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L'art au service du politique

Publié le 25/11/2018

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dE L'ENGAGEMENT A LA PROPAGANDE
 
À l'origine, le terme de propagande désigne les actions mises au service de la propagation de la foi catholique. À partir de 1793, la Révolution française souhaite mobiliser les artistes contre les « ennemis de la liberté et de la République » : ainsi, Louis David est-il invité « à employer les talents et moyens en son pouvoir pour multiplier les gravures et les caricatures qui peuvent réveiller l'esprit public... ». Puis, au xix\" siècle, les partis politiques tentent de transmettre aux foules le message révolutionnaire. L'image s'impose d'emblée comme le médium le plus approprié, étant aisément déchiffrable. Si certains artistes s'étaient déjà engagés, à titre personnel, pour différentes causes, tels Eugène Delacroix (Lo Liberté guidant le peuple, 1830) ou Honoré Daumier, au travers de ses caricatures de bourgeois, c'est au tournant du siècle que le statut de l'art comme moyen de propagande va s'imposer dans les partis politiques et les États européens. L'avènement des régimes totalitaires fascistes et communistes, dans les années 1920-1930, portera à son comble la mainmise du pouvoir sur la création artistique.
AUX ORIGINES DE LA PROPAGANDE
L'asservissement de l’art au politique durant la première moitié de XXe siècle trouve son origine dans les mutations qu'ont connues les sociétés au début du siècle et dans l'effondrement des valeurs traditionnelles après la guerre de 14-18. Les mobilisations populaires du XIXe siècle avaient amené certains penseurs à élaborer une théorie des foules.
Gustave Le Bon écrit en 1895 une Psychologie des foules qui sera lue par Lénine et Mussolini ; mais c'est Georges Sorel (1847-1922) qui, le premier, va rendre compte du pouvoir mobilisateur de l'image et des mythes politiques - la Nation, la Révolution, la grève générale -, dans ses Réflexions sur la violence (1908). À cela s'ajoutent de nouveaux outils de diffusion de la pensée : les journaux à grand tirage, la publicité, bientôt la radio et le cinéma, ainsi que l'exploitation de la couleur dans les magazines et autres imprimés. Dès lors, les conditions psychologiques et techniques d'une nouvelle politique d'influence des comportements humains et de mobilisation de grande ampleur se trouvent réunies.
La Première Guerre mondiale va fournir aux États belligérants - y compris les démocraties - l'occasion de familiariser l'opinion publique avec les pratiques propagandistes. Aux premières heures des combats, la plupart des artistes européens s'enthousiasment pour ce qu'ils croient être une guerre régénératrice. En France, une Commission des missions artistiques voit le jour en 1916 et, perpétuant la tradition du peintre aux armées, organise des voyages d'artistes sur le front afin que ceux-ci fixent sur la toile les vertus patriotiques et l'allant des combattants. Mais Pierre Bonnard, Édouard Vuillard et Félix Vallotton, entre autres, en reviennent avec des images de misère et de mort peu à même de servir l'œuvre de propagande. Seuls les futuristes italiens continueront à développer une thématique de la modernité de la guerre. Les autres mouvements d'avant-garde (constructivisme russe, expressionnisme allemand, dadaïsme et surréalisme) se positionneront rapidement contre l'idéal national et patriotique. Par réaction, la plupart vont être amenés à servir la cause internationale, le communisme.


« LES PEINTRES RÉVOLUTIONNAIRES MEX ICAI NS En 1921, au terme d'une guerre civile de dix ans, la révolution zapatiste triomphe au Mexique.

Le nouveau gouvernement lance un programme culturel pour soutenir ses réformes sociales.

Ces mesures donneront naissance à un courant : le muralisme, dont les trois principaux représentants seront Diego Rinm (1886-1957), José Clemente Orozco (1883-1949) et David Alfaro Siqueiros (1896-1974).

Dotés d'une conscience politique aiguë, ces artistes vont enraciner leurs vastes et flamboyantes peintures murales dans les réalités locales tout en synthétisant les apports formels du cubisme ou de l'expressionnisme avec les traditions de l'art précolombien.

Leurs œuvres, d'un réalisme na·ll, décorent l'université de Mexico, l'École nationale de l'agriculture ou le musée d'Art, d'An thropologie et d'Histoire du château de Chapultepec (La Révolution mexicaine, fresque de 450 m1 par Siqueiros).

propagande idéologique (le film La Vraie Gloire de 1946 est une commande conjointe des États-Unis et de la Grande-Bretagne), mais celle-ci ne s'exercera jamais véritablement que sous la forme d'une censure plus ou moins officielle.

LES CARACTÉRISTIQUES DE !:ART TOTALITAIRE Quelle que soit leur origine géographique, les productions artistiques totalitaires ainsi que les œuvres de propagande officielle des régimes démocratiques en temps de guerre présentent les mêmes caractéristiques.

Il s'agit toujours de donner à voir l'image d'un paradis social où le peuple heureux construit f----------------;---------------1 un avenir encore plus radieux sous la conduite avisée de ses chefs, tout en triomphant de ses ennemis.

LE RÉALISME SOCIALISTE ET LES PRINCIPES DU füHRER Le réalisme soviétique Le discrédit qui frappe Malevitch dès 1922 est significatif du revirement de la politique culturelle du Parti en Union soviétique .

Tous les mouvements d'avant-garde sont visés.

