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L'auberge de l'ange gardien Le general se leva et annonca qu'il etait temps de s'habiller.

Publié le 11/04/2014

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L'auberge de l'ange gardien Le general se leva et annonca qu'il etait temps de s'habiller. Chacun passa dans sa chambre, et de tous cotes on entendit partir des cris de surprise et de joie. Elfy et Mme Blidot avaient des robes de soie changeante, simples, mais charmantes; des chales legers en soie brodee, des bonnets de belle dentelle. Les rubans d'Elfy etaient bleu de ciel; ceux de sa soeur etaient verts et cerise. Les cols, les manches, les chaussures, les gants, les mouchoirs, rien n'y manquait. Moutier avait trouve un costume bourgeois complet; Derigny de meme; Jacques et Paul, de charmantes jaquettes en drap soutache, avec le reste de l'habillement. Ils n'oublierent pas leurs montres; chacun avait la sienne. Les toilettes furent rapidement terminees, tant on etait presse de se faire voir. Quand ils furent tous reunis dans la salle, le general ouvrit majestueusement sa porte; a l'instant il fut entoure et remercie avec une vivacite qui le combla de joie. LE GENERAL;--Eh bien, mes enfants, croirez-vous une autre fois le vieux Dourakine quand il vous dira: "Ayez confiance en moi, ne vous inquietez de rien?" --Bon! cher general! s'ecria-t-on de tous cotes. LE GENERAL,--Je vous repete, mes enfants, ne vous tourmentez de rien; tout sera fait et bien fait. A present, allons recevoir nos invites et le notaire. ELFY.--Ou ca, general? ou sont-ils? LE GENERAL.--C'est ce que vous allez voir, mon enfant. Allons, en marche! Par file a gauche! Le general sortit le premier; il etait en petite tenue d'uniforme avec une seule plaque sur la poitrine. Il se dirigea vers l'auberge Bournier, suivi de tous les habitants de l'Ange-Gardien. Le general donnait le bras a Elfy, Moutier a Mme Blidot; Derigny donnait la main a ses enfants. Tout le village se mit aux portes pour les voir passer. "Suivez, criait le general, je vous invite tous! Suivez-nous, mes amis." Chacun s'empressa d'accepter l'invitation, et on arriva en grand nombre a l'auberge Bournier. Au moment ou ils furent en face de la porte, la toile de l'enseigne fut tiree et la foule enchantee put voir un tableau representant le general en pied; il etait en grand uniforme, couvert de decorations et de plaques. Au-dessus de la porte etait ecrit en grosses lettres d'or: Au General reconnaissant. La peinture n'en etait pas de premiere qualite, mais la ressemblance etait parfaite, et la vivacite des couleurs en augmentait la beaute aux yeux de la multitude. Pendant quelques instants on n'entendit que des bravos et des battements de mains. Au meme instant le cure parut sur le perron; il fit signe qu'il voulait parler. Chacun fit silence. "Mes amis, dit-il, mes enfants, le general a achete l'auberge dans laquelle il aurait peri victime des miserables assassins sans le courage de M. Moutier et de vous tous qui etes accourus a l'appel de notre brave sergent. Il a voulu temoigner sa reconnaissance a la famille qui devient celle de Moutier, en faisant l'acquisition de cette auberge pour repandre ses bienfaits dans notre pays; bien plus, mes enfants, il a daigne consacrer la somme enorme de cent cinquante mille francs pour reparer et embellir notre pauvre eglise, pour fonder une maison de Soeurs de charite, un hospice, une salle d'asile et des secours aux malades et infirmes de la commune. Voila, mes enfants, ce que nous devrons a la generosite du General reconnaissant. Que cette enseigne rappelle a jamais ses bienfaits. Les cris, les vivats redoublerent. On entoura le general, on voulut le porter jusqu'en dedans de la maison. Il s'y opposa d'abord avec calme et dignite, puis la rougeur aux joues, avec quelques jurons a mi-voix et des mouvements de bras, de jambes et d'epaules un peu trop prononces, puis enfin par des evolutions si violentes que chacun se recula et lui laissa le passage libre. XXI. Le contrat. Generosite inattendue. 73 L'auberge de l'ange gardien On monta le perron, on entra dans la salle; Elfy et Moutier se trouverent en face d'une foule compacte: le notaire, les parents, les amis, les voisins, tous avaient ete invites et remplissaient la salle, agrandie, embellie, peinte et meublee. Des sieges etaient prepares en nombre suffisant pour tous les invites. Le general fit asseoir Elfy entre lui et Moutier, Mme Blidot a sa gauche, puis Derigny et les enfants; le notaire se trouvait en face avec une table devant lui. Quand tout le monde fut place, le notaire commenca la lecture du contrat. Lorsqu'on en fut a la fortune des epoux, le notaire lut: "La future se constitue en dot les pres, bois et dependances attenant a la maison dite l'Ange-Gardien." Elfy poussa un cri de surprise, sauta de dessus sa chaise et se jeta presque a genoux devant le general qui se leva, la prit dans ses bras et, lui baisant le front: "Oui, ma chere enfant, c'est mon cadeau de noces. Vous allez devenir la femme, l'amie de mon brave Moutier, deux fois mon sauveur et toujours mon ami. Je ne saurais assez reconnaitre ce que je lui dois; mais en aidant a son mariage avec vous, j'espere m'etre acquitte d'une partie de ma dette." Le general tendit la main a Moutier, l'attira a lui et le serra avec Elfy dans ses bras. "Oh! mon general, dit Moutier a voix basse, permettez que je vous embrasse." --De tout mon coeur, mon enfant... Et, a present, continuons notre contrat. Le notaire en acheva la lecture; une seule clause, qui fit rougir Mme Blidot, parut se ressentir de la bizarrerie du general. Il etait dit: "Dans le cas ou Mme Blidot viendrait a se remarier, sa part de propriete de l'Ange-Gardien retournerait a sa soeur Elfy, et serait compensee par la maison a l'enseigne: Au General reconnaissant, que le general comte Dourakine lui cederait en toute propriete, mais a la condition que Mme Blidot epouserait l'homme indique par le general comte Dourakine et qu'il se reserve de lui faire connaitre." Le notaire ne put s'empecher de sourire en voyant l'etonnement que causait cette clause du contrat, qu'il avait cherche vainement a faire supprimer. Le general y tenait particulierement; il n'avait pas voulu en demordre. Mme Blidot rougit, s'etonna et puis se mit a rire en disant: "Au fait, je ne m'oblige a rien, et personne ne peut m'obliger a me marier si je ne le veux pas." --Qui sait? dit le general, qui sait? Vous le voudrez peut-etre quand vous connaitrez le futur. --Pas de danger que je me remarie. --Il faut signer, Messieurs, Mesdames, dit le notaire. --Et puis diner, dit le general. Mme Blidot ne fut nullement effrayee de cette annonce du general, quoique rien ne lui parut arrange pour un repas quelconque; mais elle commencait a compter sur cette espece de feerie qui faisait tout arriver a point. Elfy signa, puis Moutier, puis le general, puis Mme Blidot, le cure, Jacques, Paul, Derigny et la foule. Quand chacun eut appose son nom ou sa croix au bas du contrat, le general proposa de retourner diner a l'Ange-Gardien; Mme Blidot ne put s'empecher de fremir de la tete aux pieds. Comment diner, sans diner, sans couvert, sans table! "General, dit-elle d'un air suppliant, si nous dinions ici? C'est si joli!" LE GENERAL, avec malice.--Du tout, ma petite femme, nous dinons chez vous. Ne voyez-vous pas qu'Elfy et Moutier sont impatients de se promener dans leur nouvelle propriete? Allons, en route. XXI. Le contrat. Generosite inattendue. 74
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« On monta le perron, on entra dans la salle; Elfy et Moutier se trouverent en face d'une foule compacte: le notaire, les parents, les amis, les voisins, tous avaient ete invites et remplissaient la salle, agrandie, embellie, peinte et meublee.

