AUTEUR: CAMUS Albert
Publié le 17/01/2022
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(1913-1960)
VIE Né à Mondovi (Algérie) le 7 novembre 1913, Albert Camus, qu'éleva sa mère (son père, simple ouvrier agricole, fut tué à la guerre dès 1914), connut très tôt la misère. Boursier, il accomplit néanmoins de solides études (licence de philosophie). Il s'adonna aussi au théâtre (Cie « Théâtre et Travail «) et au journalisme (« Alger républicain «). Rendu à Paris en 1940, il y commença réellement sa carrière littéraire avec le succès retentissant de « L'Etranger «. En dépit d'une santé fragile (tuberculose), des guerres et injustices sociales qui lui furent insupportables, il mena de front, avec exigence et noblesse, de multiples activités : journaliste (célèbre éditorialiste de « Combat «), directeur littéraire d'édition, essayiste, romancier (« La Peste «), auteur dramatique et adaptateur, metteur en scène. En 1957, le Prix Nobel de Littérature est décerné à l'ensemble de son oeuvre pour sa valeur littéraire et morale. Mais à quarante-sept ans, il est tué (le 4 janvier 1960) dans la voiture de son éditeur (M. Gallimard), sur la N. 5, dans l'Yonne.

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dans un labyrinthe administratif, dans une société de cauchemar, cherchant, mais en vain, un interlocuteur à qui ilpuisse demander raison de l'accusation mystérieuse qui pèse sur lui, et à qui il puisse présenter ses justifications.Mais toutes les portes sont closes; il ne rencontre que silence et incompréhension, jusqu'au jour où, pour une fautedont il ignore la nature et sans connaître ni son juge ni son dossier, il est exécuté.
Cette puissante allégorie de lavie humaine semble développer une intuition de Pascal :« Je vois ces effroyables espaces de l'univers quim'enferment, et je me trouve attaché à un coin de cette vaste étendue, sans que je sache pourquoi je suis plutôtplacé en ce lieu qu'en un autre, ni pourquoi ce peu de temps qui m'est donné à vivre m'est assigné à ce point plutôtqu'à un autre de toute l'éternité qui m'a précédé et de toute celle qui me suit...
Tout ce que je connais est que jedois bientôt mourir; mais ce que j'ignore le plus est cette mort même que je ne saurais éviter.
»On voit ce qu'est l'absurde : c'est le fruit de l'athéisme.
Si Dieu n'existe pas ou s'il se cache, quel sens a le monde,quel sens a la vie? La pensée occidentale subit dans l'absurde le contrecoup de la « mort de Dieu » annoncée parNietzsche.
Elle ne peut ni croire en Dieu ni s'en passer.
Ce pessimisme lucide et cette révolte qui d'avance se saitvaine s'expriment aussi chez Heidegger et chez Sartre, notamment dans La Nausée.L'absurde n'est pas une philosophie comme les autres.
Ce n'est pas un système ni une construction intellectuelle,c'est un sentiment.
Beaucoup jouent avec lui sans y adhérer, mais Camus pour sa part n'a pas joué.
Il a ressentil'absurde avec une douloureuse acuité.
Comme d'autres avant lui, il a cherché une étoile au ciel et n'y a trouvé quedes ténèbres.
Et pourtant Camus ne s'est pas résigné à l'absurde.
Là est justement la preuve de l'authenticité deson expérience car le propre de l'absurde est d'être, par définition, insupportable à l'homme; accepter l'absurdecomme une chose naturelle, c'est faire la preuve qu'on ne le ressent pas et c'est le trahir.
Nous voulons dire quel'absurde implique indignation, refus, révolte; par conséquent, ressentir l'absurde, c'est en même temps le refuser.Ce n'est pas par hasard si Pascal et Kierkegaard ont retrouvé Dieu et si Kafka est revenu, à la fin de sa vie, auxvaleurs du judaïsme.Mais dépasser l'absurde ne signifie pas le renier puisque, par définition, ce dépassement ne peut s'appuyer que sur lesentiment même de l'absurde.
La difficulté de comprendre Camus vient de ce que, dans toute son œuvre, coexistentune compréhension profonde du sentiment de l'absurde et une volonté fondée sur ce sentiment lui-même de luitrouver une issue.
Ainsi Camus a l'air parfois d'approuver ce qu'en fait il condamne.
Mais en même temps qu'ilcondamne, il comprend et c'est cela qui peut créer une confusion.Prenons par exemple son premier roman, L'Étranger.