~art doit désormais décrire le quotidien, les faits historiques , les réalisations du Parti, le peuple et ses dirigeants .

Dans un court article de 1905 intitulé «Organisation du Parti et littérature du Parti», Lénine faisait valoir la nécessité politique d'un contrôle total du pouvoir sur la production culturelle.

Cet article a été lu par Mussolini, Hitler etMoo Zedong qui s'en inspirera dès 1940.

À cet effet, le Comité central du Parti avait créé dès 1920 un département spécial d'«Agitation et de Propagande» (Agitprop).

Il s'agissait d'associer la démarche activiste de l'agitation, basée sur des actions ponctuelles, et le long processus de propagande reposant sur un système d'information et d 'éducation .

En matière d'art, cette tâche incombe à partir de 1922 à I'AKHRR dirigée par des artistes réalistes tels que Kassatkine et Padimov.

Entre 1932 et 1935 , la culture de la propagande totalitaire prend un tournant décisif.

En Union soviétique, le réalisme socialiste s'impose comme la seule doctrine artistique tolérée ; en Allemagne, "les principes du Führer» imposent aussi la seule ligne directrice autorisée en matière d'art.

Dans ces deux régimes totalitaires, l'État achève également la mise en place des appareils de contrôle sur la production artistique .

Enfin , la terreur frappe tous ceux qui s'écartent des directives officielles.

Stoline et Gorki sont les initiateurs politiques du réalisme •••• socialiste.

Selon l'expression de Staline, l'artiste se doit d'être un" ingénieur de l'âme»; il lui faut représenter avec fidélité la réalité dans ce qu'elle a de dynamique et de révolutionnaire.

Par ailleurs, l'œuvre doit éduquer et« remodeler idéologiquement» (Jdanov) les travailleurs.

Pour servir le peuple, les artistes doivent en partager la vie (un leitmotiv de la politique culturelle maoïste), mais aussi connaître à la perfection l'idéologie du Parti .

Les principaux artistes de ce mouvement seront les peintres Alexandre Deïneka, G uer o ssim ov et Khmelko , les sculpteurs Merkourov et Vera Moukhina.

1: art et les nazis On retrouve les mêmes préoccupations politiques dans le régime nazi ; seule la terminologie change: l'art y sert non pas une classe sociale (le prolétariat) mais la communauté du peuple allemand .

Autre différence notable, la ligne idéologique artistique y est dictée par le chancelier Hitler lui-même.

Son premier geste en arrivant au pouvoir avait été de poser la première pierre de la Maison de l'Art allemand à Munich .

Pour Hitler, :;: ~Id à grande ---::JI • échelle ou le sport (Les Dieux dustode, -•uo i"''••• film de Leni Riefenstahl commandé !~~Ill par Goebbels, li 1936).

Dans la pensée totalitaire, la tâche de construire scientifiquement la société idéale est associée à la construction concrète de nouveaux lieux de pouvoir et de vie.

Souvent désignés dans les affiches de propagande comme architectes du communisme ou du Ill• Reich, Staline et Hitler supervisent personnellement les projets d'urbanisme ou d'édification des monuments.

Idéologie faite pierre, - l'architecture totalitaire entend rompre avec les constructions du passé.

Par leurs dimensions colossales, le stodedu Reich à !:IDÉALISATION DU POUVOIR ET DU CHEF Le chef incarne toutes les valeurs idéologiques et spirituelles et, à ce titre, tout l'art totalitaire converge vers le culte de sa personnalité.

Le chef est éternel.

Même mort, il reste un objet d'adoration; le mausolée de Lénine de Chtchous sev est le centre sacré et géographique de l'espace soviétique et moscovite .

Très réglementée, l'iconographie officielle des chefs, de même que la mise en scène de leurs interventions, est confiée aux artistes les plus proches du pouvoir.

Elle comporte quatre "attitudes" : celle du chef d'État met l'accent sur sa mojesté (voir les sculptures monumentales de Staline sur le canal Volga-Don ); celle du chef menant à la victoire ; celle du guide spirituel et pédagogique (le genre préféré de Mao Zedong); enfin, plus rare, celle de l'ami, proche du peuple, disp ensant conseils et tendres se (Chine, Corée du Nord).

Les hauts dignitaires du régime ne sont pas oubliés, bien entendu.

On doit à Leni Riefenstahl, la cinéaste officielle du Reich, un document édifiant sur les grands-messes nazies : Le Triomphe de la volonté (1935) , véritable hymne au pouvoir et témoignage hallucinant de sa mise en scène.

Nuremberg (Albert Speer) comme le ministère des Affaires étrangères à Moscou (Vladimir Gelfreikh et Mikha"1l Minkus) symbolisent tout à la fois la force du pouvoir, la g randeur de ses projets et un changement d'échelle­ la politique n'étant plus faite pour des individus mais pour le peuple ou les masses populaires.

Bien que jamais construits, les projets de la Maison du peuple à Berlin (surmontée d'un dôme au diamètre sept fois supérieur à celui de la basilique Saint-Pierre de Rome) et du palais des Soviets (une tour en gradins de 415 rn de haut, surmontée d'une statue de Lénine de 100 rn, œuvre de Boris lofan) témoignent d'un gigantisme et d'une monumentalité propres à placer l'architecture de prestige au sommet de la hiérarchie des arts.. »

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