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Vie et oeuvre de Piero della Francesca

Publié le 29/06/2011

Extrait du document

 

La première mention historique qu'on connaisse de Piero della Francesca se trouve sur un document de 1439 relatif à un paiement fait par l'Hôpital de Santa Maria Nuova, à Florence, au peintre Domenico Veneziano pour des peintures à fresques commencées à Saint-Egide. Dans ce document, il est dit que « Pietro di Benedetto du Borgo à San Sepolcro est avec lui «. On ne dit rien de plus, ni s'il était là comme aide ou comme élève. Ces fresques furent terminées en 1445 et il n'est plus fait mention de Piero dans les paiements successifs. Dans l'intervalle, sa ville natale lui confie le soin des affaires publiques en le nommant, en 1442, conseiller du Peuple. Mais ce très bref aperçu a déjà de l'importance, et pour deux motifs: d'abord parce qu'il démontre que Piero se trouvait à Florence dans un moment où la ferveur artistique et humaniste y était particulièrement brillante ; ensuite, qu'il ne devait pas être dans l'entourage de Domenico comme un simple élève d'âge tendre, car, en ce cas, on n'aurait point fait état de sa présence dans un document officiel; c'est ce que confirme la charge publique qu'il obtint à peine trois ans plus tard. En partant de là, on peut, par induction, établir à peu près son âge.

« probabilité, à Urbin les deux portraits des ducs, ainsi que les « quadri di figure piccole » — les tableaux à petitesfigures — rappelés par Vasari.

Ce fut donc une découverte fondamentale, pour l'art italien, que Roberto Longhi adéfinie avec bonheur « une synthèse perspective de forme-couleur», pour indiquer que l'idée spatiale étaitreprésentée, dans l'esprit de Piero, par un moyen chromatique propre à la rendre Visible et explicite, grâce à unprocédé plus complexe et mieux articulé que ne l'était la perspective dessinée des artistes florentins.En regard de ce modernisme, il reste à expliquer le sens archaïque qui parcourt toutes ses oeuvres.

Ce timbre trèspur des couleurs en larges zones juxtaposées, ces pauses larges et lentes entre les figures sur un fond de paysagequi se dégrade en profondeur, et ces attitudes comme suspendues, cette gravité des gestes, tout cela n'est pasexplicable si l'on s'en tient uniquement à la nature psychologique des personnages, calmes, réfléchis, même à l'heurebouleversante où s'accomplit un miracle, graves et solennels jusqu'à l'abstraction: mais il faut le rapporter toutautant à l'extase et à l'élégance gothiques, à la poésie douce et raffinée du gothique italien finissant.Si Piero s'est penché sur les novateurs florentins de 1425, et avant tout sur Masaccio et Brunellesco, il n'a point faittaire pour autant, en raison de ses premiers goûts et de sa culture siennoise, l'attrait que lui inspiraient le colorisfleuri et tendre de Masolino dont la voûte et les lunettes de la chapelle Brancacci existaient encore en ces années-là; la splendeur étincelante des tableaux de Lorenzo Monaco; la grâce piquante des cortèges de Gentile daFabriano; et cette lumière d'absolu, cette fulguration calme et recueillie, cette absence d'agitation qui caractérisentles vastes compositions narratives de l'Angelico; et, du reste, son appartenance même à l'entourage de Domenico,le peintre vénitien dont le chromatisme plein de fantaisie se déploie dans une ambiance florentine, est, elle aussi,une indication caractéristique de ses préférences.Piero a écouté toutes ces voix diverses et il les a assimilées dans une élaboration qui témoigne d'une maturitéstupéfiante.

Ce serait cependant une erreur d'étendre outre mesure les limites interprétatives de son pouvoird'assimilation.

Ce serait faire de lui un maniériste avant la lettre, plus ou moins contourné, comme un Florentin del'an 1520.

En effet, il a soumis ces divers acquis à l'empreinte de son propre langage, lequel puisait son origine, horsles apports philologiques déjà vus, dans son ouverture intellectuelle, dans la sphère de ses pensées solennelles, desa vision spéculative et souverainement calme.

Tant il est vrai que son langage est déjà formé depuis des débutsqui nous sont connus, c'est-à-dire depuis ce premier polyptique de La Miséricorde (pl.

1) que ses concitoyens luiconfièrent en 1445.

Ce n'est pas, il est vrai, une oeuvre entièrement de sa main et on y découvre des parties faiblesdues à des interventions d'élèves, si bien que la facture en est, dans l'ensemble, inégale.

