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Le roman idéaliste et psychologique : GEORGE SAND - Les laboureurs

Publié le 21/06/2011

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GEORGE SAND (1801-1876).

George Sand est le pseudonyme de Lucile-Aurore Dupin. Après une enfance rêveuse et romanesque, elle épousa le baron Dudevant. Bientôt séparée-de son mari, elle débuta dans les lettres en 5831. Ses principaux romans sont : Mauprat, le Meunier d' Angibaut. François le Champi, la Mare au diable, la Petite Fadette, le Marquis de Villemer.... Ses théories morales et humanitaires sont très discutables, et d'ailleurs démodées. Où elle reste supérieure, incomparable parfois, c'est dans la description de la nature. Elle la regarde avec tendresse et ravissement, et loin d'y jeter son orgueilleuse personnalité et de lui prêter son âme, elle se laisse envahir et bercer par tout ce qu'elle voit. Cependant, rien de plus net que ses descriptions de l'Auvergne et du Berry. L'attendrissement de son coeur ne nuit ni à sa sérénité, ni à sa sûreté d'artiste. Peut-être a-t-elle trop embelli le paysan. Elle n'a fait, du moins, que le simplifier; et elle a trouvé dans la réalité tous les traits qu'elle idéalise.

Les laboureurs (1848).

Je marchais sur la lisière d'un champ que des paysans étaient en train de préparer pour la semaille prochaine. Le paysage était vaste et encadrait de grandes lignes de verdure, un peu rougie aux approches de l'automne, ce large terrain d'un brun vigoureux, où des pluies récentes avaient laissé, dans quelques sillons, des lignes d'eau que le soleil faisait briller comme de minces filets d'argent. La journée était claire et tiède, et la terre fraîchement ouverte par le tranchant des charrues exhalait une vapeur légère. Dans le haut du champ, un vieillard poussait gravement son areau de forme antique, traîné par deux boeufs tranquilles, à la robe jaune pâle, véritables patriarches de la prairie, hauts de taille, un peu maigres, les cornes longues et rabattues, de ces vieux travailleurs qu'une longue habitude a rendus frères, comme on les appelle dans nos campagnes, et qui, privés l'un de l'autre, se refusent au travail avec un nouveau compagnon et se laissent mourir de chagrin. Les gens qui ne connaissent pas la campagne taxent de fable l'amitié du boeuf pour son camarade d'attelage. Qu'ils viennent voir au fond de l'étable un pauvre animal maigre, exténué, battant de sa queue inquiète ses flancs décharnés, soufflant avec effroi et dédain sur la nourriture qu'on lui présente, les yeux toujours tournés vers la porte et grattant du pied la place vide à ses côtés, flairant les jougs et les chaînes que son compagnon a portés, et l'appelant sans cesse avec de déplorables mugissements. Le bouvier dira : « C'est une paire de boeufs perdue; son frère est mort, et celui-là ne travaillera plus. Il faudrait pouvoir l'engraisser pour l'abattre ; mais il ne veut pas manger, et bientôt il sera mort de faim. « Le vieux laboureur travaillait lentement, en silence, sans efforts inutiles. Son docile attelage ne se pressait pas plus que lui; mais grâce à la continuité d'un labeur sans distraction et d'une dépense de forces éprouvées et soutenues, son sillon était aussi vite creusé que celui de son fils, qui menait à quelque distance quatre boeufs moins robustes, dans une veine de terres plus fortes et plus pierreuses. Mais ce qui attira ensuite mon attention était véritablement un beau spectacle, un noble sujet pour un peintre. A l'autre extrémité de la plaine labourable, un jeune homme de bonne mine conduisait un attelage magnifique : quatre paires de jeunes animaux à robe sombre mêlée de noir fauve à reflets de feu, avec ces têtes courtes et frisées qui sentent encore le taureau sauvage, ces gros yeux farouches, ces mouvements brusques, ce travail nerveux et saccadé qui s'irrite encore du joug et, de l'aiguillon, et n'obéit qu'en frémissant de colère à la domination nouvellement imposée. C'est ce qu'on appelle des boeufs fraîchement liés. L'homme qui les gouvernait avait à défricher un coin naguère abandonné au pâturage, et rempli de souches séculaires, travail d'athlète auquel suffisaient à peine son énergie, sa jeunesse et ses huit animaux quasi indomptés. Un enfant de six à sept ans, beau comme un ange, et les épaules couvertes, sur sa blouse, d'une peau d'agneau qui le faisait ressembler à un petit saint Jean-Baptiste des peintres de la Renaissance, marchait dans le sillon parallèle à la charrue, et piquait le flanc des boeufs avec une gaule longue et légère, armée d'un aiguillon peu acéré. Les fiers animaux frémissaient sous la petite main de l'enfant, et faisaient grincer les jougs et les courroies liés à leur front, en imprimant au timon de violentes secousses. Lorsqu'une racine arrêtait le soc, le laboureur criait d'une voix puissante., appelant chaque bête par son nom, mais plutôt pour calmer que pour exciter; car les boeufs, irrités par cette brusque résistance, bondissaient, creusaient la terre de leurs larges pieds fourchus, et se seraient jetés de côté, emportant l'areau à travers champs, si, de la voix et de l'aiguillon, le jeune homme n'eût maintenu les quatre premiers, tandis que l'enfant gouvernait les quatre autres. Il criait aussi, le pauvret, d'une voix qu'il voulait rendre terrible, et qui restait douce comme sa figure angélique. Tout cela était beau de force ou de grâce; le paysage, l'homme, l'enfant, les taureaux sous le joug; et malgré cette lutte puissante, où la terre était vaincue, il y avait un sentiment de douceur et de calme profond qui planait sur toutes choses. Quand l'obstacle était surmonté, et que l'attelage reprenait sa marche égale et solennelle, le laboureur, dont la feinte violence n'était qu'un exercice de vigueur et une dépense d'activité, reprenait tout à coup la sérénité des âmes simples, et jetait un regard de contentement paternel sur son enfant qui se retournait pour lui sourire.

