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La belle Gabrielle, vol.

Publié le 11/04/2014

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La belle Gabrielle, vol. 1 Jeanne d'Arc, disait dom Modeste par la bouche de frère Robert, a sauvé Charles VII des Anglais à la pointe de son épée. Vous, ma fille, vous sauverez Henri IV de l'Espagnol. --Vous n'avez pas d'épée, chère belle. Gabrielle rougit et baissa les yeux; belle au delà de tout ce que peut rêver l'imagination des poëtes. --J'espérais, murmura-t-elle, que mon roi ferait par amour pour moi, ce que dix armées ne le forceraient point à faire ... ce que l'appât d'une couronne, ce que toute la gloire de ce monde ne réussirait point à lui arracher.... --Eh bien! s'écria le roi, transporté d'amour, je ne promets rien, oh non ... je ne puis rien promettre sans de longues méditations; une conversion, ma mie ... c'est si grave! Mais, croyez bien que le désir de vous plaire et de calmer votre chagrin sera pour moi le plus actif des aiguillons. Cependant, chère belle, pour me donner du courage, qu'avez-vous fait? Je n'ai jamais trouvé en vous que défiance. Vous venez de m'avouer que vos conseils vous enjoignaient de me désespérer ... Comment voulez-vous alors que la persuasion m'arrive? --Non! non! s'écria Gabrielle prise au piège que le rusé Béarnais lui tendait depuis le commencement de l'entretien, non, il ne s'agit pas de désespoir, bien au contraire; espérez, sire, espérez; mais convertissez-vous. Le roi triomphant: --Des gages, ma mie; votre farouche vertu m'a rendu soupçonneux, et des gages sont indispensables. --J'offre ma parole, sire. Henri s'approcha de la jeune fille en la regardant tendrement. --C'est quelque chose, dit-il, que la parole d'une demoiselle de votre qualité, de votre probité; mais détaillons un peu, je vous prie. C'est mon habitude quand je signe des traités d'alliance. --Je n'en ai jamais signé, dit Gabrielle avec une naïveté enchanteresse. --Laissez-moi dicter, alors. --Soit, mon roi. --Divisons le traité en trois articles. C'est un nombre heureux. Article premier.... --Article premier, s'écria Gabrielle, le roi se convertira! --Non, ce n'est point l'usage de poser l'ultimatum en premier lieu. Article premier ... Mais, ma chère, nous nous sommes bien trompés tous deux. Il n'y a là-dedans et il ne peut y avoir qu'un seul article pour éviter tout ambage et toute fraude. --Oh! sire, faites le traité en prince, en gentilhomme, en honnête homme! --Je le veux ainsi, Gabrielle. --Faites un traité qui ne m'engage point sans vous engager ... Car je vous l'ai dit, une fille de ma race tient sa promesse, quand elle en devrait mourir. Faites de même, vous, un si grand roi! un héros! XVII. COMMENT DANS LE MOULIN, HENRI TIRA DEUX MOUTURES DU MÊME SAC 133 La belle Gabrielle, vol. 1 --Alors, dictez. --Merci, j'accepte. Oui, sire, il n'y a qu'un seul article possible. Le voici: «Entre très-haut et très-puissant seigneur Henri, quatrième du nom, roi de France et de Navarre, et Gabrielle d'Estrées, noble demoiselle, fille d'un bon et loyal serviteur du roi, a été convenu et juré ce qui suit: Le jour où le roi aura fait solennellement et publiquement abjuration de la religion prétendue réformée, pour entrer dans le giron de l'Église catholique, apostolique et romaine....» --Eh bien!... dit le roi enivré. --Écrivez le reste, sire, balbutia Gabrielle en cachant son visage dans ses mains. Et aussitôt son tendre coeur, ce coeur généreux s'emplit de sanglots qui débordèrent en larmes au travers de ses doigts de nacre. Henri se précipita aux genoux de son idole. --Vous inscrirez au traité, ajouta la jeune fille, que Gabrielle voulait sauver la France. --J'inscrirai dans mon coeur que vous êtes un ange de bonté, de grâce, d'amour, et, si profondément je l'inscrirai, Gabrielle, qu'il faudra m'arracher le coeur pour effacer votre souvenir. Il se releva et serra la jeune fille sur sa poitrine, avec un remords d'avoir trompé cette belle âme par le semblant d'une faiblesse d'amour. Gabrielle, radieuse, remercia le ciel d'avoir touché le coeur du roi, et, dans sa candeur, elle remercia aussi le généreux prince qui lui faisait un tel sacrifice. Ah! si elle eût pu savoir qu'une heure avant, le même article du même traité avait conquis Paris à Henri IV! Deux pareilles conquêtes: Gabrielle et Paris! Que de rois se fussent damnés pour l'une ou pour l'autre! Mais Henri se promit au fond de l'âme de racheter la supercherie par tant de tendresse et de constance, que Gabrielle n'y perdît rien. La main dans la main, tous deux avec un regard loyal scellèrent le traité. --Et vous n'en parlerez pas au révérend prieur, ni au père Robert, dit le roi gaiement; nous verrons s'ils le devinent. Eux qui savent tout, je les défie de savoir ce qui s'est passé dans le moulin. --Quand toute l'Europe va retentir de cet acte immense, dit Gabrielle, j'aurai donc le noble orgueil de me répéter, cachée dans un coin: Henri a fait cela pour moi! Le roi, embarrassé, cherchait une réponse, lorsque Gratienne entra précipitamment. --Voici maître Denis qui revient, dit-elle. En effet, des pas lourds et cadencés retentissaient sur la planche du moulin. Le roi se leva pour prendre un avis dans les yeux de Gabrielle. XVII. COMMENT DANS LE MOULIN, HENRI TIRA DEUX MOUTURES DU MÊME SAC 134

