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Fiche de lecture: Britannicus (1669). Racine

Publié le 21/06/2011

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Racine avait remporté un éclatant succès avec Andromaque. Mais les partisans du vieux Corneille déclaraient Racine incapable de réussir dans la tragédie historique. Celui-ci accepta le défi et chercha dans Tacite un sujet qui lui permît de développer des sentiments romains. Il choisit l'histoire de Néron et de Britannicus, et la suivit fidèlement; mais il limita son action, qui devait se passer en vingt-quatre heures. Il ne voulut peindre en Néron que le monstre naissant, afin que le personnage restât humain et pût exciter sinon la sympathie, du moins l'intérêt des spectateurs. Analyse. — Quand Agrippine, veuve de Domitius et mère de Néron, a épousé l'empereur Claude, celui-ci avait un fils, Britannicus. Grâce aux intrigues d'Agrippine, Néron est devenu le gendre de Claude et, à la mort de celui-ci, il a été proclamé empereur par les légions. Agrippine n'avait agi ainsi que pour exercer elle-même le pouvoir. Sentant que Néron veut se dégager de sa tutelle, elle le menace de ce Britannicus, qui pouvait encore revendiquer l'empire. Alors Néron, poussé par l'affranchi Narcisse, décide qu'il se débarrassera de Britannicus par le poison; d'autant plus qu'il aime Junie, fiancée de Britannicus, qui est ainsi, à un double titre, son rival. Cependant, l'excellent Burrhus est parvenu à toucher le coeur de Néron, et à lui arracher la grâce de Britannicus. Mais Narcisse finit par l'emporter, comme on le voit à l'issue de la scène que nous citons. — Au 5e acte, Britannicus est empoisonné dans un festin. Junie se retire, chez les Vestales, et Narcisse est lapidé par le peuple.



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« Celles-ci, dans un temps d'euphorie, attachent de l'importance au goût galant.

Il s'est développé au lendemain de laFronde : l'heure n'était plus aux rêves héroïques, et l'analyse du sentiment gagnait de l'attention.

Il s'est renforcédans les premières années du règne, dans l'ambiance festive de la « jeune Cour ».

C'est là qu'avec Alexandre etAndromaque Racine s'est taillé une réputation de dramaturge des sentiments amoureux.

Avec le temps du plus hautprestige politique, le goût dominant mêle galanterie et 'souci de grandeur.

La tragédie, genre à la fois noble (par sadimension politique) et galant (par la peinture des mouvements affectifs), coïncide avec cette tendance du goût.

Enconcevant Britannicus, tragédie soutenue et psychologique, Racine s'accorde au goût du public principal, tout enaffirmant lui aussi son prestige. 2.

L'oeuvre : architecture, mouvements, personnages Pourtant, Britannicus est en même temps une tragédie sombre, à la différence d'Alexandre et même, en partie,d'Andromaque.

Ouvre qui vise au plus haut prestige en un temps de haut prestige, elle montre aussi l'envers desgrandeurs, leur possible basculement dans le réseau infernal des conflits de pouvoir et de personnes.

Elle peut se lirecomme un exorcisme des démons que la France aristocratique pouvait penser avoir vaincus, avec l'avènement del'absolutisme triomphant (et donc, aussi, comme le signe de l'inquiétude secrète de leur possible retour).C'est pourquoi il faut, pour la compréhension d'une telle pièce, une lecture globale et plurielle, qui en fasse saisirl'ambivalence structurelle. Structure 1.

La dualité intégréeIl est banal qu'une tragédie comprenne des éléments agencés selon un principe de dualité : le contraste oul'opposition font partie des caractéristiques de la progression dramatique et de l'esthétique tragique.

Il est plussignificatif de voir comment ils s'agencent dans chaque cas particulier.Britannicus comprend des éléments opposés deux à deux, en particulier dans l'ordre des personnages et des forcesagissantes.

Le traître Narcisse s'oppose à Burrhus, conseiller vertueux, comme Racine lui-même le souligne dans laseconde préface.

Le couple infernal du fils et de la mère, Néron et Agrippine, forme contraste avec le couple tendreet pur des amoureux légitimes, Britannicus et Junie.Mais cette représentation de forces opposées passe aussi par les propriétés des personnages, et en particulier deNéron : en lui, la dualité s'incorpore.

Alors que les autres ne varient guère dans leur détermination, le Néron deBritannicus est traité comme un être-Janus.

Et cela, de plusieurs façons.

Dans les propos que tiennent les autrespersonnages à son sujet, on entend dès le début deux discours opposés, construisant une image contradictoire.

A lascène 1, Albine le présente comme un « empereur parfait » (v.

26), tandis qu'Agrippine souligne « l'humeur triste etsauvage » (v.

36) de son fils ; la suite de sa réplique montre d'ailleurs bien comment, par une généralisation, Néronest désigné comme le théâtre du combat entre deux forces antagonistes : la cruauté du tyran et la justice dusouverain.

Ainsi, la dualité des forces agissantes se trouve intégrée dans le personnage principal. 2.

Les passages de l'une à l'autre structureCette dualité se manifeste aussi sur d'autres plans.

L'analyse de la structure temporelle permet de voir, par laconfrontation entre la cc fable » et le « récit », que la crise représentée dans Britannicus se situe au moment oùl'on passe d'un temps d'ordre (les débuts du règne) à un temps de désordres.

L'analyse des effets de spatialisationmontre que la pièce instaure, peu à peu, un double discours.

La scène 6 de l'acte II exhibe cette situation.

Néronl'explicite lorsqu'il avoue ne pas pouvoir tenir le même langage en présence d'Agrippine qu'en son absence (v.

496-506), et le dénouement montre comment ce double discours qui le « divisait » a été par lui intégré en un seul : lediscours de la duplicité (v.

1651-1656).

Ce passage d'une parole divisée à une parole unifiée mais à double sens,mensongère, est tme progression d'une structure à une autre, qui oriente tout le mouvement de la pièce. La progression dramatique Le secret est la condition qui rend possible l'incorporation de la dualité de discours par le personnage principal :Néron ne peut dépasser sa division interne initiale, ne peut devenir maître du double langage (c'est-à-dire capable de mentir à Agrippine et à Burrhus) qu'en conquérant la capacité detenir secrètes ses pensées et ses décisions.En conduisant l'analyse des séquences, et donc des péripéties essentielles, on aura soin de faire apparaître, avecles élèves, comment la progression se fonde sur les étapes de cette accession au secret.L'acte I (l'exposition) révèle déjà plusieurs manoeuvres relevant du secret : Junie est conduite au palais de nuit,Burrhus et les consuls viennent en secret auprès de Néron.

Mais cet usage du secret est d'abord destiné par leprotagoniste à se protéger de la seule Agrippine.

L'acte II marque un degré nouveau : le public y apprend lessentiments secrets de Néron (son amour pour Junie, son impatience à se libérer de la tutelle d'Agrippine), mais enmême temps voit Néron abuser du pouvoir du secret (sc.

6).

La suite de la progression passe par une série de tellesrévélations (récit des secrets d'Agrippine, décision de Néron d'« embrasser son rival pour mieux l'étouffer ») pourparvenir à ce point culminant que constitue l'intervalle entre l'acte IV et l'acte V.

Jusque-là, le public sait les. »

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