La Terre qui sort comme elle est entree, avec une chemise sur le cul!
Publié le 11/04/2014
Extrait du document
«
Eh! oui, son maitre Hourdequin s'etait fait bien du mauvais sang avec les inventions nouvelles, n'avait pas tire
grand'chose de bon des machines, des engrais, de toute cette science si mal employee encore.
Puis, la
Cognette etait venue l'achever; lui aussi dormait au cimetiere; et rien ne restait de la ferme, dont le vent
emportait les cendres.
Mais, qu'importait! les murs pouvaient bruler, on ne brulerait pas la terre.
Toujours la
terre, la nourrice, serait la, qui nourrirait ceux qui l'ensemenceraient.
Elle avait l'espace et le temps, elle
donnait tout de meme du ble, en attendant qu'on sut lui en faire donner davantage.
C'etait comme ces histoires de revolutions, ces bouleversements politiques qu'on annoncait.
Le sol, disait-on,
passerait en d'autres mains, les moissons des pays de la-bas viendraient ecraser les notres, il n'y aurais plus
que des ronces dans nos champs.
Et apres? est-ce qu'on peut faire du tort a la terre? Elle appartiendra quand
meme a quelqu'un, qui sera bien force de la cultiver pour ne pas crever de faim.
Si, pendant des annees, les
mauvaises herbes y poussaient, ca la reposerait, elle en redeviendrait jeune et feconde.
La terre n'entre pas
dans nos querelles d'insectes rageurs, elle ne s'occupe pas plus de nous que des fourmis, la grande travailleuse,
eternellement a sa besogne.
Il y avait aussi la douleur, le sang, les larmes, tout ce qu'on souffre et tout ce qui revolte, Francoise tuee,
Fouan tue, les coquins triomphants, la vermine sanguinaire et puante des villages deshonorant et rongeant la
terre.
Seulement, est-ce qu'on sait? De meme que la gelee qui brule les moissons, la grele qui les hache, la
foudre qui les verse, sont necessaires peut-etre, il est possible qu'il faille du sang et des larmes pour que le
monde marche.
Qu'est-ce que notre malheur pese, dans la grande mecanique des etoiles et du soleil? Il se
moque bien de nous, le bon Dieu! Nous n'avons notre pain que par un duel terrible et de chaque jour.
Et la
terre seule demeure l'immortelle, la mere d'ou nous sortons et ou nous retournons, elle qu'on aime jusqu'au
crime, qui refait continuellement de la vie pour son but ignore, meme avec nos abominations et nos miseres.
Longtemps, cette revasserie confuse, mal formulee, roula dans le crane de Jean.
Mais un clairon sonna au loin,
le clairon des pompiers de Bazoches-le-Doyen qui arrivaient au pas de course, trop tard.
Et, a cet appel,
brusquement, il se redressa.
C'etait la guerre passant dans la fumee, avec ses chevaux, ses canons, sa clameur
de massacre.
Il serrait les poings.
Ah! bon sang! puisqu'il n'avait plus le coeur a la travailler, il la defendrait, la vieille terre
de France!
Il partait, lorsque, une derniere fois, il promena ses regards des deux fosses, vierges d'herbe, aux labours sans
fin de la Beauce, que les semeurs emplissaient de leur geste continu.
Des morts, des semences, et le pain
poussait de la terre.
FIN La Terre
VI 278.
»
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- Sujet : « Le théâtre n'est pas le pays du réel : il y a des arbres en carton, des palais de toile, un ciel de haillons, des diamants de verre, de l'or de clinquant, du fard sur la pêche, du rouge sur la joue, un soleil qui sort de dessous la terre. C'est le pays du vrai : il y a des coeurs humains dans les coulisses, des coeurs humains dans la salle, des coeurs humains sur la scène » Victor Hugo, Tas de Pierres III
- «Le théâtre n'est pas le pays du réel: il y a des arbres de carton, des palais de toile, un ciel de haillons, des diamants de verre, de l'or de clinquant, du fard sur la pêche, du rouge sur la joue, un soleil qui sort de dessous terre. C'est le pays du vrai: il y a des coeurs humains sur la scène, des coeurs humains dans la coulisse, des coeurs humains dans la salle.» (Victor Hugo, Tas de pierres III, 1830-1833).
- Commentez ce jugement de Victor Hugo sur le théâtre : "Le théâtre n'est pas le pays du réel: il y a des arbres en carton, des palais de toile, un ciel de haillons, des diamants de verre, de l'or de clinquant, du fard sur la pêche, du rouge sur la joue, un soleil qui sort de dessous la terre. C'est le pays du vrai : il y a des coeurs humains dans la coulisse, des coeurs humains dans la salle."
- Sujet : « Le théâtre n'est pas le pays du réel : il y a des arbres en carton, des palais de toile, un ciel de haillons, des diamants de verre, de l'or de clinquant, du fard sur la pêche, du rouge sur la joue, un soleil qui sort de dessous la terre. C'est le pays du vrai : il y a des coeurs humains dans les coulisses, des coeurs humains dans la salle, des coeurs humains sur la scène » Victor Hugo, Tas de Pierres III