THIERRY BOUTS
Publié le 24/06/2012
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Le triptyque de l'Adoration des mages (Pinacothèque de Munich) et le Martyre de saint Hippolyte (cathédrale Saint-Sauveur, Bruges) témoignent d'une évolution qui s'observe souvent chez les maîtres parvenus à la fin de leur carrière, une évolution vers la grâce. Particulièrement souple et brilhmte, l'Adoration des mages est la partie centrale d'un triptyque sur les volets duquel sont représentés saint Jean-Baptiste, dans un délicieux paysage, et saint Christophe traversant les flots, sous un ciel nuageux que le soleil couchant colore des tons les plus vifs et les plus étranges.
«
Devenu peintre de la ville de Louvain, Bouts se vit commander, en 1468, une décoration
pour le merveilleux hôtel de ville, alors flambant neuf.
Il en subsiste, au musée de Bruxelles,
les
deux grands panneaux qui racontent, en plusieurs épisodes superposés, l'histoire d'une erreur
judiciaire : la Légende de l'empereur Othon.
A l'auteur de ces « tableaux de justice », on a reproché
son flegme excessif.
Les émotions
du condamné, de la veuve héroïque (subissant l'épreuve du feu,
du fer rouge, pour établir l'innocence de son époux), de l'empereur, de l'impératrice coupable,
s'expriment
par gestes timides, étriqués.
Les corps sont allongés et raides, mais de quel style strict
et fier! Imperturbables, les assistants composent des groupes de portraits d'une austère et mâle
énergie.
Dans
leur sobriété, malgré leur écriture un p~u contrainte, les deux panneaux laissent
parler des sentiments essentiels.
Ils constituent le plus considérable effort accompli par la peinture
flamande du xve siècle pour se hausser au plan monumental, pour rivaliser avec l'art mural des
fresquistes italiens.
Le triptyque de
l'Adoration des mages (Pinacothèque de Munich) et le Martyre de saint Hippolyte
(cathédrale Saint-Sauveur, Bruges) témoignent d'une évolution qui s'observe souvent chez
les maîtres parvenus
à la fin de leur carrière, une évolution vers la grâce.
Particulièrement souple
et brilhmte, l'Adoration des mages est la partie centrale d'un triptyque sur les volets duquel sont
représentés saint Jean-Baptiste, dans
un délicieux paysage, et saint Christophe traversant les
flots, sous
un ciel nuageux que le soleil couchant colore des tons les plus vifs et les plus étranges.
L'ensemble a reçu le
surnom de « Perle de Brabant ».
On a voulu retrancher ce chef-d'œuvre
et quelques autres du catalogue de Thierry Bouts pour en faire honneur à un certain « Maître
de la Perlé de Brabant », dont la vogue fut éphémère, mais aujourd'hui, à la suite de Wolfgang
Schône,
à qui l'on doit l'ouvrage le plus érudit sur Dieric Bouts et son école, on est tenté d'attribuer
le triptyque de Munich, ainsi que plusieurs peintures de la même finesse et du même éclat précieux,
à Thierry Bouts le Jeune, fils aîné du maître de la Cene et de la Légende d'Othon.
Selon Wolfgang Schône encore, l'Arrestation du Christ, le beau nocturne conservé à la
Pinacothèque de Munich, serait de la main d'un troisième artiste, assez apparenté à Albert van
Ouwater et dont la production serait à distinguer de celle tant de Thierry II que de Thierry I.
Les deux tiers des œuvres attribuées à ce dernier par Max-J.
Friedlander et la majorité des
historiens passeraient
à l'actif de l'un ou de l'autre disciple.
Il semble que la critique contem
poraine prenne plaisir à sectionner ainsi la personnalité des grands Flamands du xve siècle, à ·
moins qu'elle ne s'efforce, au contraire, de fondre deux individualités en une seule, dans le cas
notamment du Maître de Flémalle et de Van der Weyden! Un Bouts unique, substituant progres
sivement l'élégance à l'austérité, le
charme à la rigueur du style, nous paraît logique et toujours
plausible.
Son art, « intimiste » et bourgeois, n'a point les élans, les accents ·sublimes de Van der
Weyden, l'impeccable splendeur de Jean van Eyck.
Il est fait de sincérité, de probité, de discré
tion dans l'émotion,
de retenue dans l'expression; il est d'une haute tenue morale.
Thierry Bouts
a principalement
introduit dans la peinture une subtile perception du plein air et de la lumière,
une sorte d' « impressionnisme » ingénu.
Il mourut le 6 mai 1475, laissant deux fils peintres : Thierry le Jeune, qui serait un grand
maître d'après la théorie de Schône, et Albert que l'on connaît mieux et qui vécut jusqu'en
mars 1548.
Peintre de transition, Albert Bouts se souvient des inventions de son père, mais subit
aussi l'influence
de· Van der Goes et celle de Quentin Metsys.
Il n'a plus la pureté, la fermeté
« gothiques »; à la Renaissance, d'autre part, il n'emprunte que des motifs ornementaux.
Son
œuvre est abondante, inégale, peu convaincante.
Il finit, d'ailleurs, par tenir boutique de tableaux
de dévotion.
THIERRY BOUTS « La justiCI d'Othon.
» ( Musu Royal dn B1aux-Arts, Bruulhs.)
PAUL FIERENS.
»
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