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Le Mauvais Genie M.

Publié le 11/04/2014

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Le Mauvais Genie M. GEORGEY.--La croix! Marechal des logis! C'etait joli! Marechal des logis et la croix a vingt et un ans! Je demandais pour toi; je obtiendrai; je t'emmener avec moi! Je te mener a Madme Bonarde." Frederic lui serra les mains; son visage rayonna de bonheur. Il le remercia chaudement. Huit jours apres, M. Georgey lui apportait un conge d'un an. Il s'occupa ensuite du passage sur un bon batiment et des provisions necessaires pour le voyage. Quinze jours plus tard, M. Georgey et Frederic debarquaient a Toulon. Ils n'y resterent que vingt-quatre heures, pour y prendre quelque repos. Frederic ecrivit a sa mere pour lui annoncer son arrivee avec M. Georgey. Trois jours plus tard, ils entraient dans la ferme des Bonard. L'entrevue fut emouvante. Mme Bonard ne pouvait se lasser d'embrasser, d'admirer son fils et de remercier M. Georgey. Le pere ne se lassait pas de regarder ses galons de marechal des logis. Julien etait tellement embelli et fortifie qu'il etait a peine reconnaissable. Frederic fut beaucoup admire; il avait grandi d'une demi-tete; il avait pris de la carrure; ses larges epaules, son teint basane, ses longues moustaches lui donnaient un air martial que Julien enviait. "Et moi qui suis reste de si chetive apparence! dit Julien en tournant autour de Frederic. FREDERIC.--Tu te crois chetif? Mais tu es grandi a ne pas te reconnaitre. Pense donc que tu n'as que dix-sept ans. Tu es grand et fort pour ton age. BONARD.--Le fait est qu'il nous fait l'ouvrage d'un homme. Et toujours pret a marcher; jamais fatigue. --Pas comme moi a son age", dit Frederic en souriant. Il devint pensif; le passe lui revenait. M. GEORGEY.--Allons, marechal des logis, pas parler de dix-sept ans. Parle de vingt-deux, c'etait plus agreable. Voyez, papa Bonarde. Combien votre garcon il etait superbe. Et magnifiques galons! Et moi qui voyais arriver le galons sur mon toit. BONARD.--Comment, sur votre toit? Quel toit? M. GEORGEY.--C'etait le toiture du colonel. Je voyais de mon lunette. Il se battait furieusement! C'etait beau! magnifique! Fridric il tapait sur les Mauricauds! Les Mauricauds ils tombaient, ils tortillaient. C'etaient le serpents contre les lions. Et Fridric etait apres brigadier. Et une autre combattement, il etait marechal des logis." Frederic voulut changer de conversation, mais M. Georgey revenait toujours aux batailles, aux traits de bravoure, aux hauts faits de Frederic; le pere etait tout oreille pour M. Georgey; la mere etait tout yeux pour son fils. Quand on eut bien cause, bien questionne et bien dine, quand Frederic eut bien fait connaitre ce qu'il devait a son excellent protecteur, sauf l'affaire du conseil de guerre que M. Georgey l'avait engage a ne confier qu'a sa mere, Bonard voulut faire voir son marechal des logis dans le bourg. Il lui proposa d'aller chez M. le cure. M. GEORGEY.--Et aussi, je voulais avoir le logement pour moi. Quoi faisait Caroline? MADAME BONARD.--Votre logement est tout pret, Monsieur; nous avons une belle chambre pour vous a la ferme; grace aux douze mille francs que vous avez laisses a Julien, grace a votre generosite envers lui et envers nous, nous avons bien agrandi et ameliore la maison. Si vous desirez avoir Caroline, elle viendra tres XXVII. BATAILLE ET VICTOIRE 99 Le Mauvais Genie volontiers; elle est chez sa mere, elles font des gants. M. GEORGEY.--Oh! yes! Je voulais tres bien. Je voulais voir mon logement chez vous." M. Georgey fut promene dans toute la maison. Il y avait en haut deux grandes et belles chambres; Julien en avait une pres de lui; il en restait deux, pour Caroline et pour quelque autre visiteur. En bas demeuraient Bonard et sa femme et Frederic. En redescendant dans la salle, Frederic jeta un regard furtif du cote de l'ancienne armoire brisee; il vit avec une vive satisfaction qu'elle n'y etait plus. M. Georgey, apres le depart de Frederic, avait achete un beau dressoir-buffet qui avait remplace l'armoire fatale, brulee par son ordre. Pendant plusieurs jours, Bonard triomphant, mena son fils chez toutes ses connaissances et dans la ville ou il cherchait tous les pretextes possibles pour le faire passer devant la demeure des gendarmes; les galons de Frederic lui valaient le salut militaire des simples gendarmes et une poignee de main du brigadier. Le pere saluait avec son fils et s'arretait volontiers pour causer et dire un mot des combats racontes par Georgey. Frederic ne voulut pourtant pas rester oisif: il travailla comme Julien et son pere: ce fut pour Bonard un avantage reel; il ne prenait plus d'ouvrier, tout le travail se faisait entre eux. Caroline, qui etait rentree avec joie chez son ancien maitre, aidait Mme Bonard dans les soins du menage et ceux du betail. M. Georgey vivait heureux comme un roi, entoure de gens qu'il aimait et qui eprouvaient pour lui autant d'affection que de reconnaissance. Il resolut de se fixer dans le pays. Il acheta tout pres des Bonard une jolie habitation au bord d'une riviere tres poissonneuse ou il pouvait se donner le plaisir de la peche, et dont il voulut profiter pour y etablir une usine. Caroline devint sa femme de menage sous la direction de sa mere, qui etait entree avec elle au service de M. Georgey. La fin du conge de Frederic approchait, il ne restait plus que trois mois de cette bonne vie de famille; il regrettait souvent de ne pouvoir la continuer jusqu'a la fin de sa vie. "Mais, disait-il, faut que je fasse mon temps; j'ai encore trois annees de service." Mme Bonard pleurait; Frederic cherchait a la distraire, mais plus le moment approchait, plus la tristesse augmentait, et plus Frederic se sentait dispose a la partager. "Ah! si j'avais dix-huit ans, disait Julien, comme je partirais a ta place! Et avec quel bonheur je vous donnerais a tous ce temoignage de ma reconnaissance. FREDERIC.--Tu aimerais donc la vie de soldat? JULIEN.--Non, pas a present. Mais si c'etait pour t'en debarrasser, je l'aimerais plus que tout autre etat." M. Georgey ne disait rien; quelquefois il vantait l'etat militaire. "C'etait magnifique! disait-il. C'etait si glorieux!" Un jour, au moment du diner. M. Georgey presenta une lettre a Frederic. M. GEORGEY.--C'etait le colonel; il demandait le nouvelles de ta sante. XXVII. BATAILLE ET VICTOIRE 100