Des sieges etaient prepares en nombre suffisant pour tous les invites.

Le general fit asseoir Elfy entre lui et Moutier, Mme Blidot a sa gauche, puis Derigny et les enfants; le notaire se trouvait en face avec une table devant lui.

Quand tout le monde fut place, le notaire commenca la lecture du contrat.

Lorsqu'on en fut a la fortune des epoux, le notaire lut: “La future se constitue en dot les pres, bois et dependances attenant a la maison dite l'Ange-Gardien.” Elfy poussa un cri de surprise, sauta de dessus sa chaise et se jeta presque a genoux devant le general qui se leva, la prit dans ses bras et, lui baisant le front: “Oui, ma chere enfant, c'est mon cadeau de noces.

Vous allez devenir la femme, l'amie de mon brave Moutier, deux fois mon sauveur et toujours mon ami.

Je ne saurais assez reconnaitre ce que je lui dois; mais en aidant a son mariage avec vous, j'espere m'etre acquitte d'une partie de ma dette.” Le general tendit la main a Moutier, l'attira a lui et le serra avec Elfy dans ses bras. “Oh! mon general, dit Moutier a voix basse, permettez que je vous embrasse.” —De tout mon coeur, mon enfant...

Et, a present, continuons notre contrat. Le notaire en acheva la lecture; une seule clause, qui fit rougir Mme Blidot, parut se ressentir de la bizarrerie du general.

Il etait dit: “Dans le cas ou Mme Blidot viendrait a se remarier, sa part de propriete de l'Ange-Gardien retournerait a sa soeur Elfy, et serait compensee par la maison a l'enseigne: Au General reconnaissant, que le general comte Dourakine lui cederait en toute propriete, mais a la condition que Mme Blidot epouserait l'homme indique par le general comte Dourakine et qu'il se reserve de lui faire connaitre.” Le notaire ne put s'empecher de sourire en voyant l'etonnement que causait cette clause du contrat, qu'il avait cherche vainement a faire supprimer.

Le general y tenait particulierement; il n'avait pas voulu en demordre. Mme Blidot rougit, s'etonna et puis se mit a rire en disant: “Au fait, je ne m'oblige a rien, et personne ne peut m'obliger a me marier si je ne le veux pas.” —Qui sait? dit le general, qui sait? Vous le voudrez peut-etre quand vous connaitrez le futur. —Pas de danger que je me remarie. —Il faut signer, Messieurs, Mesdames, dit le notaire. —Et puis diner, dit le general. Mme Blidot ne fut nullement effrayee de cette annonce du general, quoique rien ne lui parut arrange pour un repas quelconque; mais elle commencait a compter sur cette espece de feerie qui faisait tout arriver a point. Elfy signa, puis Moutier, puis le general, puis Mme Blidot, le cure, Jacques, Paul, Derigny et la foule.

Quand chacun eut appose son nom ou sa croix au bas du contrat, le general proposa de retourner diner a l'Ange-Gardien; Mme Blidot ne put s'empecher de fremir de la tete aux pieds.

Comment diner, sans diner, sans couvert, sans table! “General, dit-elle d'un air suppliant, si nous dinions ici? C'est si joli!” LE GENERAL, avec malice.—Du tout, ma petite femme, nous dinons chez vous.

Ne voyez-vous pas qu'Elfy et Moutier sont impatients de se promener dans leur nouvelle propriete? Allons, en route.

L'auberge de l'ange gardien XXI.

Le contrat.

Generosite inattendue.

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