La Conquete De Plassans --Ma chère, dit un jour madame de Condamin à Marthe, il m'a grondée hier.
Publié le 11/04/2014
Extrait du document
«
avait le premier usé de ce chemin, le fils Delangre, le juge de paix, indistinctement, y vinrent causer avec
l'abbé Faujas.
Parfois, pendant toute une après-midi, les petites portes des deux jardins, ainsi que la porte
charretière de la sous-préfecture, restaient grandes ouvertes.
L'abbé était là, au fond de ce cul-de-sac, appuyé
au mur, souriant, donnant des poignées de main aux personnes des deux sociétés qui voulaient bien le venir
saluer.
Mais M.
Péqueur des Saulaies affectait de ne pas vouloir mettre les pieds hors du jardin de la
sous-préfecture; tandis que M.
Rastoil et M.
de Bourdeu, s'obstinant également à ne point se montrer dans
l'impasse, restaient assis sous les arbres, devant la cascade.
Rarement la petite cour du prêtre envahissait la
tonnelle des Mouret.
De temps à autre, seulement, une tête s'allongeait, jetait un coup d'oeil, disparaissait.
D'ailleurs, l'abbé Faujas ne se gênait point; il ne surveillait guère avec inquiétude que la fenêtre des Trouche,
où luisaient à toute heure les yeux d'Olympe.
Les Trouche se tenaient là en embuscade, derrière les rideaux
rouges, rongés par une envie rageuse de descendre, eux aussi, de goûter aux fruits, de causer avec le beau
monde.
Ils tapaient les persiennes, s'accoudaient un instant, se retiraient, furieux, sous les regards dompteurs
du prêtre; puis, ils revenaient, à pas de loup, coller leurs faces blêmes, à un coin des vitres, espionnant chacun
de ses mouvements, torturés de le voir jouir si à l'aise de ce paradis qu'il leur défendait.
C'est trop bête! dit un jour Olympe à son mari; il nous mettrait dans une armoire, s'il pouvait, pour garder
tout le plaisir....
Nous allons descendre, si tu veux.
Nous verrons ce qu'il dira.
Trouche venait de rentrer de son bureau.
Il changea de faux-col, épousseta ses souliers, voulant être tout à fait
bien.
Olympe mit une robe claire.
Puis, ils descendirent bravement dans le jardin, marchant à petits pas le long
des grands buis, s'arrêtant devant les fleurs.
Justement, l'abbé Faujas tournait le dos, causant avec M.
Maffre,
sur le seuil de la petite porte de l'impasse.
Lorsqu'il entendit crier le sable, les Trouche étaient derrière son
dos, sous la tonnelle.
Il se tourna, s'arrêta net au milieu d'une phrase, stupéfait de les trouver là.
M.
Maffre, qui
ne les connaissait pas, les regardait curieusement.
Un bien joli temps, n'est-ce pas, messieurs? dit Olympe, qui avait pâli sous le regard de son frère.
L'abbé, brusquement, entraîna le juge de paix dans l'impasse, où il se débarrassa de lui.
Il est furieux, murmura Olympe.
Tant pis! il faut rester.
Si nous remontons, il croira que nous avons peur....
J'en ai assez.
Tu vas voir comme je vais lui parler.
Et elle fit asseoir Trouche sur une des chaises que Rose avait apportées, quelques instants auparavant.
Quand
l'abbé rentra, il les aperçut tranquillement installés.
Il poussa les verrous de la petite porte, s'assura d'un coup
d'oeil que les feuilles les cachaient suffisamment; puis s'approchant, à voix étouffée:
Vous oubliez nos conventions, dit-il: vous m'aviez promis de rester chez vous.
Il fait trop chaud, là-haut, répondit Olympe.
Nous ne commettons pas un crime, en venant respirer le frais
ici.
Le prêtre allait s'emporter; mais sa soeur, toute blême de l'effort qu'elle faisait en lui résistant, ajouta d'un ton
singulier:
Ne crie pas; il y a du monde à côté, tu pourrais te faire du tort.
Les Trouche eurent un petit rire.
Il les regarda, il se prit le front, d'un geste silencieux et terrible.
Assieds-toi, dit Olympe.
Tu veux une explication, n'est-ce pas? Eh bien, la voici....
Nous sommes las de
nous claquemurer.
Toi, tu vis ici comme un coq en pâte; la maison est à toi, le jardin est à toi.
C'est tant La Conquete De Plassans
XIII 92.
»
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