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SAINT-JOHN PERSE, pseudonyme d'Alexis Saint-Leger Leger, dit aussi Alexis Leger

Publié le 13/10/2018

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SAINT-JOHN PERSE, pseudonyme d'Alexis Saint-Leger Leger, dit aussi Alexis Leger (1887-1975). Les trois noms du poète, ou l’emblème d’une multiplicité qui se dérobe! Evoquant, en I960, le choix de son pseudonyme, Saint-John Perse affirme hautement sa volonté de n’être que dans son œuvre, de n’être que son œuvre : « Etre (en littérature) comme ces navires à quai qui offrent seulement leur poupe à la curiosité des passants : un nom, un port d’attache, c’est là tout leur état civil. Le reste est aventure et n’appartient qu’à eux ».

 

Les trois noms du poète

 

Selon la chronologie, il y a d’abord le nom de l’état civil : Alexis Saint-Leger Leger. Le nom de celui qui naît à la Guadeloupe. Le nom primordial qui structure, qui enracine le moi dans un terroir, dans une généalogie. C’est le nom qui correspond aux souvenirs d’enfance, aux images qui deviendront obsédantes, aux espaces vécus-rêvés, à la prise de contact avec un monde matériel qui attire (l’aridité, le désert, le silence, la mer, les parfums, les corps) ou qui repousse (la pourriture, le visqueux, le graisseux, le mou...).

 

Apparaît ensuite (quand exactement?) le deuxième nom du poète. Simplification, « francisation » peut-être, du premier: Alexis Leger. Dès 1906, en tout cas, le poète signe ainsi sa correspondance. C’est ce nom que retiendront les historiens de la France de l’entre-deux-guerres : ainsi se nomme en effet le diplomate qui sillonne le monde, le directeur de cabinet d’Aristide Briand, le secrétaire général des Affaires étrangères qui s’oppose avec acharnement à la politique dite d’apaisement à l’égard de Hitler, et qui, de ce fait, doit prendre, en 1940, le chemin d’un long exil américain. C’est aussi le nom du voyageur attentif aux évolutions et aux mutations du monde moderne, fasciné par la variété des traditions humaines et des organisations sociales.

 

Le 1er janvier 1924, la Nouvelle Revue française publie Anabase, sous la signature de Saint-John Perse. C’est le troisième nom du poète, ou, plutôt, c’est le nom du poète : « Le nom choisi, écrit-il, ne le fut point en raison d’affinités, réminiscences, ou références d’aucune sorte, tendant à rien signifier ni suggérer d’intellectuel : échappant à tout lien rationnel, il fut librement accueilli tel qu’il s’imposait mystérieusement à l’esprit du poète,

pour des raisons inconnues de lui-même, comme dans la vieille onomastique : avec ses longues et ses brèves, ses syllabes fortes ou muettes, ses consonnes dures ou sifflantes, conformément aux lois secrètes de toute création poétique ». Dont acte! Un pareil nom, pourtant, ne peut empêcher le rêve, ou, si l’on veut, le jeu des connotations... Si l’adjectif, à l’initiale, rattache formellement le pseudonyme au nom premier, il suggère aussi une nostalgie d’ascèse, de sainteté sans Dieu (« Dieu est un mot que Saint-John Perse évite religieusement », remarquera perfidement mais subtilement Claudel!). Le lieu de cette aspiration? Mais tout à la fois la création poétique, le langage, les navigations en solitaire sur l’Atlantique, les explorations des déserts chinois et américain, les retraites en forêt ou quelque part du côté du cap Hatteras, à proximité d’un phare désaffecté...

 

Et « John », certes, pour l’éclat et l’élan phonique d’une prononciation « à l’anglaise » (qu’on pense à la platitude d’un hypothétique Saint-Jean Perse!), mais aussi prénom d’ailleurs, à la fois exotique et familier comme cette Amérique qui occupera une telle place dans la vie et dans la rêverie du poète. Une Amérique de l’exil, mais aussi de l’enracinement (il ne reviendra en France qu’en 1957, lors de la publication d’Amers).

