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Molière, Le Misanthrope, Acte 1, Scène I

Publié le 12/09/2006

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Molière reste dans l’anthologie de la littérature française comme le grand dramaturge comique. Ses pièces, mêlant résurgences antiques (Amphitryon), farce à la commedia dell’arte (les Fourberies de Scapin) et références directes à ses contemporains (Les précieuses ridicules) se présentent souvent comme des critiques acides de ses contemporains, en cela fidèle à la devise de la comédie qui « castigat ridendo mores «, châtie les mœurs en riant. Le Misanthrope qui met en scène comme le titre l’indique, un personnage, Alceste, rebelle à tout contact humain, intransigeant et aux principes de conduite inflexibles est de ces comédies sérieuses. Cet extrait, la scène 1 de l’acte I, se veut programmatique de la pièce à venir : elle présente le héros tout en donnant l’enjeu de la pièce ; le héros qui se définit par sa parole critique sans concession en est ici à sa première tirade, à l’argumentation soignée : il ne justifie ici, auprès de son contradicteur Philinte (le philanthrope) rien de moins que de sa misanthropie. I. Une scène d’exposition

1. Exposition = début. Cf. le découpage : I, 1 2. Fonction de l’exposition : Exposition = présentation des personnages. a. Alceste, le personnage principal. Caractérisation : * par la parole (tirade = longue réplique) * par le refus négation « non, non « au début de sa réplique, et qui la clôture aussi « l’ami du genre humain n’est point du tout mon fait «. cf. variation « je refuse «. * par la morale : champ lexical de la morale « lâche «, « honnête homme «, « mérite «, « vices «, * par le sens critique de l’homme cartésien (cf. racine de « critique « = juger *krinein) qui fait preuve v.5 de « méthode «, « tranche « et opère des différenciations cf. « différence « v.27 et se soucie de « distinction « (v.26). * se caractérise par l’omniprésence du « je « : « « je ne puis souffrir «, « je refuse «, « je veux «. Alceste ne parle que de lui. b. L’objet de la pièce, l’intrigue. Aucune intrigue n’est annoncée, il ne se passe rien (pas d’action au sens courant du terme). Les personnages ne font que parler, et surtout le personnage principal. En fait, c’est cela le sujet de la pièce : le débat d’idée, la joute verbale entre Alceste et tous ses contradicteurs. II. Une argumentation

