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sièrement les métaux ; l'Art se propose de les perfectionner en un jour.

Publié le 29/06/2013

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sièrement les métaux ; l'Art se propose de les perfectionner en un jour. La Nature emploie des siècles à former les pierres précieuses ; l'Art prétend les contrefaire en un moment. Quand on posséderait le véritable moyen, ce ne serait pas assez ; il faudrait encore savoir l'appliquer. On est dans l'erreur, si l'on s'imagine que le produit de l'intensité de l'action multipliée par le temps de l'application étant le même, le résultat sera le même. Il n'y a qu'une application graduée, lente, et continue, qui transforme. Toute autre application n'est que destructive. Que ne tirerions-nous pas du mélange de certaines substances dont nous n'obtenons que des composés très imparfaits, si nous procédions d'une manière analogue à celle de la Nature. Mais on est toujours pressé de jouir ; on veut voir la fin de ce qu'on a commencé. De là, tant de tentatives infructueuses ; tant de dépenses et de peines perdues ; tant de travaux que la Nature suggère et que l'Art n'entreprendra jamais, parce que le succès en paraît éloigné 127. Qui est-ce qui est sorti des Grottes d'Arcy 128, sans être convaincu par la vitesse avec laquelle les stalactites s'y forment et s'y réparent, que ces Grottes se rempliront un jour et ne formeront plus qu'un solide immense ? Où est le Naturaliste qui réfléchissant sur ce phénomène, n'ait pas conjecturé qu'en déterminant des eaux à se filtrer peu à peu à travers des terres et des rochers, dont les stillations 129 seraient reçues dans des cavernes spacieuses, on ne parvînt avec le temps à en former des carrières artificielles d'albâtre, de marbre et d'autres pierres dont les qualités varieraient selon la nature des terres, des eaux et des rochers. Mais à quoi servent ces vues sans le courage, la patience, le travail, les dépenses, le temps, et surtout ce goût antique pour les grandes entreprises dont il subsiste encore tant de monuments qui n'obtiennent de nous qu'une admiration froide et stérile. XXXVIII SEPTIÈMES CONJECTURES 130 On a tenté tant de fois sans succès de convertir nos fers en un acier qui égalât celui d'Angleterre et d'Allemagne, et qu'on pût employer à la fabrication des ouvrages délicats 131. J'ignore quels procédés on a suivis ; mais il m'a semblé qu'on eût été conduit à cette découverte importante par l'imitation et la perfection d'une manoeuvre très commune dans les ateliers des ouvriers en fer. On l'appelle trempe en paquet. Pour tremper en paquet, on prend de la suie la plus dure ; on la pile ; on la délaie avec de l'urine ; on y ajoute de 132 l'ail broyé, de la savate déchiquetée et du sel commun ; on a une boîte de fer ; on en couvre le fond d'un lit de ce mélange ; on place sur ce lit un lit de différentes pièces d'ouvrages en fer ; sur ce lit, un lit de mélange, et ainsi de suite, jusqu'à ce que la boîte soit pleine ; on la ferme de son couvercle ; on l'enduit exactement à l'extérieur d'un mélange de terre grasse bien battue, de bourre et de fiente de cheval ; on la place au centre d'un tas de charbon proportionné à son volume ; on allume le charbon ; on laisse aller le feu, on l'entretient seulement ; on a un vaisseau plein d'eau fraîche ; trois ou quatre heures après qu'on a mis la boîte au feu, on l'en tire ; on l'ouvre ; on fait tomber les pièces qu'elle renferme, dans l'eau fraîche qu'on remue à mesure que les pièces tombent. Ces pièces sont trempées en paquet ; et si l'on en casse quelquesunes, on en trouvera la surface convertie en un acier très dur et d'un grain très fin, à une petite profondeur. Cette surface en prend un poli plus éclatant, et en garde mieux les formes qu'on lui a données à la lime 133. N'est-il pas à présumer que, si l'on exposait, stratum super stratum 134, à l'action du feu et des matières employées dans la trempe en paquet, du fer bien choisi, bien travaillé, réduit en feuilles minces, telles que celles de la tôle, ou en verges très menues, et précipité au sortir du fourneau d'aciérage dans un cou- rant d'eaux propres à cette opération, il se convertirait en acier ; si surtout on confiait le soin des premières expériences à des hommes qui accoutumés depuis longtemps à employer le fer, à connaître ses qualités et à remédier à ses défauts, ne manqueraient pas de simplifier les manoeuvres, et de trouver des matières plus propres à l'opération. MOCIX Ce qu'on montre de physique expérimentale dans des leçons publiques suffit-il pour procurer cette espèce de délire philosophique ? je n'en crois rien. Nos faiseurs de cours d'expériences ressemblent un peu à celui qui penserait avoir donné un grand repas, parce qu'il aurait eu beaucoup de monde à sa table. Il faudrait donc s'attacher principalement à irriter l'appétit, afin que plusieurs emportés par le désir de le satisfaire, passassent de la condition de disciples à celle d'amateurs ; et de celle-ci à la profession de Philosophes. Loin de tout homme public ces réserves si opposées aux progrès des sciences. Il faut révéler et la chose et le moyen 135. Que je trouve les premiers hommes qui découvrirent les nouveaux calculs, grands dans leur invention ! que je les trouve petits dans le mystère qu'ils en firent ! Si Newton se fût hâté de parler, comme l'intérêt de sa gloire et de la vérité le demandait, Leibniz ne partagerait pas avec lui le nom d'inventeur 136. L'Allemand imaginait l'instrument, tandis que l'Anglais se complaisait à étonner les Savants par les applications surprenantes qu'il en faisait. En mathématiques, en physique, le plus sûr est d'entrer d'abord en possession, en produisant ses titres au Public. Au reste, quand je demande la révélation du moyen, j'entends de celui par lequel on a réussi ; on ne peut être trop succinct sur ceux qui n'ont point eu de succès.

