XXXI .
Publié le 30/10/2013
Extrait du document
«
officier
ravalesilencieusement seslarmes.
« Etcomment s’appellecehéros ? » demandeDio.L’officier seméprend surle
ton : « Lui ? » dit-ilbouleversé parcequ’ils’aperçoit qu’ilmontre dudoigt laflaque desang, « jenesais pas.
Iladit qu’il
s’appelait Paul. »« Non », faitDio, « pas Paul.L’autre là-bas,quis’en va,l’assassin galonné ! » « Ah ! »ditl’officier, « le
colonel ? ColonelConstantin Dragasès. » « Quelnométrange ! » penseDio,« Constantinople, 29mai 1453, Constantin XI
Paléologue, surnomméDragasès,dernierempereur deByzance. » Àl’épithète d’assassin, l’officiern’amême pasprotesté.
Assassin, assassin,pourquoi pas ?L’idée faitson chemin, tandisquel’officier franchitlegrillage deprotection de
l’autoroute, luiaussi comme àl’entraînement, ets’enfonce danslacampagne, àpied, souslalune, droitdevant lui...
Dio arepris levolant.
Ilfonce, lavoiture vole.Cen’est pasune nuit àmourir dansuneferraille tordue,bêtement ! Mais
non ! Ilse sent immortel.
Troiskilomètres plusloin, ildouble lescinq chars ducolonel Dragasès.
Ilrit.
Ilest heureux.
Surgit lepéage deVillefranche, oasisviolemment éclairée.Nombreuses motosrangées surleparking.
Silhouettes casquées,
bottées.
Drôlesdecasques, pourdesgendarmes ! Blancs,rouges,bleuvif,barrés delignes verticales auxcouleurs
phosphorescentes.
« Quiêtes-vous, lesgars ? » « Nous, onest lesRésistants prolétaires delaRodhiachimie. » Pursentre les
purs, tousdehors parcette nuitexaltante ! Grèvessurletas, grèves delafaim, séquestrations, sabotages,destruction de
laboratoires, pogromsantiracistes, ratonadesd’antiratons, pillagedemagasins, luttecontre touteslesformes d’oppression,
disponibles pourtoutes sortesd’actions, neconsomment quedesmotos, desfilles, dutabac, desslogans, cassenttoutquand
ils sont encolère, souvent licenciés maistoujours réintégrés parcequ’ils ontfini parfaire peuràtout lemonde, délinquants
politiques caronatrouvé poureuxl’expression quiconvenait : elleexcuse tout.« Etqu’est-ce quevous faites là ?Oùsont
passés lesflics ? » « Disparus depuisuneheure ! » ditunmagnifique grandjeunehomme enjean etblouson galonnéde
surplus américain (badgesurl’épaule : PanamaRangers).
« N’étaient pasassez nombreux, etnous », ilfait ungeste àla
ronde, « plusdedeux cents ! Eux ?Desfoireux.
Troisième légiondemobiles, celledeMâcon, onlaconnaît ! L’andernier,
ils nous onttiré dessus.
Unemanif pacifique, maisfautavouer qu’ilsétaient malembarqués, unpeu étouffés sousle
nombre, lescons ! Onaeu deux morts.
Maisquelbelenterrement ! Centmille personnes, touteslesusines fermées etles
travailleurs défilantderrière lescercueils.
Depuis,lesgens crachent enpassant devantleurscasernes.
Lescommerçants les
servent comme onneservirait pasunNoir dans uneépicerie blancheenAfrique duSud.
Leurs mômes n’ontplusde
copains.
Àl’école, personne leurcause.
Leursbonnes femmes rasentlesmurs etilyamême uncuré quiadit que,
désormais, onleur ferait lamesse chezeux,pour nepas mélanger torchonsetserviettes àl’église.
Leurcommandant aété
sacqué.
Lespauvres ! Ilsnesont plusbons àrien.
Ilsattendent laretraite.
C’esttoutjuste s’ilssifflent encoreaux
carrefours.
Alors,quandilsnous ontvus arriver, ilssesont barrés.
Ilsont simplement ditqu’ils reviendraient avecdes
renforts.
Nous,pendant cetemps, onsemarre ! » PanamáRanger,quandilrit, dégage unepuissance deséduction
irrésistible.