a. Thèse  * résumée dans la tirade : « l’ami du genre humain n’est point du tout mon fait « = définition étymologique et littérale d’un misanthrope, ennemi du genre humain. * Résumée dans le titre de la pièce : Alceste = celui qui est désigné par le titre (Misanthrope = la périphrase le désignant). b. Deux parties en présence. Comme pour toute disputatio*, tout débat d’idée, toute joute verbale : deux thèses en présences et donc deux parties ; la partie adverse*, le contradicteur* = Philinte. Contexte de dialogue contradictoire. Philinte ne fait pas que s’opposer à Alceste, il incarne tout entier une vie opposée à celle d’Alceste : cf. étymologie, racine de « Philinte « = Philein* aimer, comme dans « philanthrope « par opposition à misanthrope. c. Arguments et techniques argumentatives. Alceste = un cérébral, un logique, qui passe non pas par la persuasion, mais par la conviction, à coups d’arguments et en respectant les exigences de la rhétorique. Invention. Système argumentatif = oppositions, balancement, concurrence de deux visions * système dual des personnages sur scène (Philinte/ Alceste) = un face à face * négations (cf. supra) * système binaire, dans l’opposition « l’honnête homme et le fat «, * reprise du même terme et renversement « et c’est n’estimer rien qu’estimer tout le monde « * reprise dans la tirade « estime « x3 comme pour marteler cette valeur comme essentielle * système binaire deux noms deux adjectifs, noms et complément du nom ont chacun un déterminant « ces affables donneurs d’embrassades frivoles / ces obligeants diseurs d’inutiles paroles «. * fausses concessions et faux adoucissements (litotes) périphrases « je ne puis souffrir « (= je hais), « je ne hais rien tant que « (= je hais surtout) , «  âme un peu bien située « (= « tout à fait située) * expressivité, insistance, hyperbole : anaphore du « non « (x.3), exclamations « morbleu ! « en rejet (début vers suivant), hyperboles adj. « vaste « en soi hyperbolique (la « vaste complaisance « v.26) ou encore l’insistance de la redondance de la négation « n’est point du tout mon fait «. → expressivité jusqu’à l’agressivité cf. énonciation le destinataire = eux (3e personne du pluriel qui n’implique pas Philinte) puis le « on « de moins en moins déterminé qui pourrait impliquer Philinte, et à la fin, Philinte est visé directement par le « vous « : « puisque vous y donnez , dans ces vices du temps « et qui crée l’ écho et par là l’équivalence entre « vous « «vice « : à la fin, Alceste agresse presque Philinte ! Disposition. Organisation de son paragraphe argumentatif : de la réfutation (v. 5) , à la thèse finale enfin clairement exprimée sur le mode positif et assertif* (qui affirme ce qui est) « et pour le trancher net, l’ami du genre humain n’est point du tout mon fait «. construction graduée des arguments : v. 6 refus de la mode v.7-8 refus de la frivolité, de la facilité v.1à dénonciation de la vanité, de l’inutilité « inutiles « 9 -17 dénonciation de l’hypocrisie des sourires mondains, → v.13-16 le moyen : contre -objections préparées, anticipées pour mieux les réfuter, Alceste fait les questions et les réponses lui-même = question rhétorique, qui n’appelle aucune réponse, ou fait mine d’être posée (pour la forme) mais lorsqu’on connaît déjà la réponse (Alceste est quasiment dans un monologue) → v. 13 le motif = jalousie → v. 25 & 26- la visée : dit autrement, volonté d’originalité : différence et distinction Hymne à l’exception, à l’unicité, à l’originalité, à la pureté aussi. En ça qu’on a affaire à un personnage noble, avec de hautes ambitions pour lui-même et pour l’être humain. Elocution. Rhétorique : * d’abord la réfutation « non, non je ne puis souffrir… « * la dépréciation par les déictiques « cette lâche méthode «, « ces vices du temps « * la qualification péjorative adjectivale « lâche méthode «, * l’ironie, la dérision « ces grands faiseurs de protestations « * le mépris et l’insulte « faquin « * la litote « peu chers « → expression ET expressivité au service du propos mais qui permettent aussi de définir indirectement (via ses propos, son ton) le personnage d’Alceste (cf. I du plan) III. Une comédie sérieuse … un registre tragique ou comique  ?

a. solitude. Le « je « est très seul car opposé aux autres, à des pluriels et des catégories vagues « gens « (x2) et « genre humain « (fin du texte). b. Noblesse du propos. Pour une comédie (sous-genre dramatique bas dans la distinction d’Aristote, par opposition à la tragédie), emploi de vers (retour à la ligne). Imitation de la posture tragique de l’homme seul face à l’univers et au reste du genre humain, solitude tragique aussi de l’homme si intransigeant et si entier, parfait (parachevé, autonome) qu’il n’aime ni ne côtoie personne. → Une comédie de caractère au mieux (on peut toujours se moquer d’Alceste, de son aspect radical, jusqu’au-boutiste), mais on peut aussi être terrifié de tant de sècheresse ou triste de sa solitude. c. → Dimension morale de la comédie, la comédie aussi est sérieuse, elle donne des leçons : soit elle dissuade de devenir comme Alceste soit elle nous le rend humain et sympathique dans son drame (aimer Célimène = être asservi par la passion amoureuse et tiraillé entre les principes et les sentiments), voire nous faire rire et nous faire nous moquer du travers du personnage, de son système de pensée et de vie ridicule (c’est le comique de caractère). A force de tout contrôler et d’être un être calculateur froid, Alceste finit par être victime de son caractère, il est esclave du dogme, il est esclave de sa propre pensée puisqu’il ne sait vivre que par elle, que par ce logos qui le définit et l’emprisonne et le handicape = il est le bourreau de lui-même (à lui-même son propre mal = héautontimoroumenos*) → Ambiguïté du personnage du misanthrope : à la fois ridicule et attachant, impitoyable et séduisant (son exigence morale et le culte de la raison clairvoyante).

« je hais surtout) , « âme un peu bien située » (= « tout à fait située)* expressivité, insistance, hyperbole : anaphore du « non » (x.3), exclamations « morbleu ! » en rejet (début vers suivant),hyperboles adj.

