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Turenne et Condé (1687). BOSSUET

Publié le 13/06/2011

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turenne

Analyse. — Bossuet divise son discours en trois parties ; il étudie successivement chez Condé : les qualités du coeur (là, il raconte la bataille de Rocroi), les qualités de l'esprit (campagne d'Alsace et seconde conquête de la Franche-Comté; goûts littéraires de Condé); la piété (les dernières années à Chantilly et la mort). Dans une très belle péroraison, Bossuet, après avoir appelé devant le cercueil de Condé tous les princes et tous les ordres de l'État, déclare qu'il veut désormais « réserver au troupeau qu'il doit nourrir de la parole de vie les restes d'une voix qui tombe et d'une ardeur qui s'éteint «. Ce fut en effet sa dernière oraison funèbre. que la voix commune de l'Europe égalait aux plus grands capitaines des siècles passés, tantôt, à la tête de corps séparés tantôt unis, plus encore par le concours des mêmes pensées que par les ordres que l'inférieur recevait de l'autre; tantôt opposés front à front, et redoublant, l'un dans l'autre, l'activité et la vigilance, comme si Dieu, dont souvent, selon l'Écriture, la sagesse se joue dans l'univers, eût voulu nous les montrer en toutes les formes, et nous montrer ensemble tout ce qu'il peut faire des hommes. Que de campements, que de belles marches, que de hardiesse, que de précautions, que de périls, que de ressources! Vit-on jamais en deux hommes les mêmes vertus, avec des caractères si divers, pour ne pas dire si contraires? L'un paraît agir par des réflexions profondes, et l'autre par de soudaines illuminations; celui-ci par conséquent plus vif, mais sans que son feu eût rien de précipité ; celui-là, d'un air froid, sans avoir jamais rien de lent, plus hardi à faire qu'à parler, résolu et déterminé au dedans, lors même qu'il paraissait embarrassé au dehors. L'un, dès qu'il paraît dans les armées, donne une haute idée de sa valeur, et fait attendre quelque chose d'extraordinaire, mais toutefois s'avance par ordre, et vient comme par degrés aux prodiges qui ont fini le cours de sa vie ; l'autre, comme un homme inspiré, dès sa première bataille, s'égale aux maîtres les plus consommés. L'un, par de vifs et continuels efforts, emporte l'admiration du genre humain et fait taire l'envie; l'autre jette d'abord une si vive lumière qu'elle n'osait l'attaquer. L'un enfin, par la profondeur de son génie et les incroyables ressources de son courage, s'élève au-dessus des plus grands périls, et sait même profiter de toutes les infidélités de la fortune; l'autre, et par l'avantage d'une si haute naissance, et par ces grandes pensées que le ciel envoie, et par une espèce d'instinct admirable dont lu hommes ne connaissent pas le secret, semble né pour entraîner la fortune dans ses desseins, et forcer les destinées. Et, afin que l'on vit toujours dans ces deux hommes de grands caractères, mais divers, l'un, emporté d'un coup soudain, meurt pour son pays, comme un Judas le Machabée l'armée le pleure comme un père, et la cour et tout le peuple gémissent ; sa piété est louée comme son courage, et sa mémoire ne se flétrit point par le temps; l'autre, élevé par les armes au comble de la gloire comme un David, comme lui meurt dans son lit, en publiant les louanges de Dieu et instruisant sa famille, et laisse tous les coeurs remplis tant de l'éclat de sa vie que de la douceur de sa mort. Quel spectacle de voir et d'étudier ces deux hommes et d'apprendre de chacun d'eux toute l'estime que mérite l'autre!

Oraison funèbre de Condé (2e partie).

QUESTIONS D'EXAMEN

I. — L'ensemble; — l'idée générale. — Un parallèle entre Turenne et Condé. — Idée générale : Turenne et Condé avaient les mêmes vertus guerrières,-mais avec des caractères divers, et même contraires (c'est cette idée qui constitue le fond même du parallèle). — Quel est le propre d'un parallèle? Montrez que l'orateur fait le portrait de Turenne et de Condé en opposant leurs caractères trait par trait (à préciser; faire ressortir la disposition antithétique de quelques traits); Quel vous parait être l'avantage de cette constante opposition? (les portraits s'éclairent l'un par l'autre...) ; Le parallèle ne peut-il pas présenter un danger? (trop grossir les contrastes, — supprimer les nuances...); Ce passage d'oraison funèbre est en même temps une page d'histoire : le jugement de Bossuet sur Turenne et sur Condé n'est-il pas conforme à celui des historiens? Bossuet, dans ce parallèle, perd-il de vue le but édifiant qu'il poursuit? (rappeler l'idée religieuse exprimée dans le premier alinéa, et la leçon par l'exemple indiquée à la fin du morceau).

II. — L'analyse du morceau. — Le développement comprend trois alinéas : trouvez un titre pour chacun d'eux : a) Deux grands capitaines, dont les talents sont les mêmes, mais dont les caractères diffèrent; b) Opposition des traits saillants des caractères; c)... ; e Dans la peinture en raccourci que présente la première partie, n'est-il pas un certain nombre d'antithèses? Indiquez-les (que de campements, que de belles marches, — que de hardiesse, que de précautions... ) Distinguez, dans la seconde partie, les traits de caractère dont l'opposition est marquée par Bossuet (les réflexions profondes de l'un, les soudaines illuminations de l'autre,... etc.); N'y a-t-il pas un contraste jusque dans la mort des deux grands capitaines? (préciser, en étudiant la troisième partie).

III. — Le style; — les expressions. — Faites ressortir, dans ce morceau, la propriété des termes (emploi de mots exacts, précis, formant antithèse: les réflexions profondes de Turenne opposées aux soudaines illuminations de Condé...) ; Indiquez quelques expressions militaires et presque techniques donnant de la couleur au style (tantôt à la tête de corps séparés..., tantôt opposés front à front...); Ne retrouvez-vous pas l'accent oratoire dans quelques passages du développement? (les indiquer); Commentez la phrase : Sa mémoire ne se flétrit point par le temps.

IV. — La grammaire. — Indiquez la composition des mots : extraordinaire, incroyable, infidèle; Quels sont les pronoms indéfinis et les pronoms démonstratifs contenus dans la première phrase du second alinéa? (L'un paraît agir...) Quelle est la fonction de chacun d'eux? Distinguez les propositions qui se trouvent dans cette même phrase.

Rédaction. — Faites un parallèle entre Colbert et Louvois.

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