Beaucomme unjeune dieuéchappé, triomphant, delasombre forêtdesmachines.
Delarace desconquérants.
Conquête pourconquête ! Mouvement pourmouvement ! Àquoi celasert-il ? Ons’en fout ! Dios’est nommé.
Ilrépète :
« Que faites-vous exactement ? » « Unpeudetout », répond Panamá Ranger.« Aujourd’hui, c’estgala ! Récupération,
d’abord.
Ontient unposte depéage, alorsonfait payer.
Pourtousceux quiviennent dusud ets’en vont verslenord, dix
fois letarif, cinqcents francs, c’estdonné ! Ilspayent sansmoufeter.
Bientroppressés defiler.
Verslesud, desactions
retardatrices, àmoins qu’ils’agisse decopains.
Onatrouvé chezlesflics unbarrage pliant,avecd’énormes pointes.Le
premier convoimilitaire nousestpassé souslenez, ilallait tropvite, onn’a pas euletemps des’installer.
Maislesecond,
on nel’a pas loupé ! Lajeep del’officier etles trois premiers camionssontvenus gentiment s’empalerdesquatre pneus.
J’ai dit : « Arrêt-buffet, toutlemonde descend ! » Lessoldats rigolaient.
Maisl’officier étaitundur.
Ilafait aligner tout
son monde enformation decombat etilacrié : « Déblayez-moi toutça ! » Alors j’aidit : « Regardez-nous bien,lesgars !
On aàpeu près lemême âge.Que tous ceux quisont ouvriers, paysans,étudiants, travailleurs prolétairessortentdurang ! »
Cela adonné dumouvement ! L’officiers’estretrouvé aveccinqpauvres typesquisesont empressés deleplaquer.
Ils
doivent courirencore... » « Etl’officier ? » demandeDio.« Ilcherche àse placer enstop àun kilomètre d’ici.Jene sais s’il
aura dusuccès : onl’a foutu complètement àpoil ! » Dioritde bon coeur.
Aumilieu del’aire destationnement, devantles
bâtiments depolice, unefoule degens, uniformes etblousons mêlés,toutesvariétés decasques fraternellement confondues,
se chauffent autourdegrands feuxdebois.
Onentend descris dejoie, deschants, desplaisanteries oùle« cul nudu
capitaine » prenddesdimensions rabelaisiennes.
Toutcelan’est pasbien méchant.
Ridellesetbanquettes descamions hors
d’usage crépitent joyeusement danslesflammes.
« Jecrois qu’on vafiler vers lesud, pardes routes secondaires », dit
Panamá Ranger.« Ilparaît queplus bas,lesflics sontassez mauvais.
Maisonlaisse notretestament. » Illève lebras,
montrant lefronton dupéage oùs’étale unlarge calicot brillamment éclairé :
PROLÉTAIRES, SOLDATS,PEUPLEDUGANGE
TOUS SOLIDAIRES CONTREL’OPPRESSION
« C’est parfait », approuve Dio,« mais netardez pasàpartir.
Toutàl’heure vontpasser cinqchars, avecuncolonel enfurie
et celui-là n’hésitera pasàtirer, croyez-moi ! » « C’estbon »,ditlegarçon, « chao ! onsereverra surlaCôte. »
« Quand ? » demandeDio.L’autre sourit :« Onn’estpastrop pressé.
Avectoussescochons quis’enfuient verslenord,
pour s’offrir desvacances ausoleil, lecoin nemanquera pasdevillas ! J’espère qu’ilsn’ontpasvidé leurs piscines.
La
révolution, pourunefois qu’on latient, c’estd’abord dubon temps ! » Exactement ceque pensait Dioaumême instant.
Suit unaimable désordre, deuxoutrois tôles froissées pardes conducteurs hilaresquifont mine des’injurier àla façon des
bons Français auvolant, puistoutdisparaît danslanuit, camions etgarçons, tandisqueparvient encorejusqu’à Clément
Dio cerefrain qu’ilavait écrit : « Carletemps desmille anss’achève ets’achève letemps desmille ans... » Unsilence de
courte durées’établit, ànouveau troubléparlefracas menaçant deschars deDragasès surgissant del’ombre sousles
lampadaires dupéage.
Lecanon duchar detête s’élève légèrement ettire quatre coupsenrafales.
S’écroulent dansun.
»
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