« vaste » en soi hyperbolique (la « vaste complaisance » v.26) ou encore l'insistance de la redondance de lanégation « n'est point du tout mon fait ».→ expressivité jusqu'à l'agressivité cf.

énonciation le destinataire = eux (3e personne du pluriel qui n'implique pas Philinte) puis le« on » de moins en moins déterminé qui pourrait impliquer Philinte, et à la fin, Philinte est visé directement par le « vous » :« puisque vous y donnez , dans ces vices du temps » et qui crée l' écho et par là l'équivalence entre « vous » «vice » : à la fin,Alceste agresse presque Philinte ! Disposition.Organisation de son paragraphe argumentatif :de la réfutation (v.

5) , à la thèse finale enfin clairement exprimée sur le mode positif et assertif* (qui affirme ce qui est) « et pourle trancher net, l'ami du genre humain n'est point du tout mon fait ».

construction graduée des arguments :v.

6 refus de la modev.7-8 refus de la frivolité, de la facilitév.1à dénonciation de la vanité, de l'inutilité « inutiles »9 -17 dénonciation de l'hypocrisie des sourires mondains,→ v.13-16 le moyen : contre -objections préparées, anticipées pour mieux les réfuter, Alceste fait les questions et les réponseslui-même = question rhétorique, qui n'appelle aucune réponse, ou fait mine d'être posée (pour la forme) mais lorsqu'on connaîtdéjà la réponse (Alceste est quasiment dans un monologue)→ v.

13 le motif = jalousie→ v.

25 & 26- la visée : dit autrement, volonté d'originalité : différence et distinctionHymne à l'exception, à l'unicité, à l'originalité, à la pureté aussi.

En ça qu'on a affaire à un personnage noble, avec de hautesambitions pour lui-même et pour l'être humain. Elocution.Rhétorique :* d'abord la réfutation « non, non je ne puis souffrir… »* la dépréciation par les déictiques « cette lâche méthode », « ces vices du temps »* la qualification péjorative adjectivale « lâche méthode »,* l'ironie, la dérision « ces grands faiseurs de protestations »* le mépris et l'insulte « faquin »* la litote « peu chers »→ expression ET expressivité au service du propos mais qui permettent aussi de définir indirectement (via ses propos, son ton) lepersonnage d'Alceste (cf.

I du plan) III.

Une comédie sérieuse … un registre tragique ou comique ? a.

solitude.

Le « je » est très seul car opposé aux autres, à des pluriels et des catégories vagues « gens » (x2) et « genre humain »(fin du texte).b.

Noblesse du propos.

Pour une comédie (sous-genre dramatique bas dans la distinction d'Aristote, par opposition à latragédie), emploi de vers (retour à la ligne).

Imitation de la posture tragique de l'homme seul face à l'univers et au reste du genrehumain, solitude tragique aussi de l'homme si intransigeant et si entier, parfait (parachevé, autonome) qu'il n'aime ni ne côtoiepersonne.

→ Une comédie de caractère au mieux (on peut toujours se moquer d'Alceste, de son aspect radical, jusqu'au-boutiste), mais on peut aussi être terrifié de tant de sècheresse ou triste de sa solitude.c.

→ Dimension morale de la comédie, la comédie aussi est sérieuse, elle donne des leçons : soit elle dissuade de devenir commeAlceste soit elle nous le rend humain et sympathique dans son drame (aimer Célimène = être asservi par la passion amoureuse ettiraillé entre les principes et les sentiments), voire nous faire rire et nous faire nous moquer du travers du personnage, de sonsystème de pensée et de vie ridicule (c'est le comique de caractère).

A force de tout contrôler et d'être un être calculateur froid,Alceste finit par être victime de son caractère, il est esclave du dogme, il est esclave de sa propre pensée puisqu'il ne sait vivreque par elle, que par ce logos qui le définit et l'emprisonne et le handicape = il est le bourreau de lui-même (à lui-même sonpropre mal = héautontimoroumenos*)→ Ambiguïté du personnage du misanthrope : à la fois ridicule et attachant, impitoyable et séduisant (son exigence morale et leculte de la raison clairvoyante).. »

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