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SACHA GUITRY: (Pasteur, Acte III, sc. vi)

Publié le 01/07/2011

Extrait du document

guitry

Fils du célèbre acteur Lucien Guitry, Sacha débuta tout jeune. Il est le fantaisiste le plus original de notre temps. Avec une liberté parfois excessive, mais toujours avec esprit, il a composé et joué lui-même comme on ne pourra plus les jouer après lui, des pièces qui échappent à une analyse rai sonnée et dont le mérite singulier est de ne ressembler à rien. — A côté de ces œuvres légères, il a donné plusieurs pièces biographiques, telles que : La Fontaine, Béranger, et surtout Pasteur. Pasteur et le petit Meister.

Au 2e acte de sa pièce, Sacha Guitry a mis en scène un des épisodes les plus célèbres de la vie de Pasteur. Celui-ci venait de découvrir le vaccin contre la rage; on lui amène un petit berger, Joseph Meister, qui a été cruellement mordu en luttant contre un loup enragé. Pasteur l'a soigné, et guéri. Deux ans après, il reçoit la visite de l'enfant qui vient le remercier et lui montrer le prix qu'il a obtenu à l'école (3e acte).

JOSEPH MEISTER. — Bonjour, monsieur Pasteur.... PASTEUR. — Approche un peu, petit, je te vois mal... (l'enfant fait quelques pas). Mais... tu es bien?... JOSEPH MEISTER. — Je suis le fils Meister!.. PASTEUR. —OH!... Mon petit... viens vite... viens... que je te regarde... viens... tu n'es pas malade, j'espère? JOSEPH MEISTER. — Mais non, monsieur Pasteur, au contraire... c'est parce que je vais très bien que je viens.... PASTEUR. — Ah!... Que c'est bien, ça... que c'est gentil de venir me voir!... Tu viens me montrer, n'est-ce pas, comme tu vas bien? JOSEPH MEISTER. — Mais oui, monsieur Pasteur!... PASTEUR. — C'est mon petit... vous vous souvenez... le premier... que j'ai... sauvé!... Et tu vas très bien, n'est-ce pas, maintenant? JOSEPH MEISTER. — OH! oui, monsieur Pasteur.... PASTEUR. — Et tu n'as plus jamais, jamais mal, n'est-ce pas? JOSEPH MEISTER. — Oh! jamais.... PASTEUR.—C'est bien ça!... Montre-moi tes mains.... On ne voit presque plus rien maintenant, c'est très bien!... Il a eu si mal, ce pauvre petit bonhomme... et il a été si courageux!... Tu te rappelles quand tu jouais avec les lapins, là-bas!... Il savait que j'étais obligé de les tuer... et souvent il me demandait leur grâce... et je faisais toujours ce qu'il me demandait!... Tu es un grand garçon, à présent... j'espère! Est-ce que tu vas en classe? JOSEPH MEISTER. — Oui, monsieur Pasteur.... PASTEUR. — Il faut y aller, tu sais... et puis il faut bien travailler! C'est si bon de travailler!... Tu verras!... Il faut que tu deviennes un petit garçon très intelligent.... Il faut que tu me fasses honneur... tu me dois bien ça, n'est-ce pas?... Tu sais ce que tu me dois? JOSEPH MEISTER. — Maman m'a dit, monsieur Pasteur, que je vous devais la vie!... PASTEUR. — Ah! Que ces mots sont beaux dans cette petite bouche!... N'est-ce pas que c'est très beau d'entendre ces mots- là?... Ce petit enfant me doit la vie!... S'il était orphelin, je ne m'en séparerais jamais!... Sa petite existence m'est plus précieuse encore que si je la lui avais donnée... car il me l'avait confiée dans un horrible état... et j'ai pu la lui rendre. LE DOCTEUR. — Je partage votre émotion, Pasteur.... PASTEUR. — Elle est immense, mon ami!... Oh!... Que tu as bien fait de venir, mon chéri... c'est d'un bon petit cœur ce que tu as fait là... et tu remercieras bien ta maman!... Qu'est- ce que c'est que ce livre que tu as sous le bras? JOSEPH MEISTER. — C'est mon prix de cette année.... PASTEUR. — Son prix!... Tu as eu un prix!... JOSEPH MEISTER. — C'est pour vous le montrer que je suis venu!... PASTEUR. — Et dire qu'il ne comprend pas ce qu'il est en train de faire!... Montre-moi d'abord tes beaux yeux vivants... regarde-moi bien... dans mes yeux à moi... et dis-moi que tu ne souffres plus jamais... jamais.... JOSEPH MEISTER. — Jamais.... Jamais.... PASTEUR. — Merci, merci, merci!... Je t'aime!... Merci! (Il l'embrasse et, pendant un instant, il le tient contre lui)