« volontiers; elle est chez sa mere, elles font des gants. M.

GEORGEY.—Oh! yes! Je voulais tres bien.

Je voulais voir mon logement chez vous.” M.

Georgey fut promene dans toute la maison.

Il y avait en haut deux grandes et belles chambres; Julien en avait une pres de lui; il en restait deux, pour Caroline et pour quelque autre visiteur.

En bas demeuraient Bonard et sa femme et Frederic. En redescendant dans la salle, Frederic jeta un regard furtif du cote de l'ancienne armoire brisee; il vit avec une vive satisfaction qu'elle n'y etait plus.

M.

Georgey, apres le depart de Frederic, avait achete un beau dressoir-buffet qui avait remplace l'armoire fatale, brulee par son ordre. Pendant plusieurs jours, Bonard triomphant, mena son fils chez toutes ses connaissances et dans la ville ou il cherchait tous les pretextes possibles pour le faire passer devant la demeure des gendarmes; les galons de Frederic lui valaient le salut militaire des simples gendarmes et une poignee de main du brigadier.

Le pere saluait avec son fils et s'arretait volontiers pour causer et dire un mot des combats racontes par Georgey. Frederic ne voulut pourtant pas rester oisif: il travailla comme Julien et son pere: ce fut pour Bonard un avantage reel; il ne prenait plus d'ouvrier, tout le travail se faisait entre eux. Caroline, qui etait rentree avec joie chez son ancien maitre, aidait Mme Bonard dans les soins du menage et ceux du betail. M.

Georgey vivait heureux comme un roi, entoure de gens qu'il aimait et qui eprouvaient pour lui autant d'affection que de reconnaissance.

Il resolut de se fixer dans le pays.

Il acheta tout pres des Bonard une jolie habitation au bord d'une riviere tres poissonneuse ou il pouvait se donner le plaisir de la peche, et dont il voulut profiter pour y etablir une usine.

Caroline devint sa femme de menage sous la direction de sa mere, qui etait entree avec elle au service de M.

Georgey. La fin du conge de Frederic approchait, il ne restait plus que trois mois de cette bonne vie de famille; il regrettait souvent de ne pouvoir la continuer jusqu'a la fin de sa vie. “Mais, disait-il, faut que je fasse mon temps; j'ai encore trois annees de service.” Mme Bonard pleurait; Frederic cherchait a la distraire, mais plus le moment approchait, plus la tristesse augmentait, et plus Frederic se sentait dispose a la partager. “Ah! si j'avais dix-huit ans, disait Julien, comme je partirais a ta place! Et avec quel bonheur je vous donnerais a tous ce temoignage de ma reconnaissance. FREDERIC.—Tu aimerais donc la vie de soldat? JULIEN.—Non, pas a present.

Mais si c'etait pour t'en debarrasser, je l'aimerais plus que tout autre etat.” M.

Georgey ne disait rien; quelquefois il vantait l'etat militaire. “C'etait magnifique! disait-il.

C'etait si glorieux!” Un jour, au moment du diner.

M.

Georgey presenta une lettre a Frederic. M.

GEORGEY.—C'etait le colonel; il demandait le nouvelles de ta sante.

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