Bien que le contratimposât le terme de trois ans pour l'accomplissement de l'oeuvre, elle couvrira une très longue période — plus dequinze ans — puisque son frère Marco n'en reçut le solde, de la Confrérie, qu'en 1462.

Les engagements pris àFerrare et à Rimini, puis ceux, plus importants, pris à Arezzo pour les fresques du choeur de Saint-François, et àRome pour le Vatican, expliquent de telles prolongations qui couvrent des années entières, en même temps que delarges recours à des aides.

Il devait y travailler pendant les hivers où le gel, qui l'empêchait de poursuivre lesfresques d'Arezzo, le ramenait à San- sepolcro.

Malgré cela, il n'apparaît que de faibles différences de style entre lesparties exécutées sur-le-champ — les compartiments avec saint Sébastien et saint Jean-Baptiste — et les autresparties exécutées ensuite, c'est-à-dire ceux avec saint Paul et saint Bernardin.

Plus que l'évolution d'une manière enune autre manière, c'est le battement mieux scandé d'une vérité stylistique, claire et affirmée dès l'abord.

C'est lamême grave verticalité, comme le poids d'une colonne, la même ampleur plastique, la même vigueur de la mise enplace équerrée; et c'est aussi ce même roulement de formes cylindriques sur le plan bas de l'horizon, comme s'il nes'était point écoulé, entre les uns et les autres, des années nombreuses.

La Vierge, dans le panneau central, qui apeut-être été exécuté le dernier, encadre sa rotondité du geste puissant et élémentaire des bras ouverts sous lemanteau, lequel s'ouvre lui-même comme une coupole pour accueillir une humanité tremblante et douloureuse.

Il n'ya d'agitation psychologique que dans de rares morceaux; encore disparaîtra-t-elle bien vite pour faire place à uneraideur sévère, à une solennité primordiale, à une abstraction idéale lentement mûrie.

Cette agitation est visibledans certaines figures que protège le manteau, et surtout dans le petit panneau de La Crucifixion, si littéralementcalqué sur celle que Masaccio avait peinte une vingtaine d'années auparavant, à Pise, pour le polyptique duCarminé, même si la perspective est énergiquement indiquée par les bras ouverts de saint Jean, au lieu de l'être parceux de la Madeleine.

Cette dernière figure, Piero l'a supprimée dans sa propre composition, pour obéir à ce besoinde simplicité et de symétrie qui le portait à dépouiller au maximum les épisodes pour atteindre à une plus grandeintensité dans la solitude composée des figures et dans le rapport essentiel de leurs cadences rythmiques et deleurs gestes balancés.

C'est là une exigence que Piero ressent si impérieusement qu'il n'hésite pas, pour obtenir uneplus grande correspondance eurythmique entre les figures, à inverser les cartons préparatoires de ses fresques,comme il advint pour les deux anges porte-couronne de La Vierge de la Parturition de Monterchi ou pour les deuxhommes d'armes, l'un de face et l'autre de dos qui, dans Le Songe de Constantin forment au premier plan uneopposition à l'épisode qui se déroule au fond de la scène.Et l'on n'a pas encore tout dit sur la formation de Piero délia Francesca, qui semble se concentrer sur un foyerintime au lieu de s'étendre en une suite de variations.

Pensons, en effet, au séjour qu'il fit, entre 1448 et 1450, à lacour deLionel d'Esté, à Ferrare, où se réunissaient les esprits les plus fins de l'époque, du jeune Mantegna, qui avait terminéles fresques des Eremitani de Padoue — cette grande oeuvre tourmentée — à Roger van der Weyden qui apportaitici les nouveautés qui s'étaient épanouies dans les Flandres entre Robert Campin et Jan Van Eyck.

On peut doncpenser que son attention fut frappée par le goût naturaliste des peintres nordiques autant que par leur techniquepicturale.

Les petits tableaux de Berlin et de Venise, avec le Saint Gêrôme, portent la marque de cet intérêt aiguisé;on peut le retracer aussi dans le Baptême du Christ, de la National Gallery: ces petits arbres touffus aux feuillesdures, ces versants parsemés de rochers, d'anfractuosités, de taillis et de villages fortifiés; ce lien, enfin, entre lesfigures et le paysage qui n'est plus seulement un accessoire ou un fond, mais le lieu précis de l'événement, avec desnotations d'une vérité profonde, comme ces arbres et ces maisons reflétés dans les eaux, l'ombre le long desbuissons, une lueur claire sur les campaniles, le garçon qui se dévêt pour se jeter dans l'onde fraîche.

Mais on nemanquera pas d'observer là aussi combien Piero sait fondre cette minutie énumérative des maîtres nordiques dans. »

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