LE Jazz de 1940 à 1949 : D'une insurrection

Prémices D'une insurrection

Depuis la moitié des années trente, l’Amérique vit à l'heure du swing; on compte par centaines les grands orchestres destinés à la danse, les radios déversent à flots continus des retransmissions en direct de ces immenses ballrooms, l'industrie du disque devient florissante.

Dans ces formations qui leur permettent de subsister, les jeunes jazzmen s’ennuient tout en se forgeant de solides expériences professionnelles et piaffent d’impatience de s'affranchir de routines contraignantes, obstacles à leur part de création personnelle (quelques courts solos seulement); l’orchestre est un carcan pour leur épanouissement, une entrave à leur propre expression; ils éprouvent le besoin d'ébranler ces pesantes et redondantes institutions et rêvent de nouvelles perspectives. Certains chefs supportent mal les incartades de jeunes loups affamés, désireux d’affirmer leurs conceptions harmoniques ou rythmiques; ainsi Cab Calloway déclare au jeune trompettiste Dizzy Gillespie qu’il ne veut pas de «cette musique de Chinois» (!); ainsi Teddy Hill congédie-t-il le batteur Kenny Clarke, poseur de «bombes» au style jugé trop «avancé»... Après les concerts, nombre de futures vedettes de ce «be-bop» en gestation se réunissent dès 1941 dans de petites boîtes de Harlem ouvertes jusqu’à l'aube comme le Minton’s Playhouse ou le Monroe’s Uptown House pour d'innombrables et folles «jam-sessions». On peut y rencontrer le pianiste Thelonious Monk, le guitariste Charlie Christian (membre de l'orchestre de Benny Goodman), le saxophoniste Charlie Parker (qui joue dans celui de Jay McShann), Dizzy Gillespie,