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La belle Gabrielle, vol.

Publié le 11/04/2014

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La belle Gabrielle, vol. 1 lecteur peut croire qu'elle ne lui répondait pas sur une foule d'autres qui concernaient aussi son absence. L'hidalgo don José Castil, dans sa voltige déhanchée, se retournait souvent pour lancer à cette belle fille en même temps qu'à la porte du château une oeillade qui s'émoussait parfois sur le père Entragues; car, nous l'avons dit, Mlle Henriette avait des distractions; le mot n'est pas juste, c'est préoccupations qu'il faudrait dire. Elle aussi attendait quelqu'un, mais non pas du même côté que l'Espagnol, et elle voyait avec inquiétude la direction que sa mère imprimait à la promenade. Au bout des parterres on trouvait le parc; à cent pas, dans le parc, le pavillon où logeait Henriette, et dont les murs blancs s'apercevaient déjà sous les épais marronniers. Or, Henriette avait ses raisons pour que la société ne s'installât point du côté de ce pavillon à une pareille heure. Cependant, Mme d'Entragues s'avançait toujours dans sa lente majesté; Henriette passait de l'inquiétude au dépit. Par bonheur, le petit pied de la mère s'embarrassa dans sa robe, et un faux pas s'ensuivit. L'hidalgo et M. d'Entragues se précipitèrent de chaque côté pour prêter leur appui à cette divinité chancelante. Henriette profita du moment pour s'écrier: --Vous êtes lasse madame. Vite ... le pliant, page! Le page au pliant lâcha l'oiseau, l'oiseau s'envola sur une branche; le page au coussin jeta son coussin sur le page au pliant, les chiens croyant qu'on voulait jouer avec eux fondirent sur tout cela. Il y eut une bagarre désobligeante pour des maîtres de maison qui tiennent au bel air et au cérémonial. Les pages furent tancés d'importance. --Ils sont bien jeunes, dit l'hidalgo. Pourquoi si jeunes? Quelle habitude singulière en certaines maisons françaises? Pourquoi ne pas prendre plutôt de robustes jeunes gens bons au service, à la guerre, à tout? Ce malencontreux à tout fut accueilli par un fauve regard de Marie Touchet, lequel ricocha sur Henriette et lui fit baisser la tête. --Monsieur, répliqua la mère, les maisons françaises dans lesquelles il y a des demoiselles préfèrent le service des pages enfants. J'eusse cru qu'on pensait de même en Espagne. L'hidalgo comprit qu'il avait dit une sottise. Il s'apprêtait à la réparer, mais Marie Touchet changea aussitôt la conversation. Elle s'assit à l'ombre d'une grande futaie, près de la fontaine. Sa fille prit place auprès d'elle. M. d'Entragues offrit lui-même un siège au capitaine espagnol. --Dites-nous, señor, quelques nouvelles de Paris, demanda Henriette, satisfaite de la halte, et jetant un coup d'oeil furtif au pavillon que sa mère ne pouvait plus voir. --Toujours les mêmes, señora, toujours de bons préparatifs contre le Béarnais, si jamais il revient. Mais il ne reviendra pas, nous sachant là. Cette rodomontade ne persuada pas M. d'Entragues. --Il y est déjà venu, dit-il, et vous y étiez, et c'était du temps de votre grand-duc de Parme, lequel, aujourd'hui, ne peut plus effrayer personne. Moi, je ne crois pas qu'il se passe un mois avant le retour du Béarnais devant Paris. IX. LA MAISON D'ENTRAGUES 69 La belle Gabrielle, vol. 1 --Si vous en savez plus long que nous, répliqua l'Espagnol avec curiosité, parlez, monsieur; sans doute vous êtes bien renseigné; car, en effet, M. le comte d'Auvergne, votre beau-fils, est colonel-général de l'infanterie des royalistes, et à la source des nouvelles. --Monsieur mon fils, interrompit Marie Touchet, ne nous fait point part des desseins de son parti; nous le voyons très-peu; d'ailleurs il nous sait trop fermes adversaires du Béarnais, trop dévoués à la sainte Ligue et vieux amis de M. de Brissac, le nouveau gouverneur donné à Paris par M. de Mayenne. --M. de Brissac! Excellent choix pour nous Espagnols, dit le seigneur Castil, que le nom de Brissac, prononcé en cette circonstance, sembla frapper d'une défiance nouvelle. Ne me disiez-vous pas tout à l'heure, madame, que le seigneur gouverneur est de vos amis? --Excellent! dit M. d'Entragues. --Vous le voyez souvent? demanda l'Espagnol. --Non, malheureusement. Il est devenu bien rare depuis quelque temps. L'hidalgo enregistra cet aveu. --Il a tant d'affaires, maintenant, se hâta de dire Mme d'Entragues, qui ne voulait pas se laisser croire négligée. Mais absent ou présent, je suis sûre qu'il nous porte une affection vive. Et j'y tiens, car son amitié en vaut la peine. --Assurément, dit l'Espagnol, le seigneur comte nous aide vaillamment, c'est un franc ligueur. Mais quelle étrange division dans les familles! quel affreux exemple! ajouta sentencieusement l'hidalgo. Voir M. le comte d'Auvergne armé contre sa mère! Mme d'Entragues se pinça les lèvres. Un violent dépit de paraître opposée à son fils, dont elle était si vaine, combattait en elle la crainte non moins grande de déplaire au parti régnant. M. d'Entragues intervint, pour écarter de la déesse ce nuage fâcheux. --Non, señor, dit-il, M. le comte d'Auvergne ne s'arme pas contre sa mère. Fils et neveu de nos rois, il croit rester fidèle à leur mémoire en servant celui que le feu roi Henri III avait désigné pour son successeur, car enfin c'est un fait; le feu roi a eu cette faiblesse à ses derniers moments de nommer roi le roi de Navarre. --En est-on bien sûr? demanda l'hidalgo avec cet aplomb de l'ignorance victorieuse qui conteste volontiers tout ce qui la gène. --M. le comte d'Auvergne, mon fils, en a été témoin, répliqua Mme d'Entragues. Don Castil salua en matamore. Henriette voulant ramener un peu de souplesse dans la conversation qui commençait à se tendre, réitéra sa question: --Qu'y a-t-il de nouveau à Paris, sauf cette nomination de M. de Brissac par M. de Mayenne? Et elle ajouta: --Excusez-moi, señor, j'arrive de voyage. IX. LA MAISON D'ENTRAGUES 70

