Penser, est-ce juger ?
Publié le 19/02/2004
Extrait du document
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— A — L'intellectualisme.Selon Spinoza, l'esprit qui conçoit ne se distingue pas de l'esprit qui juge,c'est-à-dire que l'entendement ne se distingue pas de la volonté.
On ne peutformer une idée sans poser sa vérité ; les idées s'affirment d'elles-mêmes,avec plus ou moins de force il est vrai, selon leur plus ou moins grande clarté.Le doute n'est jamais volontaire, il est incertitude et l'incertitude tientseulement à la présence en nous d'idées contradictoires qui ne peuvent êtreque des connaissances du premier genre, par ouï-dire ou par expériencevague.
L'erreur n'est pas un jugement positivement faux mais seulement uneidée inadéquate, c'est-à-dire insuffisante.
Spinoza: Les trois genre de connaissance
Pour aboutir à la définition de la connaissance vraie, Spinoza distingue troisgenres de connaissances, ou trois modes hétérogènes de perception.Connaître est, en effet, une certaine manière de voir ou de percevoir unechose ou une idée.
1.
La connaissance du premier genreConnaissance par oui-dire ou expérience vague, elle désigne la confiance faiteaux témoignages, lorsque je m'en remets à ce que m'a dit autrui : c'est ainsi,par exemple, que je sais la date de ma naissance.
Je sais par expérience vague que je mourrai, ou encore que l'eauest propre à éteindre le feu.
C'est ici l'expérience qui me conduit et non l'entendement.
Ce mode de perception nepermet pas une connaissance certaine.
2.
La connaissance du deuxième genreElle désigne le raisonnement, l'enchaînement logique.
L'entendement part d'idées simples qui ne sauraient être quevraies, pour aboutir à d'autres vérités : par exemple, quand je connais la nature de la vision, qui fait qu'un mêmeobjet vu à grande distance paraît plus petit que si nous le regardions de près, j'en conclus que le Soleil est plusgrand qu'il ne m'apparaît.
Ce mode de connaissance est toujours vrai, mais il n'est pas une connaissance directe dela chose.
3.
La connaissance du troisième genreOn ne connaît véritablement une chose que lorsqu'on connaît son essence, sa nature.
C'est ainsi que nous savonsque deux et trois font cinq.
Cette connaissance n'est pas un raisonnement mais une intuition, une connaissancedirecte de la chose.
Elle ne porte pas sur l'existence de la chose mais sur son essence.
— B — Le volontarisme.Pour Descartes au contraire, l'erreur est positive ; elle consiste à affirmer la réalité objective d'idées que nous neconnaissons pas avec assez de clarté et de distinction.
Ce qui la rend possible c'est la disproportion qui existe entrel'entendement, faculté de concevoir, limitée et passive, et la volonté, faculté active et infinie d'affirmer.
Lejugement est l'oeuvre en effet de la volonté.
Nous sommes donc responsables de nos erreurs mais il dépend de nousde les éviter en suspendant notre jugement tant qu'un doute est possible, c'est-à-dire tant qu'on ne parvient pas àdes idées parfaitement claires et distinctes.
— C — Le jugement vrai.Certes, il est impossible de ne pas affirmer ce qui paraît évident et en ce sens Spinoza a raison.
Mais la difficulté estde distinguer les jugements où la volonté est déterminée par l'imagination, de ceux où elle l'est par l'entendement :« Ce que le désir engendre est toujours ce qu'il y a de plus clair » remarque Valéry, et l'erreur consiste toujours àjuger selon des affections corporelles (appétits, coutumes).
La maîtrise de soi est donc la condition du jugementvrai et le rôle de la volonté dans le jugement consiste essentiellement à repousser les idées que proposel'imagination pour penser selon l'entendement.
D'où la nécessité d'une éducation du jugement par laquelle ons'exerce à juger d'abord les choses qui nous touchent le moins.
CONCLUSION
Il faut gouverner ses pensées « Penser (peser) est fonction de peseur, non fonction de balance.
Et il serait ridiculesi, au moment de juger, je regardais seulement de quel côté j'incline » (Alain)..
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