(Pasteur, Acte III, sc. vi)

QUESTIONS D'EXAMEN

I. — L'ensemble. — Une scène vraie ou supposée, mais vraisemblable, de la vie de Pasteur : le petit Joseph Meister, que Pasteur a guéri de la rage, revient, deux années plus tard, remercier son bienfaiteur et lui montrer le prix qu'il a obtenu à l'école. — Quels sont les deux interlocuteurs principaux dans cette scène? N'y a-t-il pas un troisième personnage présent, qui ne joue qu'un rôle assez effacé? Quelle est cependant son utilité? Cette scène vous paraît-elle émouvante? D'où vous semble provenir l'émotion? (de l'angoisse du grand savant devant le résultat de son œuvre; il semble redouter les conséquences de son intervention, il craint que l'enfant ne souffre...; sa joie et sa reconnaissance débordent quand il a la certitude que son petit protégé n'a aucun mal).

II. — L'analyse du morceau. — Indiquez la succession des sentiments dans l'âme du grand savant, à la vue de l'enfant qu'il a sauvé (inquiétude, reconnaissance, attendrissement, émotion intense, sollicitude, affection...); Montrez que la préoccupation dominante de Pasteur dans cette scène est d'être persuadé que l'enfant ne souffre pas. Citez les expressions empreintes d'une sollicitude inquiète par lesquelles il s'informe de sa santé (tu n'es pas malade, j'espère?...; Tu viens -, te montrer, n'est-ce pas, comme tu vas bien...? et tu vas très bien, n'est-ce pas maintenant ? etc...); Pasteur est rempli de reconnaissance pour l'enfant qui est revenu le voir, et qui l'assure ne plus souffrir. Comment s'exprime, cette gratitude (relevez les expressions) ? Cette attitude vous paraît-elle naturelle? Pourquoi? Ne témoigne-t-il pas de l'affection aussi à l'enfant (à développer)? Quel souvenir ancien rappelle-t-il au petit garçon? Quel conseil lui donne-t-il ? Ne semble-t-il pas cependant, à la fin de la scène, priser la vie de l'enfant beaucoup plus que ses succès scolaires ? Quelle est l'attitude de l'enfant, durant toute cette scène (reconnaissance, légère surprise de l'insistance affectueuse de Pasteur à s'informer de sa santé, d'être remercié avec une telle effusion alors que c'est lui qui venait témoigner sa reconnaissance...); Quel effet vous semble devoir produire cette scène au théâtre?

III. — Le style; — les expressions. — Principales qualités du style dans ce morceau : Simplicité, naturel, émotion, enthousiasme..., Que signifient les points de suspension souvent employés dans ce texte?

IV. — Grammaire. — Conjuguez le verbe aller au présent de l'indicatif, au futur, et à l'impératif ; Relevez quatre adverbes et indiquez leur fonction.

Rédaction. — Racontez la vie et l'œuvre de Pasteur; Le petit Joseph Meister vient d'être mordu par un chien enragé. On le conduit auprès de Pasteur, qui le soigne et le guérit. Faites le récit de cet épisode.

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