L'Étranger voit mourir sa mère avec indifférence; il se faitcomplice d'un proxénète qui réduit les femmes à l'esclavage et maintient son empire sur elles par la peur et laviolence.
Il est insensible à l'amour sain et généreux que lui porte Maria et il tue sans raison un Arabe.
Peut-oncroire un seul instant que Camus, avocat des Algériens au temps de la colonisation, ami fidèle, défenseur des droitsde l'homme, combattant de la Résistance, ait pu un seul instant songer à présenter ce personnage comme unmodèle? Camus condamne l'Étranger mais, pour lui répondre, il faut connaître ses raisons et Camus sait que cesraisons sont fortes puisque lui-même en éprouve la force.
Dieu n'existe pas; c'est pour cela que l'Étranger tue etlaisse mourir.
Ses motifs sont véritables, mais il faut, pense Camus, leur inventer une autre conséquence que ladémission et le meurtre.
Pour l'instant Camus n'a pas d'autre réponse à offrir.
Il sent obscurément que l'Étranger atort, mais il ne sait pas encore très bien pourquoi.
Il voit à quoi l'absurde peut conduire, il déteste ce à quoi ilconduit mais il n'a encore rien d'autre à proposer.
Aussi éprouve-t-il à l'égard de l'Étranger un mélange deréprobation et de sympathie.
L'emploi de la première personne tout au long du récit (qui nous force à voir l'histoirepar les yeux de Meursault), ce style objectif que Camus a choisi et qu'il a emprunté aux romanciers américainsrendent plus énigmatique encore son attitude envers son héros.
En fait Camus, à ce stade, fait abstraction de toutjugement explicite.
Il nous livre un dossier avec l'apparente neutralité d'un entomologiste.Les choses sont plus claires dans Caligula.
D'abord l'absurde y est poussé plus loin car le personnage de Caligula estd'emblée conscient alors que l'Étranger ne prenait conscience des justifications de sa conduite qu'après coup.
Parailleurs, l'absurde a ici de plus graves conséquences car le héros est un empereur et non un homme moyen et,puisqu'il dispose d'une force illimitée, son désespoir métaphysique répandra la mort sur le monde entier.
Caligula estune allégorie de Hitler.
Nous trouvons dans cette pièce ce qui manquait au roman de L'Étranger : une réfutationintérieure à l'oeuvre.
Les personnages de Chéréa et de Scipion, tout en comprenant l'intuition première de Caligula,désavouent les conséquences que celui-ci en tire.
La mort de Caligula marque l'échec de sa tentative et soulignel'erreur de sa démarche.
L'Étranger aussi mourrait, mais la condamnation qui le frappait ne l'atteignait pas dans savérité alors que le poignard qui tue Caligula ne s'égare pas : il frappe le mal comme mal.La Peste ne laisse plus subsister aucune ambiguïté : ce roman est une fable métaphysique.
La peste,traditionnellement, représente le mal.C'est elle qui frappe les Grecs devant Troie en châtiment d'un sacrilège.
C'est elle que nous voyons chez LaFontaine (Les Animaux malades de la peste) figurer la vengeance divine.
Dans l'oeuvre de Camus, certains, commeles Grecs et les animaux de la fable, imputent ce mal à la justice de Dieu.
C'est le cas du père Paneloux; c'est à luisurtout que s'oppose le Dr Rieux.
Celui-ci sait que ce mal est, sinon sans cause, du moins sans justification, doncqu'il est absurde.
Lui-même a renoncé aux illusions révolutionnaires de Tarrou car on ne guérit pas le mal en faisantle mal.
Il comprend, mais sans l'approuver, la tentative de Grant qui cherche à oublier sa condition malheureuse enpoursuivant la chimère de la perfection artistique; il sait qu'il faut combattre le mal et non le justifier ou le fuir.
Lecombattre, même sans espoir de vaincre jamais, au nom de simples valeurs humaines qui, si elles ne sont pasinscrites dans le ciel, ont d'autant plus besoin de l'homme pour s'affirmer.
La révolte
Dans Le Mythe de Sisyphe, Camus définit l'absurde comme étant une contradiction entre les aspirations humaines etle démenti que leur inflige le monde.
L'absurde n'est donc ni dans le monde ni dans l'homme mais dans leurconfrontation.
Cette définition nouvelle va donner à l'absurde sa solution.
En effet il n'y a contradiction que parcequ'il y a de la part de l'homme exigence de valeurs et refus d'accepter que ces valeurs soient niées par le monde..
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