(La Mare au diable, Calmann-Lévy, éditeur.) QUESTIONS D'EXAMEN

1. — L'ensemble. — Nature du morceau : une admirable description de labour. — Justifiez le titre : les laboureurs; Combien de tableaux de labour distinguez-vous dans cette description? Montrez qu'il y a cependant unité dans le morceau; En quoi vous parait consister cette unité? (impression produite; la caractériser).

II. — L'analyse du morceau. — Distinguez les différentes parties de la description : a) Le cadre du paysage; b) Les trois tableaux de labour (le vieillard ; — son fils; — le jeune homme, assisté de l'enfant); Parmi ces trois tableaux, n'en est-il pas un d'arrière-plan, à peine esquissé ? Lequel ? Les deux autres sont des tableaux de premier plan; — quel est celui qui attire le plus votre attention et que l'auteur parait avoir peint avec tendresse et ravissement ? Comment travaille le vieux laboureur ? Quelle est l'allure de ses boeufs ? Dites ce qui vous frappe et ce que vous admirez dans le dernier tableau de labour : (le laboureur, jeune et fort..., les boeufs, leur nombre, leur vigueur..., la difficulté du travail..., l'enfant, beau comme un ange); Montrez le contraste qui existe entre la force des boeufs et la faiblesse de l'enfant.

III. — Le style ; — les expressions. — te Faites ressortir l'exacte précision des termes (des boeufs de haute taille, un peu maigres, les cornes longues et rabattues...); Indiquez quelques expressions imagées (des animaux à robe sombre mêlée de noir fauve à reflets de feu..., un enfant beau comme un ange...); Montrez que George Sand voit la nature avec des yeux d'artiste et qu'elle la poétise ( Tout cela était beau de force et de grâce...; il y avait un sentiment de douceur et de calme profond qui planait sur toutes choses...); Qu'appelle-t-on la robe d'un boeuf ? Expliquez les expressions suivantes : flancs décharnés, déplorables mugissements, yeux farouches, souches séculaires, feinte violence.

IV. - La grammaire. — Indiquez les mots de la même famille que semaine; Quelles sont les propositions subordonnées contenues dans le deuxième alinéa ? Nature et fonction de chacun des mots suivants : lentement, silence, efforts, labeur, forces (même alinéa) ?

Rédaction. — Un enfant touchant les boeufs, dans une scène de labour : ses cris, ses gestes, son r6le.   

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« 1.

— L'ensemble.

— Nature du morceau : une admirable description de labour.

— Justifiez le titre : les laboureurs;Combien de tableaux de labour distinguez-vous dans cette description? Montrez qu'il y a cependant unité dans lemorceau; En quoi vous parait consister cette unité? (impression produite; la caractériser). II.

— L'analyse du morceau.

— Distinguez les différentes parties de la description : a) Le cadre du paysage; b) Lestrois tableaux de labour (le vieillard ; — son fils; — le jeune homme, assisté de l'enfant); Parmi ces trois tableaux,n'en est-il pas un d'arrière-plan, à peine esquissé ? Lequel ? Les deux autres sont des tableaux de premier plan; —quel est celui qui attire le plus votre attention et que l'auteur parait avoir peint avec tendresse et ravissement ?Comment travaille le vieux laboureur ? Quelle est l'allure de ses boeufs ? Dites ce qui vous frappe et ce que vousadmirez dans le dernier tableau de labour : (le laboureur, jeune et fort..., les boeufs, leur nombre, leur vigueur..., ladifficulté du travail..., l'enfant, beau comme un ange); Montrez le contraste qui existe entre la force des boeufs etla faiblesse de l'enfant. III.

— Le style ; — les expressions.

— te Faites ressortir l'exacte précision des termes (des boeufs de haute taille,un peu maigres, les cornes longues et rabattues...); Indiquez quelques expressions imagées (des animaux à robesombre mêlée de noir fauve à reflets de feu..., un enfant beau comme un ange...); Montrez que George Sand voit lanature avec des yeux d'artiste et qu'elle la poétise ( Tout cela était beau de force et de grâce...; il y avait unsentiment de douceur et de calme profond qui planait sur toutes choses...); Qu'appelle-t-on la robe d'un boeuf ?Expliquez les expressions suivantes : flancs décharnés, déplorables mugissements, yeux farouches, souchesséculaires, feinte violence. IV.

- La grammaire.

— Indiquez les mots de la même famille que semaine; Quelles sont les propositions subordonnéescontenues dans le deuxième alinéa ? Nature et fonction de chacun des mots suivants : lentement, silence, efforts,labeur, forces (même alinéa) ? Rédaction.

— Un enfant touchant les boeufs, dans une scène de labour : ses cris, ses gestes, son r6le.. »

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