soupçon jeté sur la sincérité de la foi de Pascal s'explique sans doute par le fait que l'auteur est lié au parti anti-janséniste.

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