« —Si vous en savez plus long que nous, répliqua l'Espagnol avec curiosité, parlez, monsieur; sans doute vous êtes bien renseigné; car, en effet, M.

le comte d'Auvergne, votre beau-fils, est colonel-général de l'infanterie des royalistes, et à la source des nouvelles. —Monsieur mon fils, interrompit Marie Touchet, ne nous fait point part des desseins de son parti; nous le voyons très-peu; d'ailleurs il nous sait trop fermes adversaires du Béarnais, trop dévoués à la sainte Ligue et vieux amis de M.

de Brissac, le nouveau gouverneur donné à Paris par M.

de Mayenne. —M.

de Brissac! Excellent choix pour nous Espagnols, dit le seigneur Castil, que le nom de Brissac, prononcé en cette circonstance, sembla frapper d'une défiance nouvelle.

Ne me disiez-vous pas tout à l'heure, madame, que le seigneur gouverneur est de vos amis? —Excellent! dit M.

d'Entragues. —Vous le voyez souvent? demanda l'Espagnol. —Non, malheureusement.

Il est devenu bien rare depuis quelque temps. L'hidalgo enregistra cet aveu. —Il a tant d'affaires, maintenant, se hâta de dire Mme d'Entragues, qui ne voulait pas se laisser croire négligée.

Mais absent ou présent, je suis sûre qu'il nous porte une affection vive.

Et j'y tiens, car son amitié en vaut la peine. —Assurément, dit l'Espagnol, le seigneur comte nous aide vaillamment, c'est un franc ligueur.

Mais quelle étrange division dans les familles! quel affreux exemple! ajouta sentencieusement l'hidalgo.

Voir M.

le comte d'Auvergne armé contre sa mère! Mme d'Entragues se pinça les lèvres.

Un violent dépit de paraître opposée à son fils, dont elle était si vaine, combattait en elle la crainte non moins grande de déplaire au parti régnant. M.

d'Entragues intervint, pour écarter de la déesse ce nuage fâcheux. —Non, señor, dit-il, M.

le comte d'Auvergne ne s'arme pas contre sa mère.

Fils et neveu de nos rois, il croit rester fidèle à leur mémoire en servant celui que le feu roi Henri III avait désigné pour son successeur, car enfin c'est un fait; le feu roi a eu cette faiblesse à ses derniers moments de nommer roi le roi de Navarre. —En est-on bien sûr? demanda l'hidalgo avec cet aplomb de l'ignorance victorieuse qui conteste volontiers tout ce qui la gène. —M.

le comte d'Auvergne, mon fils, en a été témoin, répliqua Mme d'Entragues. Don Castil salua en matamore.

Henriette voulant ramener un peu de souplesse dans la conversation qui commençait à se tendre, réitéra sa question: —Qu'y a-t-il de nouveau à Paris, sauf cette nomination de M.

de Brissac par M.

de Mayenne? Et elle ajouta: —Excusez-moi, señor, j'arrive de voyage.

La belle Gabrielle, vol.

1 IX.

LA MAISON D'ENTRAGUES 70. »

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