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« Sur le plan du théâtre, l'invention d'un univers compte moins que la naissance d'un ou deux personnages mémorables. Seules demeurent les œuvres où se meuvent quelques créatures douées d'un si puissant relief, que plus tard, l'humanité donnera leur nom au caractère, au vice ou à la fonction qu'ils représentent. » En vous appuyant sur des exemples précis, empruntés à une ou plusieurs pièces que vous connaissez bien, vous commenterez et discuterez, si bon vous semble, cette opinion de J

Publié le 26/03/2011

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gautier

COMMENTAIRE Ces quelques créatures « douées d'un si puissant relief « sont bien entendu ce que l'on appelle les « types «. Nous devons à la bienveillante sympathie de M. J.-J. Gautier lui-même de pouvoir apporter ici les précisions suivantes : 1° Comme exemples classiques de sa définition, il a bien voulu nous préciser : Harpagon, Figaro... et Célimène, Alceste, Philinte. 2° A notre question « Quels exemples pourriez-vous proposer de votre définition dans le théâtre contemporain? « l'auteur nous a répondu : « Marius, Jean de la Lune, Monsieur Couture «. Les deux premiers sont connus, mais il est sans doute, hélas! nécessaire de rappeler ici que Monsieur Couture est le personnage central de cette résurrection de Tartuffe que nous a donnée François Mauriac dans sa première pièce, Asmodée. Enfin, bien que M. J.-J. Gautier ait tenu à nous rendre la parole pour le commentaire de ce sujet, sa meilleure illustration nous semble bien être cet entretien que le célèbre critique dramatique a eu avec Marcel Pagnol (Figaro littéraire, 3 novembre 1973), et dont nous donnons un important extrait : « Si j'avais écrit Marius au XVIIe siècle, dit Pagnol, je l'aurais écrit comme aujourd'hui. « C'est pourquoi son texte ne vieillit pas. « Et puis il y a autre chose : si, à l'heure actuelle, le théâtre a de moins en moins de succès, si le public le boude, s'il se désintéresse du genre de « dramatisme « qu'on veut lui entonner, c'est, d'une part, que le grand public, le seul qui compte, le seul qui paie ses places, est indifférent, dans son goût du spectacle, dans son rêve vespéral ou dominical, à toutes les questions dont on s'obstine à l'entretenir. Au théâtre, il vient se faire des songes, non retrouver, sous sa forme prosaïque, la morne réalité.  

« Et quand on ne lui parle ni syndicats, ni grèves, on lui présente des monstres! « Or, qu'on le veuille ou non, la très grande majorité de nos congénères est composée d'êtres normaux, sensibles aux sentiments de tout le monde. (...) Ces êtres-là ont le sens des caractères éternels, naturels ; et, tout à coup, ils ont envie d'applaudir lorsqu'on leur en présente la représentation. (...) « Bien sûr, nous connaissons le refrain ; aspiration à l'évasion, la sirène des navires : partir où des oiseaux sont ivres; j'ai de grands départs inassouvis en moi... « Mais, dans le temps où Pagnol écrivait Marius> il y avait aussi un roman qui s'appelait Partir, une pièce intitulée Départs, C'est la légende de Marins qui est restée. « Parce que le poète avait inventé, créé des personnages. « Condition de survie : faire passer un vice, une vertu, une passion dans un être humain, au point que le nom de personnage devienne, par la suite, le symbole du sentiment majeur qui l'anime. « L'auteur rappelle ensuite la réponse faite par Pagnol à la question « Qu'est-ce donc que Merlusse ? « « Un jeune répondrait : c'est telle idée ; je défends telle théorie ; mon film prouve que... et il se perdrait dans des considérations cérébrales... Mobiles, motivations, etc. « Qu'est-ce donc que Merlusse ? « Marcel Pagnol : — Merlusse, c'est un bonhomme qui... « Suit l'histoire, ce qui est arrivé à Merlusse... « Mais avant tout, avant tout propos, tout dessein intellectuel, social, politique, Merlusse, « c'est un bonhomme! « « Un être humain, une créature comme Tartuffe, Harpagon, Célimène, Figaro, Madame Bovary, Marius, Jean de la Lune ou Maigret. « Les grands écrivains sont plus célèbres par les personnages qu'ils ont créés que par les idées qu'ils ont défendues. « Et là, en ce qui le concerne, deux qualités, deux pouvoirs se marient : don d'observation, faculté de re-création. « Maître Panisse, je le connaissais bien... Il s'appelait Gaudissart... Et César, il se nommait Justin. J'ai souvent déjeuné chez lui, avec lui. C'était un copain de Jules... Jules Muraire, autrement dit : Raimu. C'est d'après Justin que j'ai dessiné César. Et, tu vois, il n'y a qu'à regarder les gens, à les écouter parler. « (...).

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