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L'être en tant que conscience et l'être en tant que réalité. Immanences et transcendances

Publié le 16/03/2011

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conscience

Husserl 2, Ideen I § 42. « Par principe l'essence régionale du vécu (et plus particulièrement la subdivision régionale constituée par la cogitatio) implique que le vécu puisse être perçu dans une perception immanente; l'essence d'une chose spatiale implique que celle-ci ne le soit pas... La chose comme telle et toute réalité au sens authentique du mot (ce sens restant d'ailleurs à élucider et à fixer, implique par essence et tout à fait par principe qu'on ne puisse en avoir une perception immanente et de façon générale la rencontrer dans l'enchaînement du vécu. C'est en ce sens qu'on appelle transcendance la chose prise en elle-même et absolument parlant. Du même coup se déclare la distinction de principe la plus radicale qui soit en général entre les modes de l'être, la distinction entre conscience et réalité naturelle.

Cette opposition entre immanence et transcendance enveloppe... une distinction de principe dans la façon dont l'une et l'autre se donnent. Perception immanente et transcendante ne se distinguent pas seulement en ce que l'objet intentionnel, offert dans son ipséité corporelle, est tantôt réellement (reell) immanent au percevoir, tantôt non; la distinction tient plutôt à la façon dont l'objet est donné; or dans toutes les modifications de la perception sous forme de présentification, dans les intuitions parallèles du souvenir et de l'imagination, on retrouve mutatis mutandis, ces modes différents avec leurs caractères distinctifs essentiels. La chose est l'objet de notre perception en tant qu'elle « s'esquisse « (Abschattung, sich abs chatten), ce caractère s'appliquant à toutes les déterminations qui « tombent « en chaque cas dans la perception de façon « véritable « et authentique. Un vécu ne se donne pas par esquisses. Ce n'est pas la propriété fortuite de la chose ou un hasard de « notre constitution humaine « que « notre perception « ne puisse atteindre les choses elles-mêmes que par l'intermédiaire de simples esquisses. Nous sommes au contraire sur le plan de l'évidence : l'essence même de chose spatiale (même pris au sens le plus large, qui inclut les « choses visuelles «) nous enseigne que ce type ne peut par principe être donné à la perception que par esquisses. (Note de Ricœur : Dieu lui-même percevrait par esquisses, cf. éd. allemande pp. 78, 81, 157); de même l'essence de la cogitatio, du vécu en général, nous enseigne que le vécu exclut cette façon d'être donné. En d'autres termes, dès qu'il s'agit d'existants appartenant à cette région, on ne peut conférer le moindre sens à des expressions telles que « apparaître «, « être figuré par esquisses «. Là où l'être n'est plus d'ordre spatial, il est dénué de sens de dire qu'on le voit de différents points de vue, en changeant d'orientation, en considérant les différentes faces qui s'offrent à l'occasion de ces mouvements, en tenant compte des différentes perspectives, apparences et esquisses. D'autre part, c'est une nécessité d'essence, qui demande à être saisie comme telle sous le signe de l'évidence apodictique, que l'être spatial en général ne puisse être perçu par un moi (par tout moi possible) que selon la façon d'être donnée caractérisée plus haut. Il peut seulement « apparaître « sous la condition d'une certaine « orientation «, chacune enveloppant nécessairement de nouvelles orientations dont la possibilité est systématiquement préfigurée dans la précédente; à chacune correspond à nouveau une certaine « manière d'apparaître « de la chose que nous exprimons en disant que tel ou tel « côté « se donne, etc., etc... Si nous prenons l'expression « manière d'apparaître « au sens de mode du vécu, (cette expression pouvant aussi, comme cela ressort avec évidence de la description précédente, avoir un sens ontique corrélatif) cela revient à dire : certains types du vécu, présentant une structure particulière, ou plus exactement certaines perceptions concrètes présentant une structure particulière impliquant dans leur essence que l'objet intentionnel enveloppé par elles accède à la conscience à titre de chose spatiale ; par essence, elles comportent la possibilité idéale de se déployer dans un divers ininterrompu de perceptions soumises à un ordre déterminé et susceptibles de se poursuivre indéfiniment, sans jamais par conséquent présenter une conclusion. De ce divers procède, en vertu de sa structure eidétique, l'unité d'une conscience qui donne son objet de façon concordante (einstimmig; note de Ricœur : cette concordance des esquisses est la base de la synthèse d'identification par laquelle la chose apparaît comme une et la même. C'est elle qui trahira la précarité de la perception : il est possible qu'elle cesse et que par là il n'y ait plus de monde); cette conscience est conscience d'une unique chose perçue qui apparaît avec une perfection croissante, en présentant des faces toujours nouvelles et selon des déterminations toujours plus riches. D'autre part, la chose spatiale se réduit à une unité intentionnelle qui par principe ne peut être donnée que comme l'unité qui lie ces multiples « manières d'apparaître «.

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