 

« Perse », enfin, tour à tour évocation d’une latinité perdue (Perse, le poète), d’un Orient raffiné et barbare (la Perse), d’un artisanat oublié (tout poème, au fond, ne serait-il pas cette « toile peinte et imprimée » par quoi Littré définit la « perse »?), d’un bleu aux frontières du noir, couleur, comme on sait, des yeux d’Athéna, la déesse au regard « pers », couleur aussi de la haute mer, tant aimée et tant chantée par le poète.

 

A « Saint-John Perse », en tout cas, on imputera le culte de la pensée et de la poésie grecques (Empédocle, Homère, Pindare...), l’amour de la musique, une inlassable curiosité pour toutes les archéologies humaines, pour les secrets des pierres, des faunes et des flores, une fascination pour ces espaces sans limites où la griffe de l’homme ne laisse jamais qu’une trace éphémère... Troisième nom du poète à qui revient, bien sûr, cette œuvre brève (une dizaine de poèmes et guère plus de 400 pages dans l’édition de La Pléiade) mais qui donne le sentiment de viser — et d’atteindre — l’essentiel.

 

Chronologie des œuvres poétiques de Saint-John Perse

 

(date des éditions originales)

 

1911 : Éloges.

 

1924 : Anabase.

 

1944 : Exil (édition intégrale, comprenant « Pluies ».

 

« Neiges » et « Poème à l'Étrangère »).

 

1946 : Vents.

 

1957 : Amers.

 

1960 : Chronique.

 

1962 : Oiseaux.

 

1969 : Chanté par celle qui fut là.

 

1971 : Chant pour un équinoxe.

 

Très vite, dans leur rareté, dans leur fulgurance, les poèmes de Saint-John Perse feront événement. Nul ne fut moins que lui « poète maudit ». Gide et Proust, Apollinaire et Breton... compteront parmi ses premiers admirateurs; et le prix Nobel de littérature qui lui est décerné en 1960 apparaît, au fond, comme une consécration « naturelle », attendue... Il s’éteint à quatre-vingt-huit ans entouré de l’admiration universelle.

 

Une poésie oraculaire

 

Et le poète aussi est avec nous, sur la chaussée des hommes de son temps.

 

Allant le train de notre temps, allant le train de ce grand vent.

 

Son occupation parmi nous : mise au clair des messages. Et la réponse en lui donnée par illumination du cœur.

« Non point l'écrit, mais la chose même.

Prise en son vif et dans son tout.

(Vents, Ill, V I) Telle est , en somme , la fon ction vaticinante du poète.

Perse n'ajamais cessé de la réaffirmer , dans la lignée de Hu go et de quelques autres.

Comme le disait déjà l'au­ teur des Mages, le po è te e st un « célébrateur » et un « révélateur» ...

Aussi bien, dans son étoffe même, la poésie de Saint­ John P erse revêt la solennit é hauta ine et hermétiqu e du discours oraculaire.

Hi stor iquement, cette œuvre est, à peu de chose près, contemporaine des recherc hes les plus opposées: d'un Valéry , qui pratique une stricte versifi ­ cation; d'un Claudel, dont elle est à la fois proche et é loignée; des sur réal istes , qui dissolvent toute forme fix e ..

.

Saint- John Perse , néanm oins, ne se laisse rattacher à aucune école.

La« règle» qu 'i l se forge n'est qu 'à son u sage.

Elle détermine une forme à la fois souple e t stricte, un véritab le ins trum ent (au sens musical du tenne) grâce auquel un souffl e pourra se déployer , une voix résonner dans tou s s es h armoniq ues.

P o in t de vers réguliers et/ou rimés, ma is des séquen­ ces qu'on appe llera , fa ute de mieux , « versets », tantôt lap idaires co mme des hai1. »

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