François de CLOSETS. Pour une « production populaire » d'œuvres culturelles. (Le Bonheur en plus)

Qu'est-ce que l'élite culturelle ? Elle comporte assurément les créateurs artistiques, écrivains, metteurs en scène, artistes ; mais elle comporte également tous ceux qui peuvent apporter de nouvelles réponses, philosophes, sociologues, hommes politiques. Elle comporte enfin, et surtout, l'ensemble du corps professoral qui forme les esprits. Tous ces personnages agissent à un titre ou à un autre sur leurs concitoyens, même s'ils n'exercent pas leur influence à travers les moyens matériels comme les producteurs, mais à travers des créations intellectuelles. Cette élite — faudrait-il dire ces « culturateurs «? — possède une double mission qui correspond à la double mission de la communauté scientifique. Cette dernière poursuit également un travail de recherche fondamentale et un travail de fabrication industrielle. Et de même la communauté culturelle doit-elle se livrer à la recherche d'avant-garde en poussant plus avant sa réflexion, en expérimentant de nouveaux moyens d'expression, en explorant les profondeurs de la personne humaine et du corps social, tout en assurant une certaine production qui apporte au plus vaste public l'information, l'éducation, la réflexion et la distraction. (...) Face à la « production populaire « proposée par l'industrie et le commerce, il faut une « production populaire « d'œuvres culturelles. Il ne s'agit point d'une revendication idéologique, mais d'une nécessité sociale. Il suffit de définir ainsi la « fonction culturelle « pour dresser un réquisitoire contre les créateurs intellectuels français. Tout comme leurs collègues scientifiques, toujours attirés par les délices de la recherche pure ou de la technologie avancée, ils se sont livrés au plaisir de l'avant-garde en négligeant complètement les besoins d'un public populaire. Bien sûr, il y a eu le T.N.P. l'exemple même de l'entreprise culturelle réussie. Si ce n'est que Jean Vilar n'a créé aucune œuvre importante d'un dramaturge français contemporain.

Aucun grand auteur populaire n'est apparu en France depuis trente ans. De Genet à Beckett et de Gatti à Billetdoux, tous les dramaturges recherchent de nouveaux moyens d'expression, alors que le public populaire court toujours au Châtelet. Les animateurs des maisons de la Culture ont bien souvent suivi cette mode. Le théâtre français continue à produire des œuvres de grande qualité, mais qui ne sont jamais accessibles aux non-initiés. Il n'y a que les vaudevillistes pour savoir encore s'adresser à un public populaire. (...) Et pourquoi les écrivains qui ont la pensée la plus originale ont-ils aussi le style le plus difficile ? Pourquoi les musiciens de qualité ne produisent-ils que pour une toute petite élite d'initiés? Pourquoi les peintres novateurs se perdent-ils dans des recherches déroutantes ? Partout et toujours, il semble que la qualité du fond doive se marier à la difficulté de la forme. Ainsi le public (...) doit-il se rabattre sur les productions « commerciales «, les seules qui lui soient accessibles et qu'il ne choisit pas en raison de leur néant intellectuel, mais précisément de leur simplicité formelle. Des œuvres de qualité peuvent obtenir un grand succès populaire quand elles sont aisément accessibles. Jean Ferrât a chanté pour la France entière l'exode rural, la mère au foyer ou la déportation. Costa-Gavras1 a montré l'affaire Lambrakis à des milliers de spectateurs et Stellio Lorenzi l'époque cathare à des millions de téléspectateurs. Si de telles œuvres ne constituent pas des événements sur le plan artistique, du moins répondent-elles parfaitement aux impératifs de la « production populaire « qui doit coexister avec la recherche d'avant-garde. Après avoir résumé ou analysé le texte, vous y choisirez un thème de discussion, vous en exposerez les données, puis vous exprimerez avec ordre et précision votre opinion personnelle. Le résumé et l'analyse condensent l'un et l'autre le texte; mais le résumé respecte l'ordre adopté par l'auteur, tandis que l'analyse dégage les pensées ou les sentiments en soulignant leur importance relative, sans s'obliger à suivre le fil du développement. Prière de préciser le mode d'expression choisi (résumé ou analyse).