« —Alors, dictez. —Merci, j'accepte.

Oui, sire, il n'y a qu'un seul article possible.

Le voici: «Entre très-haut et très-puissant seigneur Henri, quatrième du nom, roi de France et de Navarre, et Gabrielle d'Estrées, noble demoiselle, fille d'un bon et loyal serviteur du roi, a été convenu et juré ce qui suit: Le jour où le roi aura fait solennellement et publiquement abjuration de la religion prétendue réformée, pour entrer dans le giron de l'Église catholique, apostolique et romaine....» —Eh bien!...

dit le roi enivré. —Écrivez le reste, sire, balbutia Gabrielle en cachant son visage dans ses mains. Et aussitôt son tendre coeur, ce coeur généreux s'emplit de sanglots qui débordèrent en larmes au travers de ses doigts de nacre. Henri se précipita aux genoux de son idole. —Vous inscrirez au traité, ajouta la jeune fille, que Gabrielle voulait sauver la France. —J'inscrirai dans mon coeur que vous êtes un ange de bonté, de grâce, d'amour, et, si profondément je l'inscrirai, Gabrielle, qu'il faudra m'arracher le coeur pour effacer votre souvenir. Il se releva et serra la jeune fille sur sa poitrine, avec un remords d'avoir trompé cette belle âme par le semblant d'une faiblesse d'amour. Gabrielle, radieuse, remercia le ciel d'avoir touché le coeur du roi, et, dans sa candeur, elle remercia aussi le généreux prince qui lui faisait un tel sacrifice.

Ah! si elle eût pu savoir qu'une heure avant, le même article du même traité avait conquis Paris à Henri IV! Deux pareilles conquêtes: Gabrielle et Paris! Que de rois se fussent damnés pour l'une ou pour l'autre! Mais Henri se promit au fond de l'âme de racheter la supercherie par tant de tendresse et de constance, que Gabrielle n'y perdît rien. La main dans la main, tous deux avec un regard loyal scellèrent le traité. —Et vous n'en parlerez pas au révérend prieur, ni au père Robert, dit le roi gaiement; nous verrons s'ils le devinent.

Eux qui savent tout, je les défie de savoir ce qui s'est passé dans le moulin. —Quand toute l'Europe va retentir de cet acte immense, dit Gabrielle, j'aurai donc le noble orgueil de me répéter, cachée dans un coin: Henri a fait cela pour moi! Le roi, embarrassé, cherchait une réponse, lorsque Gratienne entra précipitamment. —Voici maître Denis qui revient, dit-elle. En effet, des pas lourds et cadencés retentissaient sur la planche du moulin.

Le roi se leva pour prendre un avis dans les yeux de Gabrielle.

La belle Gabrielle, vol.

1 XVII.

COMMENT DANS LE MOULIN, HENRI TIRA DEUX MOUTURES DU MÊME SAC 134. »

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