« XXXVIII SEPTIÈMES CONJECTURES 130 On a tenté tant de fois sans succès de convertir nos fers en un acier qui égalât celui d'Angleterre et d'Alle- magne, et qu'on pût employer à la fabrication des ouvrages délicats 131 .

J'ignore quels procédés on a suivis ; mais il m'a semblé qu'on eût été conduit à cette découverte importante par l'imitation et la perfection d'une manoeuvre très commune dans les ateliers des ouvriers en fer.

On l'appelle trempe en paquet.

Pour tremper en paquet, on prend de la suie la plus dure ; on la pile ; on la délaie avec de l'urine ; on y ajoute de l'ail broyé, de la savate 132 déchiquetée et du sel commun ; on a une boîte de fer ; on en couvre le fond d'un lit de ce mélange ; on place sur ce lit un lit de dif- férentes pièces d'ouvrages en fer ; sur ce lit, un lit de mélange, et ainsi de suite, jusqu'à ce que la boîte soit pleine ; on la ferme de son couvercle ; on l'enduit exac- tement à l'extérieur d'un mélange de terre grasse bien battue, de bourre et de fiente de cheval ; on la place au centre d'un tas de charbon proportionné à son volume ; on allume le charbon ; on laisse aller le feu, on l'entretient seulement ; on a un vaisseau plein d'eau fraîche ; trois ou quatre heures après qu'on a mis la boîte au feu, on l'en tire ; on l'ouvre ; on fait tomber les pièces qu'elle renferme, dans l'eau fraîche qu'on remue à mesure que les pièces tombent.

Ces pièces sont trempées en paquet ; et si l'on en casse quelques- unes, on en trouvera la surface convertie en un acier très dur et d'un grain très fin, à une petite profondeur.

Cette surface en prend un poli plus éclatant, et en garde mieux les formes qu'on lui a données à la li me 133 .

N'est-il pas à présumer que, si l'on exposait, stratum super stratum 134 , à l'action du feu et des matières employées dans la trempe en paquet, du fer bien choisi, bien travaillé, réduit en feuilles minces, telles que celles de la tôle, ou en verges très menues, et précipité au sortir du fourneau d'aciérage dans un cou-. »

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